Actuellement, selon les données de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) (de septembre 2023 concernant l’année 2022), près de 250 millions d’enfants et de jeunes entre 6 et 18 ans sont encore privé·e·s d’éducation à travers le monde, que ce soit à cause de facteurs sociaux, économiques, culturels, ou même de l’insécurité. Un enfant ou un·e jeune sur cinq en âge d’être scolarisé·e ne fréquente donc pas l’école.
Quelques chiffres
C’est au Pakistan et au Nigéria qu’il y a le plus grand nombre d’enfants et jeunes non scolarisé·e·s (plus de 20 millions) ainsi qu’en Éthiopie (10,5 millions) et en République démocratique du Congo (près de 6 millions).
Au niveau des régions, environ 40 % des 250 millions d’enfants et jeunes non scolarisé·e·s, soit 98 millions d’entre eux et elles, vivent en Afrique subsaharienne. L’Afrique subsaharienne est également la seule région où ce nombre augmente : les taux de non-scolarisation diminuent plus lentement que le taux de croissance de la population d’âge scolaire.
La région ayant la deuxième plus forte population non scolarisée est l’Asie centrale et du Sud, avec 85 millions d’enfants et jeunes non scolarisé·e·s (Institut de statistiques de l’UNESCO, publication de septembre 2022).
Au-delà de ces chiffres qui sont déjà interpellants, il est important de souligner que, dans bien des cas, la scolarisation n’est pas synonyme d’apprentissage. Selon des estimations de l’UNESCO (datant de 2017), 617 millions d’enfants et d’adolescent·e·s dans le monde ont des compétences insuffisantes en lecture et en mathématiques (s’y trouvent les jeunes qui ne fréquentent pas l’école, mais aussi, pour deux tiers, des jeunes scolarisé·e·s).
De plus, d’après des données relevées de 2015 à 2019 par les Nations unies, la proportion d’enfants et de jeunes ayant les compétences minimales en lecture à la fin du premier cycle du secondaire se situait entre 70 % et 90 % dans la plupart des pays à revenu élevé tandis que cette proportion était inférieure à 60 % dans presque tous les pays à revenu intermédiaire et faible, atteignant moins de 10 % dans certains pays.
Les problèmes d’apprentissage peuvent être liés à plusieurs facteurs, par exemple, l’insuffisance d’enseignant·e·s formé·e·s et le manque de matériel pédagogique adapté, l’insalubrité des classes et des installations sanitaires à l’intérieur des écoles, l’impossibilité pour des élèves touché·e·s par la pauvreté de faire leurs devoirs et d’étudier dans de bonnes conditions (en raison notamment de la faim, de maladies fréquentes, de fatigue lié à un travail ou des tâches domestiques en dehors de l’école, d’absence de soutien adapté de la part de la famille, d’espace de travail insuffisant ou inadapté), etc.
Certains obstacles à l’éducation
La pauvreté
Dans un rapport publié en 2020, consacré à l’inclusivité et aux discriminations dans l’éducation, l’UNESCO indique que dans tous les pays, à l’exception des pays à revenu élevé d’Europe et d’Amérique du Nord, pour 100 jeunes parmi les plus riches qui achèvent le deuxième cycle de l’enseignement secondaire, seulement 18 jeunes parmi les plus pauvres y parviennent. Et dans 20 pays au moins, pour la plupart situés en Afrique subsaharienne, pratiquement aucune jeune femme pauvre de milieu rural ne termine ses études secondaires.
Un autre rapport (le rapport sur les objectifs de développement durable 2022 des Nations unies) indique que les enfants vivant en zone rurale et dans les ménages les plus pauvres sont toujours plus désavantagés en termes de participation et de résultats scolaires que ceux vivant en zone urbaine, plus riches.
Cependant, le droit à l’éducation n’étant pas seulement le fait de pouvoir aller à l’école mais aussi d’avoir accès à une éducation gratuite et de qualité, la pauvreté devient aussi un obstacle à l’éducation en Europe. En Belgique, par exemple, les coûts indirects tels que l’achat de livres ou l’accès à un espace de travail adéquat jouent un rôle important dans les inégalités. De plus, les enfants dont les familles sont défavorisées sont trop souvent orientés vers l’enseignement spécialisé au lieu d’être aidés.
Le sexe/le genre
Concernant les filles, même si leur taux de scolarisation est beaucoup plus élevé qu’avant au niveau mondial, des disparités régionales persistent. L’UNESCO et la Banque mondiale estiment à 132 millions le nombre de filles, entre 6 et 17 ans, qui ne sont pas scolarisées dans le monde. Cela veut dire qu’une fille sur quatre ne va pas à l’école dans les pays en développement.
L’Afghanistan est le seul pays au monde où l’éducation des filles est interdite après l’école primaire. Avant l’arrivée au pouvoir des talibans, les jeunes filles afghanes avaient la possibilité de suivre des études secondaires ainsi que des études supérieures à l’université, mais depuis le retour au pouvoir des talibans, elles se voient empêcher d’aller à l’école secondaire (depuis août 2021) et à l’université (depuis décembre 2022).
Selon l’UNICEF, actuellement, 80 % des filles et jeunes femmes afghanes d’âge scolaire, soit 2,5 millions de personnes, ne sont pas scolarisées.
L’apatridie
Au Koweït, les enfants de la communauté bidun, native du pays, mais non reconnue par l’État, se voient refuser l’accès à l’éducation publique gratuite dont bénéficie les autres enfants. Les enfants bidun, abrégé du terme bidoon jinsiyya, signifie « sans nationalité » en arabe.
L’éducation primaire et secondaire est gratuite pour les enfants koweïtiens dont la citoyenneté est reconnue par le gouvernement. Mais les enfants bidun ne bénéficient pas de ce droit comme les enfants koweïtiens. Ils rencontrent aussi des obstacles pour aller à l’université, car leurs inscriptions sont strictement limitées par un quota relativement faible.
Les familles bidun, qui pourtant ont moins d’argent que les familles koweïtiennes, sont obligées d’envoyer leurs enfants dans des écoles privées payantes, où, bien qu’elles soient payantes, les conditions d’enseignement sont souvent mauvaises. Certaines familles ne peuvent pas envoyer leurs enfants dans ces écoles, faute d’argent.
Ces enfants se retrouvent privés de leur droit à une éducation gratuite, de qualité et sans discrimination.
L’insécurité
Le Nigéria présente le taux de scolarisation le plus bas de la planète : un enfant non scolarisé sur cinq dans le monde se retrouve dans ce pays.
Pourquoi ? Les écoles sont régulièrement la cible d’attaques de la part de groupes armés qui s’en prennent délibérément aux enfants dans les écoles et des élèves sont fréquemment enlevé·e·s à l’école par ces groupes.
L’éducation est une arme puissante pour lutter contre les menaces en matière de sécurité, notamment la montée de l’extrémisme violent. Les groupes armés extrémistes le savent aussi. C’est pourquoi ils continuent d’attaquer des écoles, dans certains pays.
Depuis 2014, Amnesty International a recensé plus de 1500 enlèvements d’élèves, commis par Boko Haram ou d’autres groupes armés, dans les écoles ou sur le chemin des écoles du nord du Nigéria. Certain·e·s élèves ont pu s’échapper ou être relâché·e·s, mais des centaines d’autres ont été tué·e·s, exploité·e·s, contraint·e·s à rejoindre les rangs de ces groupes ou ont fait l’objet de mariages forcés.
Des centaines d’écoles ont dû fermer par crainte des enlèvements et des milliers d’enfants et de jeunes sont actuellement privé·e·s d’éducation. L’école confrontée au terrorisme est ainsi menacée de disparaître dans le nord du Nigeria, et l’avenir des enfants avec.
Les parents dont les enfants sont encore scolarisés ont toujours peur les jours où leurs enfants vont à l’école que les ravisseurs reviennent les kidnapper. De même, les parents dont les enfants doivent commencer à étudier se retrouvent confrontés à un dilemme : les inscrire à l’école ou non. S’ils le font, ils craignent que leurs enfants ne reviennent pas à la maison.