Un contexte international plus terrible que jamais
Depuis octobre 2023, le Proche-Orient est de nouveau ravagé par une violence d’une intensité inédite. L’opération militaire menée par Israël à Gaza, en réponse aux attaques du Hamas du 7 octobre, a provoqué la mort de milliers de personnes, une destruction massive des infrastructures civiles, et une crise humanitaire majeure. Des hôpitaux bombardés, des familles déplacées à répétition, des coupures d’eau, d’électricité, de nourriture : les chiffres ne suffisent plus à exprimer l’ampleur de la tragédie.
Face à l’inaction internationale et à l’escalade continue, des voix s’élèvent pour nommer ce qui se joue. En décembre 2024, Amnesty International a officiellement dénoncé les actes commis à Gaza comme relevant d’un génocide, appelant à une enquête internationale et à la fin immédiate des hostilités. Pourtant, le débat reste profondément polarisé, y compris en Europe. Dans ce contexte, parler de paix devient un acte difficile — mais nécessaire.
Standing Together, une autre voix
C’est dans ce contexte international insupportable qu’a eu lieu, le 24 avril dernier, une conférence organisée par les Belgian Friends of Standing Together à l’Institut des filles de Marie de Bruxelles. Une cinquantaine de jeunes étaient présent·e·s, ainsi que des enseignant·e·s, pour écouter et échanger avec Wassim Allouka (lauréat du Prix Amnesty Jeunes des droits humains 2024 et membre du comité de Belgian Friends of Standing Together) et Noémie (membre et sympathisante de ce collectif).
Leur objectif : présenter le mouvement israélo-palestinien Standing Together, fondé en 2015, qui réunit des citoyen·ne·s juif·ve·s et juives et arabes en Israël autour de revendications communes de justice sociale, d’égalité et de fin de l’occupation. Il s’agit du plus grand mouvement populaire de Juif·ve·s et de Palestinien·ne·s en Israël œuvrant pour la paix. Leurs actions, concrètes et quotidiennes, vont des campagnes pour le cessez-le-feu à Gaza à l’organisation de collectes de nourriture pour les populations civiles, en passant par des réseaux de soutien étudiant.
Au fil de la conférence, les deux intervenant·e·s ont partagé non seulement des faits, mais aussi des récits personnels. Ces dernier·e·s ont évoqué la difficulté d’exister en tant que voix mixte et solidaire dans un paysage fragmenté par la peur et la méfiance, tout en soulignant la force de leur engagement commun. À la fin, le public a pu poser des questions anonymes grâce à un système de QR code, afin d’exprimer ses doutes, ses impressions, ses frustrations… et les sollicitations étaient nombreuses ! Entre 80 et 100 questions ont été posées, signe de la préoccupation des jeunes pour ce sujet, mais aussi de la nécessité d’en parler et d’échanger.
« Quel impact avez-vous dans le conflit ? »
Parmi les nombreuses questions posées par le public, l’une d’elles a suscité un temps d’arrêt : « Quel impact avez-vous dans le conflit ? ». Wassim et Noémie ont choisi d’y répondre avec lucidité. Non, leur engagement ne peut pas, à lui seul, mettre un terme à la guerre. Mais il et elle ont insisté sur l’importance de la parole, du lien, de la pédagogie : faire connaître des réalités trop souvent ignorées, déconstruire les préjugés, donner des clés de compréhension à un public souvent démuni face à la complexité du conflit. Il et elle ont rappelé que les actions de Standing Together ont un véritable impact, même s’il est souvent discret : mobilisations pour le cessez-le-feu, protection de convois humanitaires, campagnes de dons ayant permis d’acheminer des centaines de camions d’aide à Gaza, soutien aux étudiant·e·s pris·es dans la tourmente.
En sensibilisant le grand public, en dialoguant avec des jeunes en Belgique ou en organisant des événements culturels et politiques, ils contribuent à modifier les regards et à faire émerger une autre narration possible : celle de la coopération, de la solidarité, et d’un engagement non violent pour la justice. À défaut de pouvoir arrêter les bombes, ils cherchent à changer le climat dans lequel elles tombent.
La voie de la société civile organisée
La rencontre a d’ailleurs aussi mis en lumière des initiatives similaires, telles que Parents Circle, Combattants for Peace, A Land for All, Women Wage Peace ou Women of the Sun, qui témoignent d’une dynamique trop méconnue mais réelle : celle de femmes et d’hommes, de part et d’autre du mur, qui se lèvent et refusent de se haïr, qui travaillent ensemble pour bâtir un avenir commun, et dont le courage illustre en miroir la faiblesse des pouvoirs publics.
En Belgique, les Friends of Standing Together poursuivent cette mission de sensibilisation et de dialogue intercommunautaire. Leur action s’incarne notamment dans l’organisation de conférences ou de projection de films, comme récemment avec l’organisation d’une projection du film « No Other Land » de Basel Adra, Hamdam Ballal et Yuval Abraham, suivi d’un débat animé par le reporter de guerre Wilson Fache avec Hamze Awawde, activiste palestinien engagé pour la paix et Shaqued Morag, représentante à Bruxelles d’une coalition de 12 ONG israéliennes pro-paix et contre l’occupation. Les Belgian Friends of Standing Together organisent également des rencontres culturelles/artistiques et des événements symboliques comme le sit-in prévu à Bruxelles le 13 juin.
Dans un moment où les discours se crispent et où les positions semblent irréconciliables, cette rencontre a offert un espace précieux de réflexion, de recul et de lien. Un rappel utile, peut-être essentiel, que la paix ne se construit pas uniquement dans les traités ou les négociations officielles, mais aussi dans ces petits lieux d’humanité partagée.
Pour en savoir plus sur les actions de Belgian Friends of Standing Together