Allô ? A l’eau ! Le droit à l’eau, un droit humain comme les autres ?

(c) AI

Aujourd’hui, 884 millions de personnes n’ont pas accès à des sources d’eau potable et 2,5 milliards de personnes n’ont pas accès à des installations d’assainissement. Ces chiffres, qui mettent en lumière une situation bien inquiétante, montrent surtout l’importance que l’accès à l’eau représente. En effet, avoir accès à l’eau potable et à l’assainissement est essentiel à la vie, à la santé et à la dignité. Le droit à l’eau, c’est donc un droit qui précède tous les autres car il conditionne leur existence !

Eau potable et assainissement, quésaco ?

L’eau potable, c’est une eau qui ne présente pas de danger pour la santé humaine : tout le monde peu la boire. C’est donc une eau qui bénéficie de normes sanitaires et de techniques d’utilisation sûres. Pourquoi en a t-on besoin ? Pour tout notre quotidien : boire, se laver, cultiver, cuisiner, nettoyer, soigner ... la liste est longue !

(c) Borut Peterlin

L’assainissement, c’est la collecte, le traitement et l’évacuation des déchets liquides, solides ainsi que des excréments. C’est un élément fortement lié à la santé publique que l’on oublie souvent ! En effet, les déchets, les eaux usées et la défécation non contrôlée sont des vecteurs importants de maladies et de gênes dans la vie quotidienne : diarrhée, typhoïde, hépatites, choléra, paludisme peuvent rapidement être transmises si l’on vit dans un environnement non assaini !
T’es-tu déjà demandé comment les toilettes étaient évacuées dans ta ville ? C’est simple : elles sont soit liées à un systèmes d’égouts (qui évacue solides et liquides), soit à ce qu’on appelle une fosse septique (qui retient les solides et évacue les liquides).
L’eau et l’assainissement sont d’égale importance et sont intimement liés pour pour vivre dans la dignité. L’absence d’assainissement est à l’origine de la contamination de l’eau potable, donc sans assainissement, il ne peut y avoir d’eau potable.

Les égouts à l’air libre dans un bidon-ville au Kenya © Nikola Ivanovski

Pourquoi un droit à l’eau et à l’assainissement ?

Lorsque la Déclaration universelle des droits de l’homme est rédigée en 1948, l’accès à l’eau n’est pas pris en compte : à l’époque, peu de gens imaginaient un monde en manque d’eau potable ! Pourtant, nous avons tous appris qu’il existe dans le monde une quantité spécifique et limitée d’eau. Pendant des décennies, l’homme va donc énormément utiliser l’eau : face à l’augmentation de la population et à l’intensification de l’agriculture, l’eau s’épuise petit à petit. En parallèle, l’industrie et la consommation augmentent, ce qui pollue de plus en plus les diverses sources d’eau utilisées. Chaque jour, 2 millions de tonnes d’eaux usées et de déchets industriels sont déversés dans les eaux du monde.

Eau polluée par le déversement de pétrole, dans la communauté de Bodo dans le delta du Niger. (c) Media for Justice Project, Centre for Environment, Human Rights and Development (CEHRD)

De plus, face à la pauvreté, aux inégalités et aux rapports de force inégaux, un très grand nombre de personnes sont plongées dans ce qu’on appelle la "crise de l’eau" : elles luttent quotidiennement pour satisfaire leurs besoins les plus basiques. Si les effets de cette crise sont plus graves dans certaines régions que d’autres, elle est aggravée partout par l’accélération de l’urbanisation et le changement climatique. Face à cette crise, la communauté internationale est de plus en plus consciente que l’accès à l’eau potable et à l’assainissement doit s’inscrire dans un cadre intégrant les droits humains.

La reconnaissance internationale

Si à première vue, il est évident pour tout le monde que l’eau est un bien public et donc un droit humain, sa reconnaissance officielle a été longue et complexe.

La notion de besoins essentiels en eau pour satisfaire les besoins
humains fondamentaux a été pour la première fois énoncée à la Conférence des Nations Unies sur l’eau de 1977 à Mar del Plata en Argentine. Lors de cette conférence, il est dit que tous les peuples, quels que soient leur stade de développement et leur situation économique et sociale, ont le droit d’avoir accès à une eau potable dont la quantité et la qualité devaient être égales à leurs besoins essentiels.

Le programme Action 21 (appelé "Agenda 21"), adopté lors du Sommet de la Terre à Rio en 1992 confirme ce droit. Par la suite, de nombreux plans d’action, comme ceux du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDEF), de la Convention relative aux droits de l’enfant ou encore de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, mentionnent l’eau potable et l’assainissement en tant que droits humains sans les reconnaître expressément comme tels.

(c) Borut Peterlin

En 2002, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels précise la définition du droit à l’eau : il consiste en l’approvisionnement suffisant, physiquement accessible et à un coût abordable d’une eau salubre et de qualité acceptable pour les usages personnels et domestiques de chacun. Cela signifie qu’un nombre suffisant d’installations sanitaires donnant accès à l’eau potable et l’assainissement doit être à disposition des populations afin de satisfaire leurs besoins quotidiens ; que ces installations doivent être acceptables d’un point de vue culturel afin de préserver l’intimité et la dignité (par exemple des toilettes séparés pour les hommes et les femmes) ; et que le prix de l’accès à ces installations ne doit pas compromettre la satisfaction d’autres besoins comme la nourriture, le logement ou la santé.

Enfin, en 2010, l’Assemblée Générale des Nations Unies et le Conseil
des Droits de l’Homme reconnaissent le droit humain à l’eau potable et à l’assainissement. Mais il est mentionné comme un droit relevant du droit à un niveau de vie suffisant, du droit à la santé, à une nourriture et à un logement convenable et non comme un droit à part entière.

Le savais tu ?

Chaque année, le droit à l’eau et à l’assainissement sont célébrés lors de la "Journée de l’eau", le 22 mars. Cette année le thème défendu était la coopération dans le domaine de l’eau...va faire un tour par ici si tu veux plus d’informations sur cette journée.

De l’eau pour les femmes

La vie des femmes est étroitement liée à l’eau. Dans de nombreuses sociétés, ce sont elles qui s’occupent de l’approvisionnement en eau, de l’assainissement et des soins de santé au sein de la communauté. Elle ont souvent des connaissances approfondies sur les ressources en eau, notamment sur l’emplacement, la qualité et les méthodes de stockage. Les femmes indigènes en particulier possèdent un véritable savoir-faire sur le sujet !

Jeune fille haïtienne ramenant de l’eau dans un camp de déplacés.

Pourtant, ce sont ces mêmes femmes qui subissent le plus les conséquences négatives du manque d’installations privées et salubres. Par exemple, si la source d’eau potable est loin de leur village, ce sont souvent les filles qui sont chargées d’aller chercher l’eau, ce qui les empêche souvent d’aller à l’école ou menace leur santé. Ou encore lorsqu’une école ne possède pas de toilettes séparés, ce qui empêche certaines filles de bénéficier d’une éducation. Il est donc primordial d’incorporer femmes et filles dans les processus de réflexion et de décision sur l’amélioration de l’accès à l’eau.

De l’eau pour les réfugiés

Les réfugiés et déplacés sont particulièrement touchés par le manque d’accès à l’eau et l’assainissement. En effet, il est difficile d’accéder à des installations sanitaires au sein des camps dans lesquels ils vivent. Lorsque l’élimination des déchets et excréments n’est pas ou mal réalisée, le risque d’épidémies augmente beaucoup. Selon le Haut commissariat aux réfugiés, plus de la moitié des camps de réfugiés à travers le monde ne sont pas en mesure de fournir la quantité minimale quotidienne recommandée (20 litres par personnes). 30% de ces camps ne disposent pas de latrines et de système d’élimination des déchets.

Deux femmes se disputent sur leur ration d’eau dans un camp de réfugiés au Soudan du Sud, avril 2012. (c) Pete Muller

Tu l’as compris, le droit à l’eau et à l’assainissement est primordial. Lors de la prochaine "Journée de l’eau", souviens-toi que chaque être humain est constitué à 70% d’eau !

Petit lexique :

Salubre : ce qui est favorable à la santé

Sommet de la Terre : Les sommets de la Terre sont des rencontres entre les dirigeants mondiaux qui ont lieux tous les 10 ans afin de définir les moyen de stimuler le développement durable au niveau mondial. Le premier sommet a eu lieu à Stockholm (Suède) en 1972, le deuxième a Nairobi (Kenya) en 1982, le troisième à Rio de Janeiro (Brésil) en 1992 et le quatrième à Johannesburg (Afrique du Sud) en 2002. Le dernier sommet appelé "Rio+20" s’est tenu pour la seconde fois à Rio de Janeiro en 2012.

Comité des droits économiques, sociaux et culturels : c’est un organe composé d’experts indépendants qui surveille l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels par les États parties.

Pour aller plus loin... :

Le droit à l’eau et les Roms

Le site d’ONU-eau

L’institut européen sur la recherche et la politique de l’eau (IERPE)

Le site Rampedre, rapport mondial en ligne sur la concrétisation du droit à l’eau pour tous les habitants de la planète

Le film "La source des femmes" de Radu Mihaileanu sur les difficultés des femmes à ramener l’eau dans leur village.

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