Pakistan - Discours de Malala Yousazai

Malala Yousafzai est originaire du district de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan. Alors qu’elle n’a que 11 ans, Malala commence à écrire un blog sous le pseudonyme « Gul Makai » pour la BBC, racontant son point de vue sur l’éducation et sa vie sous la domination des Talibans. Elle a également été interviewée par la presse. En octobre 2012, elle est victime d’une tentative d’assassinat où elle est grièvement blessée, car elle a osé exprimer son opinion. Elle est transférée au Royaume-Uni pour suivre un traitement plus poussé. En 2014, âgée de 17 ans, elle obtient le Prix Nobel de la paix, ce qui fait d’elle la plus jeune lauréate de l’histoire de ce prix. Elle est aujourd’hui réfugiée au Royaume-Uni. Voilà la retranscription de deux discours qu’elle a prononcés, l’un en 2014 (retranscription en anglais) et l’autre en 2013 (retranscription en français).

« Peace is a world of freedom of speech, freedom of expression, freedom of worship, freedom from want and freedom from fear »

Discours de Malala Yousafzai lors de la remise du prix Freedom from Fear 2014

Your Majesties, Royal Highnesses, Excellences, Honoured Laureates, members of the Roosevelt family, his excellency ’Moazzam Ahmad Khan’ – ambassador of Pakistan, dear sisters and brothers.
I am humbled to be here today.
I am thankful to these incredible honourees who are campaigning to ensure that every person is entitled to basic human rights, no matter who you are, or where you are from.
I am here today to thank you all for awarding me with the medal for freedom from fear.
My family, the people of Pakistan and I know what real fear means.
I remember how the terrorists inflicted inhuman atrocities against the people of Swat.
I remember how our schools were bombed and girls were banned from going to school.
I remember how the worshippers of God were brutally killed in mosques, churches and temples.
I remember how terrorists exploited the most vulnerable people in our society, the poor, the unemployed and the needy, and then recruited them and turned them into suicide bombers.
Dear sisters and brothers, when the Taliban struck in the valley of SWAT, they spread extreme terror throughout, slaughtering people, flogging girls, bombing schools and spreading hatred.
Hundreds and thousands of people were killed many of whom chose not to speak out because of the fear of terrorism which is worse than a traditional war. In terrorism you do not know where and when you and your family can be targeted. Death follows you constantly like a shadow.
At that time, I realised I had two options. Either to keep silent and wait to be killed or to speak out and then be killed. I chose the second one.
Dear brothers and sisters, for me peace is not only the absence of war but the absence of fear.
Peace is a world of freedom of speech, freedom of expression, freedom of worship, freedom from want and freedom from fear.
I am very happy, there are many people in this world who are there to support me and show me love and hope. There are millions of people who want peace, justice and equality.
All over the world today, as I stand here talking to you, there are children being denied their basic human right to education. We must give them courage to overcome fear, we must give them hope to step forward and we must raise up their our voices so they can be heard.
Today I raise my voice for my Nigerian sisters who are still suffering from the imprisonment of Boko Haram. I empathise with them, their parents and their communities. And I am hopeful that my sisters will come back home safely, as millions of people have raised their voice for their safe return.

Discours prononcé en 2014

« Ils pensaient que les balles allaient nous faire taire. Mais ils ont échoué. Et puis, sur ce silence se sont élevées des milliers de voix. »

Discours de Malala Yousafzai prononcé lors de l’Assemblée des Nations Unies pour la Jeunesse le 12 juillet 2013 – Il s’agit de son premier discours en public suite à l’attaque dont elle a été victime en 2012.

Au nom de Dieu, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux.
Honorable Secrétaire général, M. Ban Ki-moon,
Respecté Président de l’Assemblée générale Vuk Jeremic
Honorable émissaire de l’ONU pour l’éducation mondiale M. Gordon Brown,
Aînés respectés et mes chers frères et sœurs.

Aujourd’hui, c’est un honneur pour moi de prendre la parole à nouveau après longtemps. Être ici avec des personnes si honorables est un grand moment dans la vie.

Je ne sais pas par où commencer mon discours. Je ne sais pas ce que les gens s’attendent à ce que je dise. Mais tout d’abord, merci à Dieu, pour qui nous sommes tous égaux, et merci pour toute personne qui a prié pour mon rétablissement rapide et une nouvelle vie. Je ne peux pas croire à quel point les gens m’ont montré de l’amour. J’ai reçu des milliers de bonnes cartes de vœux et des cadeaux venant du monde entier. Merci à tous. Merci à tous les enfants dont les paroles innocentes m’ont encouragée. Merci à mes aînés dont les prières m’ont donné de la force.

Je tiens à remercier mes infirmières, les médecins et tout le personnel des hôpitaux au Pakistan et au Royaume-Uni et le gouvernement des Émirats arabes unis qui m’ont aidé à aller mieux et à récupérer mes forces. Je soutiens pleinement M. Ban Ki-moon, le Secrétaire général, dans son Initiative « Education First » et le travail de l’envoyé spécial de l’ONU, M. Gordon Brown. Et je les remercie tous les deux pour l’impulsion qu’ils continuent à apporter. Ils continuent à nous donner envie d’agir.

Chers frères et sœurs, souvenez-vous de quelque chose. Le « Malala day » n’est pas mon jour. Aujourd’hui est le jour de chaque femme, de chaque garçon et de chaque fille qui ont élevé la voix pour leurs droits. Il y a des centaines de militants des droits de l’homme et de travailleurs sociaux qui non seulement parlent en faveur des droits de l’homme, mais qui se battent pour atteindre leurs objectifs d’éducation, de paix et d’égalité. Des milliers de personnes ont été tuées par les terroristes et des millions ont été blessés. Je ne suis que l’un d’entre eux.

Donc ici, je suis… une fille parmi d’autres.
Je parle — non pour moi, mais pour toutes les filles et les garçons.
J’élève ma voix – pas pour que je puisse crier, mais pour ceux qui n’ont pas voix puissent être entendus.
Ceux qui ont lutté pour leurs droits :
Leur droit de vivre en paix.
Leur droit d’être traité avec dignité.
Leur droit à l’égalité des chances.
Leur droit à l’éducation.

Chers amis, le 9 octobre 2012, les talibans m’ont tiré sur le côté gauche de mon visage. Ils ont tiré sur mes amis aussi. Ils pensaient que les balles allaient nous faire taire. Mais ils ont échoué. Et puis, sur ce silence se sont élevées des milliers de voix. Les terroristes pensaient qu’ils pourraient nous faire changer d’objectifs et arrêter nos ambitions, mais cela n’a rien changé dans ma vie, sauf ceci : la faiblesse, la peur et le désespoir sont morts. La force, la puissance et le courage sont nés. Je suis la même Malala. Mes ambitions sont les mêmes. Mes espoirs sont les mêmes. Mes rêves sont les mêmes.

Chers frères et sœurs, je ne suis contre personne. Je ne suis pas non plus ici pour parler en termes de vengeance personnelle contre les talibans ou contre tout autre groupe de terroristes. Je suis ici pour parler du droit à l’éducation de chaque enfant. Je veux de l’éducation pour les fils et les filles de tous les extrémistes, en particulier les Talibans.

Je n’ai même pas de haine contre le Talib qui m’a tiré dessus. Même si j’avais un pistolet en main et qu’il se trouvait en face de moi, je ne lui tirerais pas dessus. C’est la compassion que j’ai apprise de Mohammed, le prophète de la miséricorde, que j’ai apprise de Jésus-Christ et de Bouddha. C’est l’héritage du changement que j’ai hérité de Martin Luther King, de Nelson Mandela et de Muhammad Ali Jinnah. C’est la philosophie de la non-violence que j’ai apprise de Gandhi Jee, de Bacha Khan et de Mère Teresa. Et c’est le pardon que mon père et la mère m’ont appris. Et c’est ce que mon âme me dit, soit pacifique et aimant pour tout le monde.

Chers frères et sœurs, c’est dans les ténèbres que nous nous rendons compte de l’importance de la lumière. Nous sommes conscients de l’importance de notre voix quand nous sommes réduits au silence. De la même manière, lorsque nous étions à Swat, dans le nord du Pakistan, nous avons réalisé l’importance des stylos et des livres quand nous avons vu les armes de guerre.

Cette parole sage est vraie : « La plume est plus puissante que l’épée ». Les extrémistes ont peur des livres et des stylos. La puissance de l’éducation leur fait peur. Ils ont peur des femmes. La puissance de la voix des femmes leur fait peur. Et c’est pourquoi ils ont tué 14 étudiants en médecine innocents dans l’attentat récent de Quetta. Et c’est pourquoi ils ont tué de nombreuses enseignantes et de personnes luttant contre la polio à Khyber Pukhtoon Khwa et les zones tribales du Pakistan. C’est pourquoi ils dynamitent chaque jour des écoles. Parce qu’ils étaient et qu’ils ont encore peur du changement, peur de l’égalité que nous apporterons dans notre société.

Je me souviens qu’il y avait un garçon dans notre école à qui un journaliste a demandé « Pourquoi est-ce que les talibans sont contre l’éducation ? » Il a répondu très simplement, en montrant son livre, il dit : « Un Talib ne sait pas ce qui est écrit dans ce livre. » Ils pensent que Dieu est une toute petite personne conservatrice qui enverrait des filles en l’enfer juste parce qu’elles sont allées à l’école. Les terroristes utilisent à mauvais escient le nom de l’Islam et de la société pachtoune pour leurs propres avantages personnels. Le Pakistan est un pays démocratique qui aime la paix. Les Pachtounes veulent l’éducation de leurs filles et de leurs fils. Et l’Islam est une religion de paix, d’humanité et de fraternité. L’Islam dit que ce n’est pas seulement le droit de chaque enfant de recevoir une éducation, il, mais que c’est leur devoir et leur responsabilité.

Monsieur le Secrétaire général, la paix est nécessaire à l’éducation. Dans de nombreuses parties du monde, en particulier au Pakistan et en Afghanistan, le terrorisme, les guerres et les conflits empêchent les enfants d’aller à l’école. Nous sommes vraiment fatigués de ces guerres. Les femmes et les enfants souffrent dans de nombreuses régions du monde à bien des égards. En Inde, des enfants innocents et pauvres sont victimes du travail des enfants. Beaucoup d’écoles ont été détruites au Nigeria. Les gens en Afghanistan ont été empêchés de vivre par l’extrémisme depuis des décennies. Les jeunes filles ont à faire du travail domestique et sont obligées de se marier à un âge précoce. La pauvreté, l’ignorance, l’injustice, le racisme et la privation des droits fondamentaux sont les principaux problèmes rencontrés par les hommes et les femmes.

Chers amis, aujourd’hui je me concentre sur les droits des femmes et l’éducation des filles parce que ce sont elles qui souffrent le plus. Il fut un temps où des femmes militantes ont demandé à des hommes de se lever pour défendre leurs droits. Mais, cette fois, nous allons le faire nous-mêmes. Je ne dis pas aux hommes d’arrêter de parler en faveur des droits des femmes, mais je me concentre sur cet objectif, que les femmes soit autonomes dans leurs propres combats.

Chers sœurs et frères, le moment pour parler est venu.
Aujourd’hui, donc, nous appelons les dirigeants du monde à changer leurs politiques stratégiques en faveur de la paix et de la prospérité.
Nous appelons les dirigeants du monde afin que tous les accords de paix protègent effectivement les droits des femmes et des enfants. Un accord qui va à l’encontre de la dignité des femmes et de leurs droits est inacceptable.
Nous appelons tous les gouvernements à garantir une éducation gratuite et obligatoire pour tous les enfants du monde entier.
Nous appelons tous les gouvernements à lutter contre le terrorisme et la violence, à protéger les enfants contre les brutalités et les dommages.
Nous appelons les pays développés à soutenir l’expansion des possibilités d’éducation pour les filles dans le monde en développement.
Nous appelons toutes les communautés à faire preuve de tolérance. À rejeter les préjugés fondés sur les castes, les croyances, les confessions, les religions ou le sexe. À garantir la liberté et l’égalité pour les femmes afin qu’elles puissent s’épanouir. Nous ne pouvons pas tout réussir si la moitié d’entre nous sont tenus en arrière.
Nous appelons nos sœurs du monde entier à être courageuses — à prendre en main la force qui est en elle-même et à réaliser leur plein potentiel.

Chers frères et sœurs, nous voulons des écoles et de l’éducation pour offrir un avenir lumineux à chaque enfant. Nous allons continuer notre voyage vers notre objectif de paix et d’éducation pour tous. Personne ne peut nous arrêter. Nous allons parler de nos droits et nous allons changer les choses par nos paroles. Nous devons croire en la puissance et la force de nos mots. Nos mots peuvent changer le monde.
Parce que nous sommes tous ensemble, unis pour la cause de l’éducation. Et si nous voulons atteindre notre objectif, alors nous nous laisserons renforcer par cette arme qu’est le savoir et nous nous laisserons protéger par l’unité et la solidarité.

Chers frères et sœurs, nous ne devons pas oublier que des millions de personnes souffrent de la pauvreté, de l’injustice et de l’ignorance. Nous ne devons pas oublier que des millions d’enfants ne vont pas à l’école. Nous ne devons pas oublier que nos frères et sœurs sont en attente d’un avenir pacifique et lumineux.

Alors, laissez-nous mener une lutte globale contre l’analphabétisme, la pauvreté et le terrorisme et nous prendrons en main nos livres et nos stylos. Ce sont nos armes les plus puissantes.

Un enfant, un enseignant, un stylo et un livre peuvent changer le monde.

L’éducation est la seule solution. Education First.

Discours prononcé en 2013

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