Décerné chaque année depuis 2019 par de jeunes militant·e·s d’Amnesty à une personne ou à un groupe de personnes de 35 ans maximum et vivant en Belgique, le Prix Amnesty Jeunes des droits humains récompense la qualité d’une action en faveur des droits humains. Parmi les objectifs poursuivis par cette initiative qui permet de mettre en avant une ou des personnalité(s) inspirante(s), il y a notamment la volonté de développer les capacités d’argumentation et de décision collective des jeunes qui participent au vote, ainsi que celle de leur offrir des exemples d’engagement en faveur des droits humains.
Cette année, à la suite du vote de près de 300 jeunes, membres de groupes Amnesty dans différentes écoles de Wallonie et de Bruxelles, ce prix a été attribué à Wassim Allouka, pour ses actions contre les discriminations et en faveur de l’interculturalité.
À la rencontre de Wassim Allouka
Quelques jours après avoir reçu son prix, Wassim a accepté de venir nous rendre visite dans les bureaux d’Amnesty pour répondre à quelques-unes de nos questions.
Âgé de 23 ans, Wassim jongle entre ses études à l’Université libre de Bruxelles (ULB), où il termine un master en Gestion des ressources humaines et ses engagements associatifs. Depuis toujours engagé contre les discriminations, pour l’inclusion et plus généralement en faveur des droits humains, il est notamment responsable de la section locale de la Fédération de la jeunesse musulmane (FJM) et a participé à la mise en place de plusieurs projets, dont « Solidarité judéo-arabe ». Ce collectif créé dans le contexte de la guerre faisant toujours rage à Gaza réclame activement un cessez-le-feu immédiat de toutes les parties et milite pour l’interculturalité et la justice sociale et contre le racisme, l’antisémitisme et l’islamophobie.
Quels sont les objectifs qui ont présidé à la co-création du Collectif Solidarité judéo-arabe ?
Ce sont les répercussions du conflit au Proche-Orient et la polarisation des réactions des deux camps, particulièrement sur les réseaux sociaux, mais aussi dans les campus universitaires et au sein de la société civile qui nous ont poussé·e·s à créer ce collectif. L’objectif était de créer un espace de discussion entre les communautés juives et musulmanes favorisant l’entente malgré les différences, centré sur la création de liens intercommunautaires. Nous souhaitions offrir une alternative aux discours polarisés et promouvoir la compréhension mutuelle, en mettant en avant nos valeurs communes plutôt que les choses qui nous divisent.
Comment vois-tu ton engagement dans le cadre du conflit israélo-palestinien en cours ?
Je pense que face à tout ce qui se passe, il faut essayer avant tout de trouver des éléments de convergence plutôt que des points de divergence. Mon engagement est donc centré sur la défense des droits humains et du vivre ensemble. Je cherche à créer des éléments de convergence pour rassembler les gens, tout en soutenant la lutte contre toutes formes d’injustices et de discours de haine dans le monde. Mon approche, notamment dans le cadre des projets que je mène au sein de la section locale de la Fédération de la jeunesse musulmane, est axée sur la recherche de solutions qui favorisent la paix, le respect des droits humains et la coexistence pacifique.
C’est intéressant aussi de noter que le conflit israélo-palestinien a fait germer, dans différents pays comme en France ou aux Pays-Bas, des initiatives du même type que le collectif Solidarité judéo-arabe. Ce mouvement de groupe me permet donc de rester optimiste face à la situation.
Est-ce que ce conflit et les tensions qu’il a générées a renforcé ta volonté de t’engager ?
Je ne dirais pas que ce conflit m’a poussé à m’engager de manière plus forte que d’habitude. Je pense qu’il faut avoir un engagement sur le long terme et il faut faire les choses petit à petit, pour faire émerger un discours fédérateur.
C’est important, selon moi, de veiller à toujours avoir un discours cohérent, humaniste, qui, à la fois, défend et promeut les droits humains, et condamne toutes les formes de crimes de guerre ou contre l’humanité.
Les discours de binarité par rapport à ce conflit, mais aussi par rapport à d’autres, rendent difficile la prise de parole, c’est pour cela qu’il faut mettre en place des espaces de discussions. Ils sont nécessaires et vitaux pour essayer de comprendre l’autre et savoir comment est-ce qu’on peut se positionner ou faire émerger des actions qui tendent vers une convergence des luttes.
Qu’as-tu ressenti quand tu as reçu le Prix Amnesty Jeunes des droits humains ?
J’ai été honoré ! Cela m’a donné beaucoup d’énergie et cela m’a motivé à poursuivre mes efforts pour promouvoir les droits humains et la justice sociale. Ce prix est aussi une reconnaissance qui prouve que même s’il est difficile de changer le monde, chaque action compte.
Je tiens à remercier chaleureusement les groupes-écoles Amnesty de m’avoir décerné ce prix. J’espère pouvoir être un exemple pour la jeunesse belge francophone, et la jeunesse tout court. J’espère pouvoir démontrer qu’on peut aller loin avec tout ce qu’on a à disposition : en participant à certains projets ou certaines initiatives, on peut changer certaines choses à notre échelle, et avoir un impact sur la société, en toute humilité.
Quel est le message que tu souhaites transmettre aux jeunes ?
Si vous avez de l’ambition et que vous vous donnez un objectif et les moyens de le réaliser, vous pouvez aller loin et le reste suivra !
Souvent, quand on est jeune, on est souvent négligé, on n’est pas pris au sérieux, on nous dit souvent « tu es trop jeune pour comprendre » alors qu’on peut être jeune et avoir de bonnes idées et les capacités pour créer des actions ou participer à des actions qui auront un impact.
Faites avec ce dont vous disposez, l’âge ne compte pas ! Seules vos capacités et la volonté d’entreprendre feront en sorte que vous irez loin, très loin ! Les jeunes ont souvent de bonnes idées et peuvent avoir un impact significatif s’ils s’engagent. Je les encourage à faire preuve de créativité et à agrandir leurs réseaux, à participer à des rencontres qu’elles soient culturelles, politiques ou encore artistiques, à s’intéresser à ce que les autres font, à rester déterminé·e·s, à croire en leurs capacités et à persévérer dans la défense des valeurs qui leur tiennent à cœur. Ensemble, nous pouvons construire un avenir plus juste et plus équitable pour tous !
Est-ce que le Prix Amnesty Jeunes des droits humains change quelque chose à ton travail ?
Oui et non. Cela apporte une reconnaissance, notamment de la part des nombreuses personnes qui m’ont félicité, mais je reste humble et fidèle à mes valeurs. Ce n’est qu’un bon début, mon engagement et mes convictions restent inchangés !
Je reste toujours le fils de mes parents, je reste ce que je suis avec les valeurs et principes qu’on m’a transmis : l’ouverture d’esprit et à l’autre, la générosité, l’importance de toujours bien s’informer, de s’éduquer ou de se rééduquer en permanence afin de s’en cesse construire et développer son esprit critique.
Quels sont tes projets pour le futur ?
J’étudie actuellement la gestion des ressources humaines, mais j’aimerais pouvoir me réorienter vers les sciences politiques ou les relations internationales afin qu’il y ait une continuité entre mes études et mes engagements associatifs, pour aller à la découverte du monde à travers les causes que je défends et avoir un impact sur la société ou la vie des gens.
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