Le cas de l’avortement

L’avortement en faits et en chiffes (Source : ONU)

Une femme meurt toutes les sept minutes des suites d’un avortement à risque (2009).

25 % de la population mondiale vit dans des pays où la législation concernant l’avortement est très restrictive (2013).

Quatre pays interdisent l’avortement sans aucune exception à savoir le le Salvador, le Nicaragua, Malte et le Saint-Siège au Vatican.

Chaque État devrait permettre aux femmes et filles de contrôler leur maternité sans craindre de discrimination, de mesure coercitive ou d’acte de violence. Aujourd’hui, elles sont pourtant limitées dans leurs choix et sont considérées comme des « citoyennes de seconde zone ». L’avortement, dans certains cas, représente un enjeu crucial dans la détermination de ces choix.

© Pete Muller

Qu’est-ce que l’avortement ?

Un avortement est une interruption prématurée de grossesse. Différents types d’interruption existent : une fausse couche est une interruption spontanée ; un avortement provoqué est une interruption provoquée par une intervention humaine, par voie chimique ou chirurgicale ; un avortement thérapeutique est une interruption pratiquée pour des raisons médicales ; une interruption volontaire de grossesse (IVG) se fait pour des raisons non médicales ; un avortement clandestin est une interruption pratiquée en dehors de tout contrôle médical et des conditions fixées par la loi.

L’avortement est parfois nécessaire afin d’assurer la « santé reproductive » : c’ est un concept développé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui suppose que les femmes puissent jouir pleinement de leur droit à la vie, à la santé et à l’autodétermination en matière de sexualité, de grossesse et de maternité.

Que dit le droit international ?

Il n’existe pas de législation internationale sur l’avortement. Il appartient donc à chaque pays de résoudre la question conformément à sa propre législation et à sa pratique. Seul le Protocole de Maputo de 2003 (protocole régional réunissant 15 pays africains) stipule formellement que les femmes ont le droit de contrôler leur fertilité et que les États parties doivent protéger leurs droits reproductifs en autorisant l’avortement médicalisé, en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste et lorsque la santé physique et mentale de la mère est menacée.

Quelle est la position d’Amnesty ?

Amnesty ne se prononce pas pour un droit à l’avortement dans tous les cas, mais demande aux États : d’abroger les lois en vertu desquelles les femmes sont, ou peuvent être, inculpées et emprisonnées pour avoir cherché à se faire avorter ou avoir subi un avortement ; de se doter d’une réglementation sensée sur l’accès à l’avortement ; de fournir l’accès à des services médicaux appropriés à toutes les femmes présentant des complications à la suite d’un avortement, qu’il soit légal ou non ; de faire en sorte que les femmes qui se retrouvent enceintes après avoir subi des violences sexuelles, notamment l’inceste, puissent recourir à des services d’interruption de grossesse légaux et sans risques ; de faire en sorte que les femmes aient accès à des services pratiquant l’avortement légalement et sans risques lorsqu’une grossesse présente un risque pour leur vie ou un risque grave pour leur santé.

Amnesty est bien consciente que la plupart de ces recommandations se heurtent à de nombreux obstacles dans la pratique : comment prouver un viol ou un inceste ? Où commence et s’arrête le risque pour la santé d’une femme ? Qui en décide ? Comment préserver sa dignité et son anonymat ? Toutes ces questions sont des réalités auxquelles les États doivent également faire face.

Quel état des lieux dans le monde ?

En l’espace de dix-sept ans, 26 pays ont adouci leurs restrictions juridiques concernant l’avortement. Aujourd’hui, près de 97 % des pays autorisent l’avortement pour sauver la vie d’une femme. Si ces pays ne sont pas tous d’accord sur les limites médicales à imposer, ils placent tous le droit à la santé de la femme au centre de leurs préoccupations.

Plusieurs pays ont, au contraire, durci leur législation, notamment sur la question de l’avortement thérapeutique et du viol. Ces restrictions sont liées à la question du droit à la vie. Dans les pays où l’avortement est autorisé sous certaines conditions, il est reconnu tacitement que le droit à la vie du fœtus peut être restreint lorsqu’il entre en conflit avec d’autres circonstances, comme un danger pour la vie de la mère ou un viol. Les pays qui ont restreint leur législation ont souvent pris des mesures pour reconnaître le droit à la vie depuis le moment de la conception. C’est le cas du Salvador et de la République Dominicaine en 1999 et 2010. Face à ce durcissement, les taux de mortalité maternelle et de suicide chez les femmes augmentent drastiquement.

La question du viol

Certains pays qui n’autorisaient pas l’avortement en cas de viol ou d’inceste ont modifié leurs restrictions face aux recommandations d’ONG et de comités internationaux et à l’augmentation des taux d’avortements clandestins. Ils ont ainsi mis un terme à la double peine que constitue cette interdiction et offrent une chance supplémentaire à des milliers de femmes et jeunes filles de se reconstruire. 84 % des pays développés et 37 % des pays moins développés autorisent l’avortement lorsque la grossesse est le résultat d’un viol ou d’un inceste (ONU, World abortion policies in 2007)

L’avortement clandestin, un enjeu de santé publique

Une femme enceinte reçoit des conseils "clandestins" sur l’avortement dans un centre de santé au Nicaragua. (c) IPAS

Un avortement clandestin est souvent pratiqué dans des conditions insalubres par des personnes sans la formation adéquate. Il peut générer des hémorragies internes, provoquer des infections et entrainer la stérilité voire la mort. Selon l’OMS, l’avortement clandestin est l’une des causes principales de la mortalité maternelle : 70 000 femmes en meurent chaque année. Ce chiffre progresse surtout dans les pays où les législations sur l’avortement sont très restrictives : le continent africain, l’Amérique latine et l’Europe de l’Est affichent les taux les plus élevés.

Criminalisation de l’avortement, criminalisation des femmes

Dans les pays où l’avortement est pénalisé, les femmes cherchant ou ayant subi un avortement en dehors du cadre de la loi peuvent être détenues et emprisonnées. Pour Amnesty, de telles mesures sont discriminatoires, cruelles et dégradantes. Retirer sa liberté à une femme pour une raison aussi personnelle est une opposition à sa liberté de conscience et à son intégrité mentale et physique. Le personnel médical ayant donné des informations ou ayant procédé à un avortement est aussi souvent stigmatisé.

Une femme emprisonnée et condamnée à mort pour avoir eu recours à un avortement au Nigéria, (c) AI, 2003

L’avortement sélectif

L’avortement sélectif est une méthode de sélection sexuelle pratiquée dans les pays où le sexe de l’enfant est un enjeu économique crucial. À l’aide de technologies comme l’échographie, les femmes interrompent volontairement leur grossesse si le fœtus n’est pas du sexe recherché. En Asie et dans les Balkans, avoir une fille est synonyme de lourdes dépenses et vaut aux femmes d’être rejetées : elles sont souvent forcées à s’en « débarrasser ». Aujourd’hui, de plus en plus de cliniques privées pratiquent des échographies et des avortements sélectifs en toute illégalité. Ces pratiques contribuent à renforcer un déséquilibre démographique croissant entre homme et femme : selon le Programme des nations unies pour le développement (PNUD), il « manquerait » près de 100 millions de femmes dans le monde.

Le savais-tu ? Dépénalisation et légalisation

La dépénalisation de l’avortement est différente de la légalisation. Dépénaliser un acte signifie qu’il échappe à la sanction pénale, mais il reste en théorie une infraction. Lorsque l’avortement est légalisé, cela signifie que l’acte est conforme à la loi : il ne constitue plus une infraction. De nombreux États, comme la Belgique ont dépénalisé l’avortement mais ne l’ont pas légalisé.

Toutes les infos
Toutes les actions

Rejoins un de nos groupes-écoles actifs !

...

Je m’inscris
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit