Droit à la liberté d’expression et à la culture, des mots qui sonnent faux en Iran

Des artistes, tu en as déjà vu dans la presse, à la TV, au cinéma, dans des concerts et autres. Toi-même tu joues peut-être d’un instrument, tu chantes et tu danses librement sans te poser de questions. En Iran, la situation n’est pas du tout la même et nombreux sont les artistes, jeunes et moins jeunes comme les chanteurs, les musiciens ou encore les cinéastes qui ne peuvent pas exercer leur talent en toute tranquillité.

Être artiste en Iran

Carte de l’Iran
Source : Wikipédia l’encyclopédie libre

Carte de l’Iran. Source : Wikipédia, l’encyclopédie libre

Être un artiste, c’est pouvoir laisser libre cours à son imagination et à sa créativité mais quand le pays dans lequel on vit pratique la censure, le droit à la liberté d’expression n’est plus du tout respecté. C’est dire qu’il est difficile pour un artiste qui est soumis à toutes sortes de lois strictes et de règlements sévères, de continuer à créer ouvertement. En effet, les procédures pour obtenir les autorisations nécessaires en vue de mener à bien un projet créatif aboutissent souvent à l’échec le plus total. Le cas contraire, le projet initial a subi tellement de changements, que le message que l’artiste voulait faire passer au travers de son œuvre a été déformé voir supprimé.

Que peut encourir un artiste en Iran ?

Depuis l’arrivée au pouvoir du président conservateur Mahmoud Ahmadinejad en 2003, mise à part l’art religieux, toute autre forme de création artistique est interdite en Iran sous peine de représailles.

Président iranien Mahmoud Ahmadinejad
Source : Wikipédia, l’encyclopédie libre

Les sanctions quelles sont-elles ?

 Des peines de prison
 L’obligation de rester sur le territoire iranien
 Des intimidations
 Des pressions physiques et morales
 Des agressions violentes
 L’exil
 L’obligation de céder le droit d’auteur de l’œuvre ce qui fait qu’elle n’appartient plus à l’artiste et qu’il n’a donc plus aucun pouvoir sur elle

Président iranien Mahmoud Ahmadinejad. Source : Wikipédia, l’encyclopédie libre

D’où vient cette censure ?

Si censure il y a, c’est parce que certains sujets sont encore très tabous en Iran et qu’il est donc interdit d’en parler. Cela concerne surtout des thèmes liés aux relations intimes et qui dénoncent les conditions sociales et politiques du pays et malheur à celui qui tenterait de s’en prendre aux administrations civiles et militaires de l’Etat. Cette pression que l’on fait subir aux artistes a ainsi modifié leur manière de faire et de voir des œuvres artistiques puisque tout est sans cesse remis en question.

Que reste t’il comme possibilités aux artistes ?

Les artistes n’ont donc souvent pas d’autres choix que de s’exiler s’ils veulent donner une chance à leurs œuvres de continuer à vivre. Leur art survit alors à l’étranger mais en contrepartie, les artistes sont sans repères, perdus et seuls puisqu’ils ont dû quitter leur pays d’origine et leur culture traditionnelle avec toutes les valeurs et les normes que cela implique. Au final, soit ce sont leurs œuvres qui en pâtissent ou bien c’est leur personne. Tu auras donc compris qu’il ne reste pas beaucoup de possibilités à ces artistes de pouvoir s’exprimer comme ils en ont envie puisque le gouvernement et les représentants religieux les en empêchent.

Zoom sur la situation actuelle des artistes iraniens

Si on en a pu arriver à une telle situation en Iran, c’est parce que le pays est soumis à un ordre moral religieux très strict. Néanmoins, depuis toujours, l’art est une composante essentielle dans toute société car il permet aux gens de s’épanouir, de faire véhiculer des messages et d’y trouver refuge quand les choses tournent mal. C’est d’ailleurs pour cette raison que les artistes iraniens ont décidé de revendiquer leur droit à l’expression et à la culture et continuent dès lors à exercer leur passion dans la clandestinité dans des endroits réaménagés à cet effet avec le peu de moyens qu’ils ont à leur disposition. Qui plus est, en Iran, on n’achète pas une guitare ou un CD facilement et aux quatre coins de la rue. Or de question d’ailleurs d’écouter du rap, du rock ou du RNB que ce soit chez soi ou dans des lieux publics.

Quand les artistes se révoltent

Quand Mahmoud Ahmadinejad a de nouveau été élu pour un nouveau mandat en juin dernier, une véritable révolte s’est mise en place par la population en Iran car le président aurait accédé au pouvoir de manière frauduleuse. De nombreux jeunes artistes (la population iranienne est en effet composée à 60% de gens de moins de 30 ans) ont pris part à ces émeutes pour dénoncer la corruption et les mensonges du régime totalitaire islamiste d’Ahmadinejad. Cette révolution qui continue toujours aujourd’hui, est aussi une façon pour les jeunes de crier leur indignation face à ce système islamiste et religieux corrompu qui a malmené la population pendant près de trente ans.

L’art, une arme puissante de dénonciation

C’est ici que l’art a joué un rôle important en devenant une arme politique de contestation populaire et donc de résistance. Bien que de nombreuses formes d’art sont condamnables en Iran, le succès de nombreux artistes iraniens est pourtant bel et bien présent. Ce succès traduit le fait que des messages sont bel et bien véhiculés dans le pays et que les Iraniens y sont réceptifs. Toutefois, il est vrai qu’un art qui ne peut pas prendre forme et qui ne peut s’exposer aux yeux du monde, fini malheureusement par mourir.

Chats persans, le film

Les images ont parfois plus de sens que les mots, c’est pourquoi on t’invite à regarder le film de Bahman Ghobadi, Chats persans .

Le film raconte l’histoire de cinq adolescents iraniens qui ont dû quitter le pays pour l’Angleterre afin de pouvoir continuer à produire de la musique rock en toute liberté. C’est au travers de ce film que tu pourras vivre de près les difficultés auxquelles les artistes sont confrontés en Iran et ce sera aussi une manière de soutenir leur cause et de revendiquer leur droit à la culture et à la liberté d’expression.

Le réalisateur Bahman Ghobadi
Source : Wikipédia, l’encyclopédie libre

Interview du réalisateur Bahman Ghobadi qui nous parle de la situation des réalisateurs en Iran. À lire et à relire !

Source de l’interview de Bahman Ghobadi : Tiré du Télé Moustique du 27 janvier 2010 , numéro 4383 dans la rubrique actualité international. Interview de Pascal Stevens : Pour les créateurs, c’est l’humiliation permanente.

« Pour les créateurs, c’est l’humiliation permanente »

Votre film vous a coûté cher, l’exil forcé…

Effectivement. À mon retour du festival de Cannes, j’ai été emprisonné pendant une semaine. Les autorités ont fait pression sur moi pour que j’abandonne les droits de mon film, que je le renie. Je l’avais tourné sans autorisation. Pour tourner en Iran, il faut continuellement mentir, tricher sur ses intentions, sinon c’est le refus assuré. Avec ce film, j’ai sauté le pas et tourné sans rien quémander auprès des administrations. Et sans m’autocensurer. Ce tournage a réellement délivré mon âme. Même s’il m’a aussi obligé à m’expatrier. Quand la nouvelle de mon emprisonnement a été divulguée à l’étranger, j’ai pu sortir de prison à la condition expresse de ne plus jamais revenir. On m’a donc mis à la porte de mon pays. De toute façon, il fallait partir : la pression était si forte que j’ai frôlé la crise cardiaque. Une fois, j’ai même pensé au suicide.

Tourner à Téhéran sans autorisation a dû relever du vrai casse-tête !

Oui, on a tourné avec plusieurs mobylettes, à la sauvette. Deux fois, nous avons été contrôlés et j’ai présenté les autorisations accordées à un ami cinéaste. J’ai dû prétexter un tournage sur un autre sujet. Heureusement pour toute l’équipe, la police n’y a vu que du feu !

Les cinéastes et musiciens qui veulent œuvrer librement en Iran le font-ils toujours dans la clandestinité ?

Je crois que depuis la projection de mon film à Cannes, les musiciens ont accru, un peu, leur visibilité, même si le rock reste un phénomène underground (sous terrain, dans le sens où les artistes doivent se cacher pour exercer leur art) en Iran. Par contre, c’est devenu plus insidieux pour le cinéma.
Ces derniers mois, de nouvelles lois ont été votées qui obligent les techniciens, preneurs de son, cadreurs, etc. à obtenir une autorisation pour participer à un tournage. Sinon, c’est l’emprisonnement ou les coups de fouet. Et, dorénavant, aucun film iranien ne peut participer à un festival à l’étranger sans cette fameuse autorisation.

Dans le film, les jeunes ont de bonnes motos et jouent sur des instruments convenables. Si c’est interdit, où se procurent-ils ce matériel ?

La moto qu’on voit dans le film a l’air neuve, mais elle doit avoir 10 ans ! Idem pour les instruments. Une guitare vaut dans les 200 dollars, ce n’est pas de la première qualité. Souvent, les instruments sont amenés, par un copain, de l’étranger. Et ça peut aussi transiter par la frontière irakienne. Pour les quelque 3000 groupes qui existent en Iran, ce n’est pas facile d’obtenir du matériel convenable. Encore moins en province où, contrairement à Téhéran, où il existe quelques magasins qui en vendent, les instruments comme des guitares ou des batteries sont pratiquement introuvables.

Comment définiriez-vous l’Iran aujourd’hui ?

Comme un pays malade géré par des malades. Pour les artistes, c’est l’humiliation permanente. En fait, ils font tout pour qu’on quitte le pays. Pour les musiciens, c’est la seule possibilité pour satisfaire leur passion. Dans mon film, ce n’est pas par hasard que le groupe rêve de se produire à l’étranger. La jeunesse iranienne a soif d’aventure, mais n’a pas la possibilité de s’exprimer. Comme les Chats persans, qui sont cantonnés dans les souterrains, puisqu’ils ne peuvent être vus en rue (les chats sont considérés comme impurs en Iran). C’est pour ça qu’il y a deux Téhérans : celle du dessus, où règnent la police et la corruption, et du dessous, qui se nourrit vraiment de la culture iranienne.

C’est cette population « du dessous » qui est remontée dans la rue à l’occasion des récentes émeutes ?

En tout cas, ce sont beaucoup de jeunes qui, comme dans mon film, en ont marre de la corruption, du régime et de ses mensonges. En Iran, chaque rue est surveillée par des policiers, parfois en civil. Il n’est pas difficile de détecter d’étranges allées et venues. Ce sont souvent des bassidjis (miliciens ne portant pas d’uniforme). Ils contrôlent toutes les lignes téléphoniques et font des rapports ad hoc. Ils induisent la peur. Chez nous, un diction dit de ne « même pas se fier à son propre frère ». C’est grave !

Comment soutenir tous les artistes iraniens ?

Les artistes iraniens sont bien ce qu’on appelle des prisonniers d’opinion parce qu’ils ont été condamnés pour avoir dit tout haut ce qu’ils pensaient tout bas au travers de leurs œuvres. C’est ainsi que chez Amnesty International, on se bat pour que tous les artistes iraniens jouissent de leur droit de s’exprimer en toute liberté et sans aucune atteinte à leur intégrité physique et morale.

Selon la Déclaration Universelle des Droits Humains de 1948  :

- Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (article 5).
 Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ou exilé (article 9).
 Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion.
Ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seul ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites (article 18).
 Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit (article 19).
 Toute personne a le droit de prendre part librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir des arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent. Chacun a droit à la protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute
production scientifique, littéraire ou artistique dont il est l’auteur (article 27).

Si Amnesty International soutient le respect et la mise en application de cette Déclaration Universelle des Droits Humains, c’est parce que le gouvernement iranien ne respecte pas les principes qui sont cités ci-dessus. Cela constitue donc bel et bien une infraction à l’encontre des droits et des libertés dont chaque être humain sur cette terre DOIT bénéficier.

Si tout comme chez Amnesty International, tu trouves cette situation injuste, on te propose différents moyens pour t’investir dans cette cause et ainsi faire bouger et évoluer les choses.

Voici les pistes qu’on te suggère :

 Le site Isavelives, un site qui te permet de connaître toutes les actions menées par Amnesty International. On t’invite à cliquer sur les liens suivants ;

*ACTION : Il est temps d’élever la voix

*Écris pour Ayatollah Boroujerdi , injustement emprisonné pour avoir exprimé ses convictions religieuses de manière pacifique.une action urgente pour défendre

 DROIT DE LIBERTÉ D’OPINION ET D’EXPRESSION

Alors pour que la musique, la danse, le chant et tout ce qui fait partie de la sphère artistique continue à faire partie du quotidien iranien et que chaque individu sur cette terre, en particulier les créateurs ici, puissent transposer leurs discours dans leurs œuvres, mobilisons-nous pour eux et donnons à l’art la place qu’il mérite dans la société !

Rejoins un de nos groupes-écoles actifs !

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