Le Congrès mexicain risque d’adopter, dans les semaines à venir, une modification de la Constitution qui obligerait les juges à ordonner un placement en détention provisoire pour un large éventail d’infractions. Contrairement au droit international, le nouveau texte ne permet pas aux juges de renoncer à appliquer cette disposition ni d’étudier les éléments de preuve disponibles avant de déterminer si une telle privation de liberté est nécessaire.
Le 6 décembre, le Sénat mexicain a adopté une proposition de modification de l’article 19 de la Constitution qui prévoit d’allonger la liste des infractions pour lesquelles les juges seraient obligés d’ordonner un placement en détention provisoire. Ce texte est désormais devant la Chambre des députés, qui l’examinera dans les prochaines semaines. S’il était adopté, des milliers de personnes seraient incarcérées chaque année dans l’attente de leur procès, ce qui bafouerait le droit international relatif aux droits humains.
Selon les chiffres officiels, 29,6 % des personnes privées de liberté au Mexique n’ont pas été condamnées. La détention provisoire est en général excessivement longue (parfois jusqu’à 10 ans) à cause de la durée des procédures pénales. Le placement obligatoire en détention provisoire enverrait des milliers de personnes derrière les barreaux sans même permettre aux juges d’examiner correctement leur cas ni d’évaluer la pertinence d’une telle mesure.
Le droit international dispose que le placement en détention provisoire ne doit pas se fonder uniquement sur le type d’infraction et ne doit être utilisé qu’à titre exceptionnel et non comme une forme de châtiment. Le placement obligatoire en détention provisoire permet d’emprisonner des personnes accusées d’une infraction même en l’absence de preuves solides, ce qui favorise les informations judiciaires défaillantes et les charges pénales sans fondement. Cela pourrait exacerber le climat d’impunité au Mexique, où près de 99 % des infractions commises demeurent impunies.