« J’ai été emprisonné arbitrairement »

Chekib El Khiari a été arrêté, détenu de manière arbitraire et condamné, à la suite d’un procès inéquitable, à trois ans de prison et une lourde amende.

Ce sont ses déclarations faites à la télévision nationale marocaine, en 2009, visant à dénoncer l’implication de hauts responsables de l’appareil d’État dans des affaires de trafic de drogue et de corruption qui sont à l’origine de son arrestation et de son emprisonnement. Voici son témoignage.

« J’ai été arrêté le 17 février 2009, accusé de “représenter une menace pour les institutions publiques et de les dénigrer”, puis jeté en prison. Des mois plus tard, on m’a également accusé d’avoir “enfreint la législation sur les devises”. J’ai été condamné à trois ans d’emprisonnement et à une amende de près de 75 000 euros.

Les différents stades des poursuites et du procès ont constitué une violation flagrante du droit, cela a été reconnu, de ma détention arbitraire à ma convocation à la maison de mes parents pour pouvoir la perquisitionner sans mandat, en passant par ma garde à vue prolongée à l’excès et par la falsification des éléments de preuve ou encore toutes les irrégularités dont ont été entachés mes procès en première instance et en appel.

La plus grossière : le tribunal a forgé de toutes pièces un communiqué de presse [document court envoyé aux journalistes] qu’il m’a attribué et qu’il a utilisé à ma charge. En dépit de sa condamnation, le juge a écrit noir sur blanc dans les attendus de son jugement : “le législateur marocain n’a pas défini les institutions publiques”. J’ai donc été condamné pour un chef d’inculpation dénué de sens et qui a été formulé pour restreindre la liberté d’expression et opprimer les défenseurs des droits humains et les journalistes.

J’ai été arrêté parce que j’ai diffusé, sur des plateformes marocaines et internationales et dans le respect des pratiques en matière de droits humains reconnues à l’échelle internationale, des communiqués de presse sur l’implication des forces de sécurité dans des réseaux internationaux de trafic de drogue et sur l’infiltration du Parlement par des barons de la drogue manœuvrant pour inciter les politiciens à soutenir leur commerce illégal. Après la diffusion de ces communiqués, des dizaines de membres des forces de sécurité ont été arrêtés, y compris de hauts gradés de l’armée, avant que je ne me retrouve moi-même en prison.

Pourtant le tribunal continuait à me demander : “Avez-vous des preuves de l’implication de certains éléments des forces de sécurité dans le trafic de drogue international ?” Et je répondais en vain : “Vous en avez déjà arrêté des dizaines un mois avant de m’arrêter, et maintenant vous m’envoyez en prison avec eux”. En outre, mon avocat a présenté aux juges des communiqués émis par des représentants de partis politiques faisant partie du gouvernement qui confirmaient l’infiltration du monde politique par des barons de la drogue ; l’un d’eux a même déclaré publiquement sur la deuxième chaîne marocaine que près d’un tiers des parlementaires marocains étaient des barons de la drogue, mais le tribunal n’y a prêté aucune attention et j’ai été condamné.

Amnesty a été la première organisation de défense des droits humains à prendre contact avec mon frère. Elle l’a fait dès le deuxième jour de ma détention et, le quatrième jour, elle a publié un rapport sur mon cas dans lequel elle demandait à l’État de me libérer immédiatement et sans condition.

Ce qu’Amnesty a fait pour moi n’a pas été vain, car j’ai été libéré quatre mois après le début du “marathon des lettres” lancé à l’occasion de la déclaration d’un État sur l’annulation de 190 affaires concernant des décisions de justice arbitraires, sans fondement légal. Un an avant cela, sous la pression de mouvements internationaux, des démarches avec lesquelles je n’étais pas d’accord parce qu’elles visaient à m’humilier et évitaient à l’État de reconnaître la grave violation qu’il avait commise, avaient été entreprises pour me faire libérer. »

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