Écrire Un prisonnier d’opinion palestinien va être jugé

Munther Amira, défenseur palestinien des droits humains, doit comparaître devant un tribunal militaire israélien pour avoir participé pacifiquement à des manifestations. Il encourt une peine d’emprisonnement pour avoir exercé son droit à la liberté d’expression et de réunion. Son procès doit s’ouvrir le 21 février.

Munther Amira a été arrêté par des soldats israéliens le 27 décembre 2017, alors qu’il participait pacifiquement à une manifestation. Celle-ci était organisée par des habitants et militants palestiniens dans la ville de Bethléem, en Cisjordanie occupée, et appelait à la libération des militants Ahed et Nariman Tamimi. Le 16 janvier, le tribunal militaire israélien d’Ofer, en Cisjordanie occupée, a ordonné la mise en liberté sous caution de Munther Amira. Cependant, sa libération a été retardée de 72 heures afin de permettre au ministère public de faire appel. Le 18 janvier, le parquet militaire a interjeté appel de la décision de libérer Munther Amira. Le 1er février, un juge militaire de la cour d’appel militaire a accepté le recours formé par le ministère public en vue de maintenir Munther Amira en détention jusqu’à la fin de son procès.

Le jour de l’arrestation de Munther Amira, le tribunal militaire a retenu lui contre 13 chefs d’inculpation liés à sa participation à cinq manifestations distinctes. Certaines des charges retenues au titre de l’ordonnance militaire israélienne 101, telles que la « participation à une marche sans autorisation », ne sont pas des infractions reconnues par les normes internationales. Munther Amira a également été inculpé d’avoir lancé des objets sur des personnes ou des biens et d’avoir jeté des pierres sur des gardes-frontières israéliens. Ces deux chefs d’inculpation ont trait à une manifestation organisée le 22 décembre 2017 pour protester contre la décision du président américain Donald Trump de reconnaître Jérusalem en tant que capitale d’Israël. Ils sont fondés sur le témoignage de deux gardes-frontières israéliens, qui affirment avoir vu Munther Amira renvoyer un projectile de gaz lacrymogène qui avait été lancé sur les manifestants par les forces israéliennes.

Cependant, des séquences vidéo, ainsi que des témoins qui ont participé à la manifestation, contredisent ces allégations et indiquent que Munther Amira tenait pacifiquement une pancarte devant les soldats israéliens, qu’il a ensuite utilisée pour essayer de repousser la grenade lacrymogène. Un examen de l’acte d’inculpation, des déclarations des témoins et des éléments à charge montre que Munther Amira est détenu et poursuivi uniquement pour avoir protesté pacifiquement contre l’occupation israélienne.

Munther Amira, 48 ans, est un militant palestinien et défenseur des droits humains, actuellement coordonnateur du Comité de coordination de la lutte populaire (PSCC). Le PSCC se définit comme un mouvement de résistance populaire qui croit au pouvoir de la lutte populaire, sous diverses formes, comme les grèves, les manifestations pacifiques et les campagnes juridiques. Ce groupe fournit également aux militants une assistance juridique ainsi qu’un soutien en matière de communication et de sensibilisation, et cherche à encourager l’émergence de nouveaux comités et de nouvelles initiatives dans les territoires palestiniens occupés (TPO).

Munther Amira est un réfugié palestinien du village de Deir Aban, situé sur les pentes sud de Jérusalem. Il vit dans le camp de réfugiés d’Aida, près de Bethléem, où il travaille en tant qu’intervenant social et directeur du Centre communautaire pour jeunes d’Aida. Selon le PSCC, Munther Amira apporte un soutien aux agriculteurs palestiniens affectés par les colonies israéliennes au travers de ses initiatives en matière de militantisme et de sensibilisation, et assure la promotion des produits palestiniens locaux. Munther Amira est attaché au principe de la non-violence dans son combat populaire et organise régulièrement des manifestations pacifiques contre les agissements d’Israël dans la ville de Bethléem. Après son arrestation, Munther Amira a fait l’objet de 13 chefs d’inculpation liés à cinq manifestations différentes organisées à proximité du poste de contrôle du Tombeau de Rachel, à Bethléem.

La plupart de ces chefs d’inculpation ont été retenus au titre de l’ordre militaire israélien 101, qui réprime l’expression pacifique d’opinions politiques par les Palestiniens. Les chefs de l’acte d’inculpation sont les suivants : troubles à l’ordre public, pour participation à des manifestations et « marches non autorisées » qui ont eu lieu les 1er novembre, 13 décembre, 22 décembre, 23 décembre et 27 décembre 2017, entrave à l’exercice des fonctions d’un soldat le 27 décembre 2017 et jet d’un objet incendiaire et de pierres en direction de soldats israéliens le 22 décembre 2017. Toutes les charges de l’acte d’inculpation sont strictement liées à la participation de Munther Amira à des marches et au rôle qu’il a joué à leur tête, à l’exception de celles du 22 décembre 2017.

L’inculpation de Munther Amira pour jet de pierres est fondée sur le témoignage d’un seul des agents évoqués ci-dessus. En revanche, selon son avocat, le second agent dément formellement avoir vu Munther Amira lancer des pierres. L’avocat a également indiqué que l’accusation n’avait fourni aucune preuve matérielle à l’appui du témoignage du soldat. De plus, l’affirmation selon laquelle Munther Amira a lancé un objet incendiaire sur la police israélienne aux frontières est fondée sur les déclarations de deux gardes-frontières israéliens. Selon le PSCC, les deux agents affirment dans leurs déclarations connaître Munther Amira depuis des événements antérieurs, et l’avoir vu ramasser le projectile au sol d’une main et le renvoyer vers les forces israéliennes. Cependant, l’accusation a fourni comme preuve une photo trouvée sur Facebook, qui n’a pas de traçabilité et est donc irrecevable devant les tribunaux.

De plus, des séquences vidéo de la manifestation du 22 décembre 2017 (https://www.facebook.com/MohammadAazza/videos/1632948863428537/) semblent montrer Munther Amira repousser une cartouche de gaz lacrymogène au moyen d’une pancarte. Selon quatre témoins qui ont également pris part à la manifestation du 22 décembre, Munther Amira manifestait pacifiquement. Ils ont indiqué qu’il n’avait pas lancé de pierres et avait simplement tenté d’éloigner le projectile de gaz lacrymogène au moyen de la pancarte qu’il tenait.

Les défenseurs des droits humains dans les TPO sont depuis longtemps la cible de campagnes israéliennes de diffamation et de harcèlement destinées à discréditer leur combat. Selon le PSCC, les forces israéliennes avaient fait pression sur Munther Amira pour qu’il arrête de militer, et l’avaient menacé de violences et d’arrestation trois mois avant son placement en détention. Le PSCC pense que l’arrestation de Munther Amira vise à réduire au silence les personnes qui font entendre leur voix dans le cadre de la lutte populaire non violente en faveur des droits des Palestiniens.

L’ordonnance militaire israélienne 101 réglemente l’exercice du droit des Palestiniens de Cisjordanie de manifester et de s’exprimer librement. Elle interdit à tous les groupes d’au moins 10 personnes de se rassembler « à des fins politiques ou dans un but qui pourrait être considéré comme politique », à moins qu’ils n’obtiennent une autorisation du commandement de l’armée israélienne de la zone concernée. Tout contrevenant encourt jusqu’à 10 ans d’emprisonnement et/ou une forte amende.

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