Wendy Galarza à l’International School of Brussels

De passage à Bruxelles en novembre 2021, Wendy Garlaza, défenseure mexicaine des droits des femmes soutenue par Amnesty International dans le cadre de la campagne « Écrire pour les droits », est allée, aux côté d’Edith Olivares Ferreto, Directrice d’Amnesty International Mexique, à la rencontre d’élèves de l’International School of Brussels de Watermael Boitsfort

Wendy Galarza, une défenseure mexicaine des droits des femmes courageuse

Le 9 novembre 2020, Wendy a participé à une manifestation organisée par des collectifs féministes à Cancún située dans l’État du Quintana Roo, au nord-est de la Péninsule du Yucatán.

Cette manifestation visait à réclamer justice après le meurtre d’une femme connue sous le nom d’Alexis. Lorsque la manifestation a commencé à être violemment réprimée par les forces de l’ordre et à dégénérer, Wendy a essayé de fuir, mais la police l’a attrapée. Les policiers l’ont frappée et lui ont tiré dessus deux fois. Elle a de la chance d’avoir survécu.

Wendy a porté plainte contre la police, et le procureur de l’État a mis plusieurs mois avant d’accepter les éléments de preuve qu’elle présentait. À ce jour, les personnes soupçonnées de lui avoir tiré dessus n’ont pas été traduites en justice. Mais Wendy n’a pas abandonné et a créé un collectif avec d’autres femmes agressées pendant la manifestation.

« Je ne laisserai pas le 9 novembre tomber dans l’oubli  », dit-elle. « Je vais continuer à me faire entendre et à défendre mes droits fondamentaux et ceux de mes camarades de lutte. »

Au Mexique, comme dans de nombreux autres pays d’Amérique latine et du monde, les femmes sont tuées à un rythme alarmant. Grâce à des personnes comme Wendy qui font entendre leur voix, les femmes partout dans le monde ont de meilleures chances de vivre sans crainte. Les autorités mexicaines devraient protéger les personnes comme Wendy, mais au lieu de cela, elles les attaquent.

Une rencontre marquante entre Wendy et des élèves de l’International School of Brussels

De passage à Bruxelles pour quelques jours, Wendy Galarza et Edith Olivares Ferreto, la directrice d’Amnesty International Mexique, ont eu l’occasion de se rendre, le 16 novembre, à l’International School of Brussels, afin d’y rencontrer les membres du groupe Amnesty de cette école ainsi que des élèves de différentes classes, notamment des élèves d’un cours d’espagnol.


Les échanges ont été riches et forts entre elles et les élèves. En voici quelques extraits.

Peux-tu, Wendy, nous raconter ton histoire ?

« Je vis à Cancún qui est une ville touristique du Mexique, bien connue pour ses plages paradisiaques, mais la vie de nombreuses femmes dans cette zone est loin d’être le paradis.

Lors d’une manifestation à laquelle j’ai participé le 9 novembre 2020 pour dénoncer le meurtre d’Alexis, une jeune femme qui a été assassinée seulement en raison de son genre, j’ai été touchée par des tirs provenant de membres de la police et grièvement blessée à la jambe et à l’entrejambe. Quand j’ai regardé ma jambe, j’étais couverte de sang. Ce jour-là, j’aurais pu être la victime suivante, mais j’ai eu la chance de survivre.

J’ai porté plainte contre la police deux jours après. Le ministère public a mis des mois à accepter les éléments de preuve supplémentaires que j’ai présentés, notamment mon pantalon noir troué par les tirs que je portais le jour de la manifestation.

Même si ma blessure était profonde et que j’ai mis du temps à m’en remettre, le plus dur pour moi n’a pas été le 9 novembre, mais toute la période qui a suivi durant laquelle le bureau du procureur général de l’État ne nous a pas traitées (moi et les autres femmes qui ont été agressées ce jour-là) de la manière que nous méritions en tant que victimes de l’État.

Aujourd’hui, les personnes qui m’ont blessée et ont attaqué violemment d’autres manifestantes ne sont toujours pas poursuivies en justice. Je continue donc à me battre pour obtenir justice pour moi, mais aussi et surtout pour toutes les femmes qui ont été agressées ce jour-là.

J’ai créé un collectif avec d’autres femmes agressées pendant la manifestation pour que la vérité soit dite et que ces faits ne tombent pas dans l’oubli.

Aucune femme ne devrait subir ces violences, à Cancùn, au Mexique en général, et partout ailleurs dans le monde. »

Quel type de violences à l’égard des femmes est la plus importante au Mexique ?

« Les violences envers les femmes au Mexique sont multiples et très présentes. Elles ne cessent d’augmenter. Deux tiers des femmes de 15 ans et plus au Mexique ont subi une forme ou une autre de violence. Il est difficile de mettre en avant qu’un seul type de violences. On peut tout de même souligner que les principaux problèmes rencontrés par les femmes au Mexique sont les féminicides (c’est-à-dire les assassinats de femmes en raison de leur genre) et la répression des femmes qui manifestent pour dénoncer justement les violences envers les femmes.

Au Mexique, 10 femmes sont assassinées tous les jours et ce chiffre est encore plus élevé dans la zone de Cancún. Non seulement, il y a énormément de féminicides, mais en plus, il reste le plus souvent impunis.

Quant à la répression des femmes qui manifestent pour dénoncer les violences qui visent les femmes, et en particulier les féminicides et les violences sexuelles, elle est générale, massive et violente. Les membres des forces de police font un usage excessif de la force lors des manifestations, ils procèdent à des arrestations et détention arbitraires et des violences sexuelles sont aussi parfois perpétrées à l’encontre des manifestantes. Et il est très rare que ces violations des droits humains commises à l’encontre des manifestantes soient reconnues et entraînent des poursuites des personnes responsables de ces actes. »

Quel est l’objectif de votre séjour en Belgique et plus largement en Europe ?

« Avec Edith Olivares Ferreto, nous nous rendons dans différents pays d’Europe, ces jours-ci, afin de rendre plus visibles les cas de violences à l’égard des femmes au Mexique. Nous souhaitons ouvrir les yeux d’un maximum de personnes à l’extérieur du Mexique sur ces situations car nous sommes persuadées que l’appui de la communauté internationale et des populations à l’étranger peuvent nous aider à faire pression sur les autorités mexicaines.

Nous sommes arrivées à un point où nous les femmes devons être la révolution, pour faire valoir et respecter nos droits, mais nous ne pouvons pas agir dans notre coin, nous avons besoin d’un maximum de soutien, y compris à l’étranger.

Au Mexique, la police et le gouvernement ne cherchent qu’une seule chose : nous faire taire et rendre invisibles nos actions et les violences perpétrées à l’encontre des femmes. On a donc besoin d’un maximum de visibilité pour que les autorités mexicaines comprennent qu’elles ne peuvent plus cacher ces situations de violences qui visent les femmes, réduire au silence les personnes qui tentent de les dénoncer et rester les bras croisés en toute impunité face à ces violences. »

Est-ce que les autorités mexicaines ne font vraiment rien pour combattre les violences à l’égard des femmes ?

« En fait, quand on les interpelle à ce sujet, les autorités mexicaines disent publiquement qu’elles vont s’attaquer à ces violences et mettre en place des mesures pour les prévenir et les combattre, mais dans les faits, elles ne font rien. On doit donc faire en sorte que la pression exercée à leur égard soit si forte qu’elles ne pourront plus les nier et fermer les yeux et qu’elles devront s’y attaquer véritablement et de manière efficace, si elles ne veulent pas être montrées du doigt par la communauté internationale.

Le système politique est très complexe car on a plusieurs niveaux de pouvoirs et de compétences (avec le gouvernement fédéral, le gouvernement de chaque État, etc.), ce qui ne facilite pas les choses pour prendre des décisions et mettre en place des programmes globaux de lutte contre les violences. De plus, le pouvoir et le système politique est très corrompu. Les narcotrafiquants ont notamment une emprise énorme sur le système politique. »

Concrètement, que doit faire le gouvernement pour lutter efficacement contre ces violences ?

«  La première étape est que le gouvernement reconnaisse qu’il y a un grave problème de violence à l’égard des femmes. S’il n’y a pas de reconnaissance de ce problème, on ne peut pas avancer.

La deuxième étape consiste à permettre à toutes les femmes victimes de ces violences d’obtenir justice.

Même notre lutte est difficile et dangereuse, je garde toujours une petite lumière d’espoir. Et Amnesty International est clairement une lumière qui nous aide à tenir et nous donne plus de visibilité. »

Est-ce que tu vas rentrer au Mexique ? N’as-tu pas peur de retourner dans ton pays ?

« Oui, j’ai peur. J’ai peur tous les jours d’être tuée quand je suis au Mexique. Mais je vais rentrer au Mexique. Je ne suis en Europe que pour quelques jours. C’est difficile d’être activiste, mais c’est primordial pour moi de défendre ma dignité. Je ne supporte pas que des personnes violent mes droits humains en toute impunité. C’est important aussi pour moi de me battre et de représenter toutes celles qui ont trop peur de sortir de chez elles, de se montrer et d’agir publiquement car elles craignent d’être tuées. J’ai peur, mais j’ai peut-être un peu moins peur qu’elles alors il faut que j’utilise cette force, c’est mon devoir de les représenter. »

Quel est le conseil que vous pouvez nous donner, à nous qui sommes de jeunes activistes ?

« Le plus important selon moi est de faire entendre sa voix et de s’organiser à plusieurs pour se mobiliser. Ensemble, on est plus fort et plus visible. »


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