Écrire Il faut libérer des militantes en grève de la faim

Depuis le 2 juin 2022, deux femmes observent une grève de la faim pour que leur droit à la libération sous caution soit respecté. Elles sont détenues depuis le 3 mai 2022. Les autorités ont engagé des poursuites pénales contre elles et contre une autre femme, qui est en liberté sous caution mais assignée à domicile, pour avoir réalisé des sondages dans la rue.

En raison de ses engagements internationaux en matière de droits humains, l’État thaïlandais est tenu de protéger efficacement le droit à la liberté d’expression et le droit de réunion pacifique, et de limiter la durée de la détention provisoire.

Ces trois femmes doivent être libérées immédiatement et toutes les charges retenues à leur encontre doivent être abandonnées

Netiporn « Bung » Sanesangkhom et Nutthanit « Bai Por » Duangmusit sont détenues depuis le 3 mai 2022 et leurs demandes de libération sous caution ont été rejetées à maintes reprises. Depuis le 2 juin 2022, elles observent une grève de la faim pour protester contre leur détention. Tantawan « Tawan » Tuatulanon est actuellement en liberté sous caution et assignée à domicile, après avoir observé 36 jours de grève de la faim en détention quand les autorités ont annulé sa libération sous caution antérieure, le 20 avril 2022.

Le 10 mars 2022, la police a engagé des poursuites pénales contre ces trois militantes pour avoir réalisé un sondage d’opinion devant un centre commercial à Bangkok le 8 février 2022, après avoir convoqué les trois femmes à la suite de plaintes pour refus d’obtempérer aux ordres de la police, puis les a libérées sous caution. Les trois femmes et d’autres personnes avaient demandé à des passant·e·s leur point de vue sur les contrôles routiers imposés lors du déplacement des cortèges royaux.

Les policiers ont engagé des poursuites pénales contre elles au titre de l’article 112 du Code pénal relatif au crime de lèse-majesté, qui prévoit une peine de trois à 15 ans de prison pour « toute personne qui tient des propos diffamatoires, insultants ou menaçants envers le roi, la reine, le prince héritier ou le régent », et de l’article 116 du Code pénal, qui prévoit jusqu’à sept ans d’emprisonnement pour toute personne tentant « de répandre l’agitation et le mécontentement au sein de la population d’une manière susceptible de provoquer des troubles dans le pays, ou d’inciter la population à transgresser les lois nationales. » Des experts internationaux spécialisés dans les droits humains ont recommandé aux autorités thaïlandaises de modifier ou d’abroger ces lois et d’autres textes législatifs afin de se conformer aux obligations internationales de la Thaïlande en matière de droits humains.

La police avait également détenu Tantawan « Tawan » Tuatulanon entre le 5 et le 7 mars 2022, l’arrêtant alors qu’elle commentait en direct sur Facebook les mesures de circulation instituées par la police pour dégager les routes devant le siège de l’ONU à Bangkok, en prévision du passage d’un cortège royal. La militante a été libérée sous caution, à la condition de s’abstenir de mener des activités portant atteinte à la monarchie. La police a engagé des poursuites pénales à son encontre au titre de l’article 112 du Code pénal, relatif au crime de lèse-majesté, et de dispositions de la Loi relative à la cybercriminalité concernant l’importation de contenus dans des systèmes informatiques.

À la mi-mars, la police a demandé au tribunal pénal de Ratchada et au tribunal pénal du sud de Bangkok d’annuler la libération conditionnelle des trois femmes. Celles-ci ont été placées en détention provisoire - Tantawan « Tawan » Tuatulanon a été arrêtée le 20 avril, et Netiporn « Bung » Sanesangkhom et Nutthanit « Bai Por » Duangmusit le 3 mai 2022. Le 3 mai 2022, la police a affirmé que Nutthanit « Bai Por » Duangmusit et Netiporn « Bung » Sanesangkhom avaient enfreint les conditions dont leur libération était assortie en réalisant un autre sondage d’opinion, le 13 mars 2022. La police a ajouté qu’en mettant en avant ce sondage sur Facebook, elles avaient provoqué des rassemblements de nature à causer des troubles à l’ordre public, et que Tantawan « Tawan » Tuatulanon poursuivrait probablement ses activités militantes si elle n’était pas placée en détention. Les autorités ont rejeté à maintes reprises les demandes de libération sous caution déposées par les trois femmes, acceptant uniquement d’accorder à Tantawan « Tawan » Tuatulanon une mise en liberté de 30 jours assortie d’une assignation à domicile après la dégradation de sa santé en raison d’une grève de la faim.

Les autorités thaïlandaises mènent une répression de grande ampleur contre les manifestations pacifiques et le débat en ligne depuis le mois de juillet 2020, au cours duquel ont débuté des manifestations, très majoritairements pacifiques, en faveur de la démocratie. Le pouvoir utilise des dispositions législatives formulées de façon vague - sur la sécurité, la monarchie et la cybercriminalité - comme instruments de répression et traite l’exercice pacifique des droits humains comme une menace pour la sécurité ou l’ordre public, ou une atteinte à la monarchie, engageant contre des militantes et militants des poursuites pénales qui peuvent aboutir à des peines allant jusqu’à la réclusion à perpétuité.

Des manifestant·e·s de premier plan se voient également soumettre pendant des mois à une détention provisoire arbitraire, qui porte souvent atteinte à leurs droits à l’éducation et à l’accès à des moyens de subsistance. Les conditions de mise en liberté sous caution qui leur sont imposées, de plus en plus strictes, limitent fortement leurs droits fondamentaux à la liberté de mouvement, d’expression et de réunion pacifique – il leur faut, par exemple, rester à leur domicile jusqu’à 24 heures sur 24, sauf pour recevoir des soins médicaux à l’extérieur, et porter un bracelet électronique en permanence.

En 2022, les autorités thaïlandaises ont engagé des poursuites pénales contre des manifestant·e·s pour leurs activités militantes publiques pacifiques. Le pouvoir continue à intensifier le harcèlement judiciaire à l’égard des personnes, y compris mineures, qui mènent des activités perçues comme des actes de dissidence publique, renforce les mesures destinées à réprimer l’expression publique d’opinions et les manifestations pacifiques, et impose des restrictions excessives au droit de manifester pacifiquement et à la liberté d’expression.

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