Écrire Un homme risque fort d’être exécuté en relation avec les manifestations

Reza (Gholamreza) Rasaei, Kurde iranien, risque d’être exécuté d’un moment à l’autre en relation avec les manifestations qui se sont déroulées à travers l’Iran de septembre à décembre 2022.

Le 16 décembre 2023, la 17e chambre de la Cour suprême a confirmé sa déclaration de culpabilité et sa condamnation à mort pour « meurtre », prononcées par un tribunal pénal au terme d’un procès manifestement inique durant lequel ses « aveux » obtenus sous la torture ont été retenus à titre de « preuve ».

Le 31 décembre, sa sentence a été transmise aux autorités chargées de son application, tandis que le pays connaît une augmentation alarmante du nombre d’exécutions.

Entre septembre et décembre 2022, l’Iran a été le théâtre d’un soulèvement populaire sans précédent contre le régime de la République islamique, déclenché par la mort en détention de Jina/Mahsa Amini le 16 septembre 2022, quelques jours après son arrestation arbitraire par la « police des mœurs » iranienne. Les autorités ont fréquemment et illégalement utilisé des munitions réelles, des projectiles en métal et du gaz lacrymogène, et ont roué de coups des manifestant·e·s.

Des centaines de manifestant·e·s et de passant·e·s, dont des dizaines de mineur·e·s, ont été tués illégalement par les forces de sécurité. Des milliers d’autres personnes ont été blessées, mais beaucoup ont renoncé aux soins médicaux par peur d’être arrêtées. Plus de la moitié des personnes tuées appartenaient à la minorité baloutche opprimée de la province du Sistan-et-Baloutchistan ou à la minorité kurde opprimée des provinces du Kurdistan, de Kermanchah et de l’Azerbaïdjan occidental. À partir de début novembre 2022, des organisations de défense des droits humains des Kurdes ont fait état d’une « atmosphère très sécuritaire » dans la province de Kermanchah, marquée par une large présence des forces de sécurité. Cette situation était révélatrice du renforcement de la répression par les autorités à l’approche des manifestations prévues du 15 au 19 novembre 2022 pour commémorer les massacres commis lors de manifestations en novembre 2019.

À ce jour, les autorités ont exécuté arbitrairement huit personnes en relation avec les manifestations de 2022, à l’issue de procès iniques entachés d’allégations de torture. Le 23 novembre 2023, les autorités ont exécuté Milad Zohrevand, 10 jours après que la Cour suprême a confirmé sa condamnation à mort pour « meurtre », en relation avec la mort d’un membre des pasdaran (gardiens de la révolution) durant les manifestations. Selon des militant·e·s en faveur des droits humains actifs hors d’Iran, après son arrestation en relation avec une manifestation à Malayer, dans la province de Hamadan, il n’a pas été autorisé à s’entretenir avec un avocat.

La torture est une violation du droit international, qui en interdit l’usage en toutes circonstances. Une déclaration obtenue au moyen de la torture, de mauvais traitements ou de toute autre forme de contrainte ne peut être retenue à titre de preuve dans une procédure pénale, si ce n’est contre les auteurs présumés de tels actes. Étant donné le caractère irréversible de la peine de mort, les procès de personnes passibles de ce châtiment doivent respecter scrupuleusement toutes les normes internationales garantissant le droit à un procès équitable.

Toute personne arrêtée ou détenue parce qu’elle est soupçonnée d’une infraction pénale doit être traitée dans le plein respect des obligations de l’Iran en matière de droits humains, notamment des droits constitutifs du droit à un procès équitable. Il s’agit notamment du droit de choisir son avocat, de bénéficier des services d’un avocat dès l’arrestation, pendant la phase précédant le procès et pendant le procès, d’être présenté dans les meilleurs délais à un magistrat relevant de la justice civile ordinaire, de contester la légalité de la détention devant un tribunal indépendant et impartial, d’être présumé innocent, de garder le silence et de ne pas être forcé de témoigner contre soi-même ou de s’avouer coupable, d’avoir pleinement accès aux éléments de preuve pertinents, de ne pas être détenu sur la base d’accusations formulées en termes vagues, d’interroger les témoins à charge et d’obtenir l’interrogatoire des témoins à décharge, d’être entendu équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, et d’avoir un jugement argumenté prononcé publiquement.

Amnesty International recueille sans cesse des informations faisant état de violations systématiques du droit à un procès équitable en Iran dès l’arrestation et tout au long de l’enquête, du procès et de la procédure d’appel. Les tribunaux, en règle générale, ne font aucun cas des allégations de torture et d’autres mauvais traitements, sur lesquelles ils n’ordonnent pas d’enquête, et s’appuient sur des « aveux » extorqués sous la torture pour prononcer des déclarations de culpabilité et des peines, y compris dans les affaires pouvant aboutir à une sentence capitale. En vertu du droit international, l’imposition de la peine de mort à l’issue d’un procès inique constitue une privation arbitraire du droit à la vie.

En Iran, les minorités ethniques et religieuses sont victimes de discriminations en droit et dans la pratique. Les autorités limitent l’accès des minorités ethniques à l’éducation, à l’emploi et aux fonctions politiques. Les minorités religieuses, parmi lesquelles les yarsans, font également l’objet de discriminations en droit et dans la pratique, notamment en matière d’éducation, d’emploi, d’adoption et d’accès aux fonctions politiques et aux lieux de culte.

Les autorités iraniennes se livrent depuis quelques temps à une nouvelle frénésie d’exécutions : elles ont ôté la vie à pas moins de 115 personnes au cours du seul mois de novembre 2023, soit quasiment le double du mois de novembre 2022. Cette forte augmentation a pour toile de fond l’intensification du recours des autorités iraniennes à la peine de mort comme instrument de répression politique, notamment contre des manifestant·e·s, des opposant·e·s et des membres de minorités ethniques opprimées.

Par exemple, le 2 janvier 2024, les autorités ont exécuté arbitrairement Davoud Abdollahi, Kurde iranien, condamné à mort pour « corruption sur terre » à l’issue d’un procès manifestement inique et entaché par la torture. Les autorités utilisent ce châtiment cruel et inhumain pour tourmenter et terroriser la population iranienne afin d’imposer le silence et la soumission par la force.

Amnesty International s’oppose catégoriquement à la peine de mort, en toutes circonstances. La peine capitale est une violation du droit à la vie et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. Amnesty International ne cesse d’appeler tous les pays où elle est encore en vigueur, y compris l’Iran, à instaurer un moratoire officiel sur les exécutions, en vue de l’abolition totale de la peine de mort.

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