Écrire Il faut rendre justice à deux militants et protéger leurs proches

Le 30 juin, le journaliste Diego Charles et la militante Antoinette Duclaire ont été tués par balle par des inconnus armés devant le domicile de Diego Charles, à Port-au-Prince. Ils avaient déjà tous deux fait l’objet de menaces et de tentatives d’intimidation. Le lendemain de leur assassinat, des individus armés ont tiré des coups de feu devant leurs domiciles respectifs pour intimider les membres de leur famille et les témoins potentiels.
Des personnes anonymes ont menacé des proches par téléphone, leur disant : « le pire est à venir ».

Amnesty International appelle les autorités à mener sans délai une enquête indépendante et impartiale pour retrouver et poursuivre les responsables présumés de l’assassinat de Diego Charles et d’Antoinette Duclaire et des actes d’intimidation à l’encontre de ces deux personnes, de leurs proches et des témoins.

Diego Charles était reporter pour Radio Vision 2000 et le site Web Larepiblik Magazine, qu’il avait cofondé avec Antoinette Duclaire, une militante politique et une défenseure des droits humains qui n’hésitait pas à critiquer ouvertement le gouvernement et était membre du mouvement d’opposition Matris Liberasyon (Matrice Libération). Dans la nuit du 29 au 30 juin, ils ont été abattus par des inconnus armés devant le domicile de Diego Charles, qu’Antoinette Duclaire venait de déposer devant chez lui en voiture. En raison de leurs activités, ils avaient tous deux été la cible de menaces et de tentatives d’intimidation.

Antoinette Duclaire, 33 ans, n’hésitait pas à critiquer haut et fort le gouvernement. Elle avait dénoncé la corruption et les violations des droits humains commises sous le gouvernement du président Jovenel Moïse, assassiné une semaine après elle. Elle avait notamment condamné le détournement des fonds du programme PetroCaribe, un accord pétrolier entre plusieurs pays des Caraïbes et le Vénézuéla, qui devait permettre à Haïti d’acheter du pétrole à des conditions préférentielles pour permettre le financement de projets de développement. Antoinette Duclaire, qui faisait partie du mouvement de protestation né en 2018 en réponse à ce scandale de corruption, a été abattue au volant de sa voiture alors qu’elle venait de déposer le journaliste Diego Charles devant chez lui. Selon des informations émanant d’un officier de police judiciaire, elle a reçu sept balles, dont certaines à la tête.

Diego Charles, également âgé de 33 ans, a reçu deux balles. L’un des derniers articles qu’il avait rédigés et publiés dans Larepiblik Magazine portait sur un sujet hautement sensible : l’assassinat, en 2020, du bâtonnier de l’ordre des avocats de Port-au-Prince, Monferrier Dorval. Dans cet article, il écrivait que « les autorités n’[avaient] montré aucune volonté de faire avancer le dossier » près d’un an après le meurtre de l’éminent avocat.

Ces dernières années, Antoinette Duclaire avait fait l’objet de menaces et de tentatives d’intimidation, dues à ses activités militantes selon elle et sa famille. Ces menaces s’étaient intensifiées ces derniers mois, amenant Antoinette Duclaire à se séparer en décembre 2020 des membres de sa famille avec qui elle vivait et de deux jeunes garçons qu’elle élevait dans son foyer. Entre autres actes d’intimidation, des ordures et des sacs remplis d’excréments ont été lancés dans la cour de sa maison. Les proches ont indiqué qu’ils n’avaient pas signalé officiellement ces menaces, mais qu’Antoinette Duclaire les avait évoquées publiquement dans les médias. En février 2021, des inconnus armés ont ouvert le feu sur la maison d’Antoinette Duclaire ; personne n’a été blessé, mais les projectiles ont traversé les portes et touché des murs et des objets. Un juge d’instruction a ouvert une procédure sur cette fusillade.

Antoinette Duclaire ne s’est pas laissé intimider et n’a pas hésité à utiliser des interviews dans les médias pour appeler la population à ne pas céder à la peur. « Chaque jour, vous affrontez la mort, vous sortez et vous ne savez pas si vous allez rentrer chez vous, ils peuvent vous assassiner, vous kidnapper, etc. Donc, pour moi, vivre cette réalité et avoir peur de parler est incohérent », avait-elle déclaré lors d’une interview télévisée.

Diego Charles avait également reçu des menaces ces derniers mois, notamment des appels provenant de numéros anonymes, selon des membres de son entourage qui ont lié ces menaces à son activité de journaliste. Il n’avait pas évoqué ces menaces publiquement.

Le frère d’Antoinette Duclaire, Frede Duclaire, a signalé que la famille continuait à recevoir des menaces, par exemple des appels téléphoniques au cours desquels on leur avait dit : « le pire est à venir ». Des inconnus armés à moto sont venus devant les domiciles respectifs d’Antoinette Duclaire et de Diego Charles le lendemain de leur assassinat et ont tiré en l’air, ce qui, pour les voisins et les membres de la famille, était une tentative manifeste d’intimidation à l’égard des proches et des témoins potentiels.

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