Les bonnes nouvelles d’octobre

Libération d’Hajar Raissouni au Maroc, avancée en matière de protection de la liberté d’expression en Malaisie avec la décision d’abolir une loi restrictive relative à la lutte contre les « fausses informations », et remise du prix Nobel de la paix 2019 au Premier ministre éthiopien pour son travail pour les droits humains : c’est dans les bonnes nouvelles d’octobre !

Maroc : Hajar Raissouni libérée

Hajar Raissouni, journaliste, a été arrêtée le 31 août dernier avec son fiancé Amin Rifaat, alors qu’ils sortaient du cabinet d’un médecin à Rabat, au Maroc, accusés d’avoir consenti à un avortement et eu des rapports sexuels hors mariage. Le médecin et deux autres membres du personnel médical ont également été arrêtés, accusés d’avoir pratiqué un avortement ou d’y avoir participé. Le médecin était également accusé d’avoir régulièrement fourni des services d’interruption de grossesse.

Le 30 septembre, Hajar Raissouni et Amin Rifaat ont tous deux été condamnés à un an d’emprisonnement pour avortement « illégal », et le médecin impliqué dans cette affaire a lui été condamné à deux ans d’emprisonnement et à une interdiction de pratiquer la médecine pendant deux ans. Les deux autres membres du personnel médical ont été condamnés à un an d’emprisonnement pour l’un et à huit mois d’emprisonnement pour l’autre.

Le 4 septembre, pendant sa détention, Hajar Raissouni a écrit une lettre dans laquelle elle dit avoir été interrogée au sujet de ses textes politiques (critiquant les autorités marocaines), sur l’un de ses collègues journalistes et sur des membres de sa famille, dont son oncle Ahmed Raissouni, théologien de renom et ancien président du Mouvement de l’Unicité et de la Réforme (MUR), l’un des principaux mouvements islamiques au Maroc. Ces éléments laissent craindre qu’elle n’ait été prise pour cible par les autorités en raison de son travail journalistique.

Le parquet souligne, lui, que l’arrestation de Hajar Raissouni n’a aucun lien avec sa profession de journaliste et fait uniquement suite aux actes pénalement répréhensibles d’avortement et de relations sexuelles hors mariage, ce que Hajar Raissouni dément.

Le 16 octobre dernier, Hajar Raissouni a été remise en liberté à la faveur d’une grâce royale accordée également à son fiancé et aux trois membres du personnel médical impliqués dans cette affaire.

Heba Morayef, directrice du programme régional Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International, a déclaré : « La grâce royale n’efface pas la grave injustice dont elles ont été victimes. Les déclarations de culpabilité rendues contre elles doivent être annulées et effacées de leur casier judiciaire ».

« Le cas de Hajar Raissouni montre qu’il reste encore beaucoup de travail à accomplir pour que les droits des femmes soient protégés au Maroc. Les autorités marocaines doivent de toute urgence dépénaliser l’avortement et abroger toutes les lois qui soumettent les femmes à une discrimination », ajoute-t-elle.

Car le sais-tu ? Les relations sexuelles hors mariage constituent une infraction pénale aux termes de la législation au Maroc. Le Code pénal marocain prévoit jusqu’à un an de prison pour les couples ayant des relations sexuelles hors mariage. L’avortement est également interdit en toutes circonstances, sauf lorsque la santé de la femme enceinte est en danger et que son mari est d’accord. Une femme qui subit un avortement encourt une peine d’emprisonnement de six mois à deux ans ainsi qu’une amende.

Mais, au regard du droit international, les femmes ont droit à l’autonomie corporelle et personnelle, qui comprend la liberté de prendre leurs décisions en matière de sexualité et de procréation. Criminaliser des services de santé dont seules les femmes ont besoin, tels que l’avortement, représente donc une discrimination liée au genre.

« Ce cas montre une nouvelle fois la nécessité urgente d’abroger les lois marocaines rendant les relations sexuelles hors mariage et l’avortement passibles de poursuites pénales. Ces dispositions portent atteinte à un certain nombre de droits des femmes, notamment à l’autonomie corporelle et personnelle, à l’absence de discrimination, au respect de la vie privée et à la santé », a déclaré Heba Morayef.

Malaisie : Un pas dans la bonne direction

Le 2 avril 2018, la Chambre basse du parlement malaisien a adopté un projet de loi relatif à la lutte contre les « fausses informations ». Cette loi interdit officiellement les « fausses informations » et prévoit jusqu’à 6 ans de prison pour les personnes déclarées coupables.

Mais c’est quoi les « fausses informations » ? Et qu’est-ce qu’implique cette loi ?

La définition des « fausses informations » qui figure dans le projet de loi est générale et floue. Elle couvre « toutes les nouvelles, informations, données et reportages qui sont totalement ou partiellement faux, que ce soit sous la forme d’articles, d’images ou d’enregistrements audio ou sous toute autre forme de nature à évoquer des mots ou des idées ».

Ce projet de loi est donc une atteinte à la liberté d’expression et est utilisé pour museler, autrement dit, réduire une personne ou un groupe de personnes au silence. Il vise donc à restreindre la liberté d’expression et est principalement destiné aux détracteurs pacifiques du gouvernement. En effet, le gouvernement malaisien utilise la législation d’une manière à faire taire et réprimer les dissidents (les personnes qui ne sont pas d’accord avec les autorités en place) et restreindre l’espace dédié au débat public.

Ce projet de loi impose également de lourdes sanctions, prévoyant des amendes s’élevant jusqu’à 500 000 ringgits (environ 100 000 euros) et une peine maximale de six ans d’emprisonnement. Il confère également à la police des pouvoirs d’arrestation arbitraire.

Ce projet de loi n’a finalement pas été adopté par le Sénat en avril 2018 et début octobre 2019, le Parlement malaisien a pris la décision d’abolir cette loi. C’est un pas envers la liberté d’expression en Malaisie !

Mais le sais-tu ? D’autres lois telles que la loi de 1948 relative à la sédition (incitation à l’émeute), la loi de 1998 sur les communications et le multimédia, la loi de 2012 relative aux rassemblements pacifiques et la loi de 2012 sur les atteintes à la sécurité sont utilisées en Malaisie pour cibler les défenseurs des droits humains et les détracteurs pacifiques.

Le gouvernement malaisien a déclaré que ces textes sont en cours de révision. Mais, ces lois doivent par la suite être abrogées, comme la loi sur les « fausses informations », afin de permettre une plus grande liberté d’expression en Malaisie.

Éthiopie : Le premier ministre Abiy Ahmed reçoit le prix Nobel de la paix

Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed s’est vu décerner le prix Nobel de la paix 2019 !

« Cette récompense est une reconnaissance du travail essentiel que le gouvernement du Premier ministre Abiy Ahmed a accompli en vue d’initier des réformes des droits humains en Éthiopie, après des décennies d’une répression généralisée », a déclaré Kumi Naidoo, secrétaire général d’Amnesty International.

En effet, depuis son entrée en fonction en avril 2018, Abiy Ahmed a notamment réformé les forces de sécurité et conclu un accord de paix avec l’Érythrée, pays voisin, mettant ainsi fin à 20 années de relations hostiles.

Il a également remplacé une loi de 2009 visant à encadrer et contrôler strictement la société civile et étant très restrictive envers les actions des défenseurs des droits humains et les organisations de la société civile.

Il a aussi mis un terme à des mois de manifestations en négociant un accord entre les dirigeants militaires et l’opposition civile au Soudan, pays voisin également.

Pourtant, son travail est loin d’être achevé ! De nombreux défis restent à relever en termes de droits humains et menacent d’éclipser les progrès réalisés jusqu’à présent. Abiy Ahmed doit pouvoir apaiser les tensions ethniques qui menacent la stabilité et atteignent les droits humains. Il doit également garantir la modification d’une loi relative à la lutte contre le terrorisme utilisée de manière répressive et demander des comptes aux auteurs présumés de violations des droits humains.

Car le sais-tu ? L’Éthiopie est notamment connue pour sa politique très répressive envers les journalistes et pour son fort contrôle de la presse et des médias. Cinq journalistes éthiopiens ont été arrêtés arbitrairement début septembre sans aucun élément à l’appui. Ces journalistes font partie du mouvement Segalee Qeerroo Bilisumaa (Voix des jeunes pour la liberté) et ont largement couvert les violations des droits humains et les évolutions politiques en Éthiopie depuis 2011.

Le prix Nobel de la paix devrait l’encourager et le motiver face à ces défis !

« Aujourd’hui plus que jamais, le Premier ministre Abiy Ahmed doit adhérer pleinement aux principes et aux valeurs du prix Nobel de la paix afin de léguer un héritage durable en matière de droits humains à son pays, à la région et au monde », a affirmé Kumi Naidoo.

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