Écrire Quatre hommes victimes d’une disparition forcée risquent d’être exécutés en secret

Les dissidents kurdes iraniens Pejman Fatehi, Vafa Azarbar, Mohammad (Hazhir) Faramarzi et Mohsen Mazloum, risquent d’être exécutés sous peu en secret, sans que leurs familles ni leurs avocats n’en soient informés, tandis qu’ils sont soumis à des disparitions forcées, un crime qui relève du droit international, depuis juillet 2022.

Dans un contexte de frénésie effrayante d’exécutions à travers l’Iran, les condamnations à mort de ces hommes, prononcées à l’issue d’un procès secret manifestement inique, ont été confirmées par la Cour suprême le 2 janvier 2024 et transmises aux autorités chargées de leur application.

Au cours des 18 derniers mois, les familles et l’avocat indépendant de Pejman Fatehi, Vafa Azarbar, Mohammad (Hazhir) Faramarzi et Mohsen Mazloum se sont enquis du sort réservé aux quatre hommes auprès des centres de détention, des tribunaux et des bureaux du ministère du Renseignement à Orumiyeh, Mahabad, Sanandaj, Ispahan et Téhéran. Les autorités refusent de leur fournir la moindre information et soumettent les proches angoissés à la détention arbitraire, la torture et les mauvais traitements – ils ont notamment été roués de coups, injuriés et menacés d’enlèvement, de mort, de torture et autres préjudices s’ils s’entêtaient à s’exprimer.

Le 25 juillet 2023, autour de l’anniversaire de leur arrestation, des agents du ministère du Renseignement ont arrêté le frère de Mohsen Mazloum, Omid Mazloum, près de Mahabad, dans la province de l’Azerbaïdjan occidental, et l’ont maintenu en détention arbitraire pendant 40 jours. Lors des interrogatoires, les agents l’ont soumis à la torture et aux mauvais traitements, l’ont roué de coups et ont menacé de s’en prendre à lui et à des membres de sa famille s’ils continuaient de chercher à savoir ce qu’il était advenu des quatre hommes. À peu près au même moment, des agents du ministère du Renseignement ont convoqué le frère et le père de Vafa Azarbar pour interrogatoire dans leurs bureaux d’Orumiyeh et de Boukan, respectivement, et les ont menacés pour qu’ils se taisent.

Au printemps 2023, des agents ont dit à la sœur de Mohammad (Hazhir) Faramarzi qu’elle ne devait plus chercher à obtenir des informations à son sujet, car « son exécution est imminente. Nous vous dirons quand il faudra venir récupérer son corps. » Après les appels lancés par les mères de Pejman Fatehi, Mohammad (Hazhir) Faramarzi et Mohsen Mazloum, des enregistrements vidéo ayant commencé à circuler en ligne en janvier 2023 demandant aux autorités de les laisser voir leurs fils, des agents du ministère du Renseignement ont convoqué des membres de la famille afin de les soumettre à des interrogatoires et les ont menacés d’emprisonnement pour avoir continué à poser des questions sur ce qu’il était advenu des quatre hommes.

Après la diffusion de la vidéo, des agents du ministère du Renseignement à Sanandaj, dans la province du Kurdistan, ont détenu arbitrairement la mère de Pejman Fatehi pendant plusieurs heures, l’ont frappée pour avoir « élevé un tel fils » et ont menacé de l’incarcérer, tout comme des membres sa famille.

À plusieurs reprises, des représentants de l’État ont nié avoir connaissance des quatre hommes, même lorsque les vidéos de leurs « aveux » forcés ont été diffusés à la télévision d’État. La première fois que les familles de ces hommes ont eu de leurs nouvelles après leur arrestation en juillet 2022, remonte au 12 octobre 2022, lorsque leurs « aveux » forcés ont été diffusés. Dans une lettre ouverte à Javaid Rehman, rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Iran, les familles ont déclaré que les visages des quatre hommes leur semblaient « affaiblis, fatigués et torturés » dans la vidéo de leurs « aveux » forcés.

Dans une déclaration antérieure rendue publique par les médias d’État le 23 juillet 2022, le ministère du Renseignement annonçait l’arrestation de quatre individus non identifiés en relation avec des « activités terroristes », et les familles des quatre hommes ont présumé qu’il s’agissait d’eux compte tenu des dates et de la nature des accusations. En réaction, Komala, un groupe d’opposition kurde, a fait une déclaration le 27 juillet 2022 afin de « nier avec véhémence les accusations erronées et sans fondement » contre ses membres, et a noté que les quatre hommes ont été arrêtés alors qu’ils prenaient part à des activités politiques et au sein d’organisations.

Certains partis kurdes d’opposition, dont Komala, ont des branches armées distinctes basées hors d’Iran, qui se livrent à des confrontations armées avec les autorités étatiques à l’intérieur du pays. Les autorités iraniennes ciblent régulièrement des membres de la minorité kurde iranienne, au moyen d’arrestations et de détentions arbitraires fondées uniquement sur leur soutien avéré ou présumé ou leur affiliation à des partis kurdes, et apportent rarement des preuves suffisantes étayant leur implication directe ou indirecte dans des infractions reconnues par le droit international. Le droit à la liberté d’expression inclut le droit de critiquer le régime social et politique mis en place par les autorités et le droit de prôner pacifiquement toute idée ou vision politique, tant qu’elle ne prône pas la haine constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence.

Les autorités iraniennes se livrent depuis quelques temps à une nouvelle frénésie d’exécutions : elles ont ôté la vie à pas moins de 115 personnes au cours du seul mois de novembre 2023, soit quasiment le double par rapport au mois de novembre 2022. Cette forte augmentation a pour toile de fond l’intensification du recours à la peine de mort comme instrument de répression politique, notamment contre des manifestant·e·s, des opposant·e·s et des membres de minorités ethniques opprimées, en particulier les Kurdes et les Baloutches, touchés de manière disproportionnée par les condamnations à mort.

Les autorités utilisent ce châtiment cruel et inhumain pour tourmenter et terroriser la population iranienne afin d’imposer le silence et la soumission par la force brute. Depuis longtemps, les autorités iraniennes procèdent à des exécutions secrètes de membres de groupes ethniques minoritaires et refusent de révéler ce qui leur est arrivé ou le lieu où ils sont inhumés, pendant des années. La souffrance infligée aux familles du fait de cette incertitude prolongée bafoue l’interdiction absolue de la torture et des mauvais traitements.

Amnesty International s’oppose catégoriquement à la peine capitale, en toutes circonstances. La peine capitale est une violation du droit à la vie tel qu’il est proclamé par la Déclaration universelle des droits de l’homme et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit.

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