Retour sur la rencontre avec Alexandra Skotchilenko

Le mercredi 26 février 2025, nous avons eu l’honneur d’accueillir Alexandra Skotchilenko dans les locaux d’Amnesty International Belgique. Cette artiste et musicienne russe a résisté à la guerre d’agression en Ukraine en mars 2022 en divulguant des informations alternatives à la propagande russe. Elle a été pour cela condamnée à sept ans de prison en 2023 avant d’être libérée le 1er août 2024. Des élèves du secondaire, néerlandophones et francophones, dont certaines étaient membres de groupes Amnesty dans leur école, ont pu échanger avec elle sur les raisons de son engagement, et revenir sur le rôle qu’a joué la mobilisation d’Amnesty International dans sa libération. Si tu veux en savoir plus, voici un résumé de la rencontre !

L’arme d’Alexandra pour « dire non à la guerre » : l’information !

Le 24 février 2022, la Russie envahit l’Ukraine. Face à cette invasion, Alexandra Skotchilenko ne peut rester indifférente. Le 31 mars 2022, dans un supermarché de Saint-Pétersbourg, Alexandra remplace les prix des produits par de petites étiquettes en papier sur lesquelles on peut lire : « L’armée russe a bombardé une école d’art à Marioupol où environ 400 personnes se cachaient pour se protéger des bombardements ». Une action symbolique forte qui lui vaut d’être arrêtée chez elle quelques jours plus tard, le 11 avril 2022. En effet, en Russie la désinformation et la propagande sont très importantes et se sont intensifiées après le début de la guerre. Les médias nationaux ont l’obligation d’« utiliser les informations et les données reçues uniquement de sources officielles russes » pour couvrir le conflit en Ukraine, et de supprimer leurs publications faisant état de civils tués par l’armée russe, ou contenant les termes d’« invasion », d’« offensive » ou de « déclaration de guerre ».

Alexandra nous a raconté que ce qui a motivé son passage à l’acte, c’est la différence qu’elle a observée entre les discours officiels du gouvernement, et ce qu’elle voyait effectivement, car elle avait des amis ukrainiens avec qui elle communiquait. Les images de ses amis n’ayant plus d’électricité, étant obligés de se cacher dans des sous-sols durant les bombardements, et vivant dans des conditions déplorables l’ont révoltée. « Contrairement à ce que disait le gouvernement, la population ukrainienne était comme nous. Et c’était mal, tellement mal que je ne pouvais pas ne pas faire quelque chose ». C’est avec ce sentiment d’injustice face au non-respect de notre humanité commune qu’Alexandra a décidé d’agir.

« Ma conscience serait en paix. Je serai en prison pour quelques temps, mais ma conscience sera avec moi toute ma vie, c’est ce que je me suis dit ».

Faire la différence

Rapidement, son action et son histoire a été relayée sur les réseaux sociaux et dans les médias. Amnesty International s’est saisie du sujet pour organiser une grande campagne de mobilisation et exiger sa libération. Dans ce contexte, les lettres envoyées dans le cadre d’une précédente édition du marathon des lettres « Écrire pour nos droits » ont eu un impact, et Alexandra a tenu à le rappeler : « Dans les moments de tristesse et de désespoir, voir qu’autant d’inconnu·e·s se préoccupaient de mon sort me faisait me sentir bien ». Elle a raconté qu’en prison, les lettres étaient lues impérativement par tous les travailleurs à cause de la censure, et qu’à force de les lire, leur avis sur la légitimité de l’emprisonnement d’Alexandra et leur manière de la traiter ont évolué. Selon elle, c’est parce que ces lettres faisaient appel à leur humanité, et qu’elles leur ont fait se poser des questions que le gouvernement ne leur laissait pas le temps ou la possibilité de se poser.

Cette rencontre et l’histoire d’Alexandra sont donc marquantes parce qu’elles montrent la force de l’activisme, de l’action et de la solidarité. « Quand j’étais jeune, je n’aurais jamais pensé être capable de changer quoi que ce soit. Mais je me suis rendue compte que j’avais changé et que je pouvais changer les choses. Demain, c’est vous qui allez faire la différence ».

L’expérience

Durant la deuxième partie de la rencontre, elle nous a proposé une « expérience » : dans une pièce à l’écart et de manière anonyme, chaque personne devait déposer dans un bac soit un stylo noir, soit un stylo jaune, après avoir écouté Alexandra nous décrire une situation spécifique. Le noir incarnait le choix d’exprimer son opinion parce qu’il nous semblait important, et le jaune celui de ne pas le faire parce que nous ne prenions pas nécessairement le temps de nous informer sur la politique. À trois reprises, les personnes présentes à la rencontre ont dû faire ces choix, mais dans des situations différentes. La première fois, dire son opinion n’avait pas de conséquence pour la personne ; la deuxième fois elle risquait une amende, quelques violences policières et quelques jours au commissariat ; et la troisième fois, vingt ans de prison. Le résultat de l’expérience a montré que si tout le monde avait mis un stylo noir la première fois, il ne restait que très peu de stylos noirs à la fin.

Alexandra a rappelé que l’Histoire nous avait appris que n’importe quel pays libre peut devenir, à un moment donné, un pays totalitaire, et qu’il est essentiel de s’exprimer et de s’engager face à des atteintes aux libertés et aux droits fondamentaux.

Pour elle, cette expérience montre que quand il est encore possible d’exprimer son opinion et de se renseigner sur la politique avec des informations vérifiées, il faut le faire, parce qu’après, de moins en moins de personnes le feront car les risques seront trop grands. C’était donc un moment fort, qui a rappelé l’importance de s’informer, d’éduquer, et de résister !

Pour conclure, Alexandra a chanté en russe une de ses chansons en s’accompagnant d’une mandoline : un autre moment plein d’émotions !

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