Roumanie. La législation relative au logement doit protéger les personnes vulnérables

Les difficultés économiques persistantes de la Roumanie qui ont conduit à la démission de deux gouvernements en moins de trois mois sont une raison supplémentaire pour les autorités à tous niveaux de combler les lacunes de la législation ayant une incidence sur le logement de certains des groupes les plus marginalisés du pays, a souligné Amnesty International.

Ces lacunes de la législation permettent aux autorités locales d’expulser de force des personnes de leur domicile sans aucune garantie, notamment sans préavis et sans consultation en bonne et due forme. Bien souvent, les autorités locales laissent des personnes sans logis, a indiqué Jezerca Tigani, directrice adjointe du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

« Les habitants des quartiers informels et les locataires de logements sociaux dont le bail n’a pas été renouvelé n’ont aucune protection juridique et peuvent être expulsés de chez eux à tout moment. Ces violations des droits humains touchent les plus vulnérables, très souvent les Roms. »

Une synthèse d’Amnesty International, intitulée Unsafe foundations : Secure the right to housing in Romania, présente les principales règles du droit international que doivent observer les États pour sauvegarder le droit au logement, parmi lesquelles l’interdiction des expulsions forcées.

Ce document fournit au gouvernement roumain une liste de points de législation relative au logement, fondée sur les normes internationales, qui doit servir d’orientation pour une réforme juridique attendue depuis longtemps.

Actuellement, le droit roumain n’interdit pas les expulsions forcées, ni les réinstallations dans des zones dangereuses et/ou polluées qui représentent un risque pour la vie et la santé des personnes concernées.

Il n’oblige pas les autorités à mettre à disposition des logements sociaux dans des lieux permettant d’accéder réellement à l’emploi, aux services de santé, aux établissements scolaires, aux infrastructures d’accueil des enfants et à d’autres services.

De plus, la législation actuelle n’interdit pas expressément la ségrégation en matière de logement et ne fournit pas de protection suffisante contre cette forme de discrimination particulièrement pernicieuse.

Amnesty International a relevé de nombreux cas dans lesquels des communautés roms ont été expulsées de force et réinstallées en périphérie des villes, dans des logements surpeuplés ne permettant pas d’accéder à des services essentiels et dans des lieux isolés présentant de graves risques environnementaux et sanitaires.

« De par l’absence de protections et de garanties juridiques fondamentales, la Roumanie bafoue directement les normes internationales en matière de logement convenable et donne le feu vert aux autorités locales pour mettre des familles vulnérables dans des conditions de vie encore plus effroyables », a noté Jezerca Tigani.

Le 17 décembre 2010 au matin, par un froid glacial, 356 personnes, majoritairement des Roms, qui vivaient depuis des années rue Coastei, dans le centre de la ville de Cluj-Napoca, ont été expulsées de force sans avoir été averties ni consultées en bonne et due forme. Elles ont été conduites en camion avec leurs biens dans de nouveaux logements situés dans le quartier de Pata Rât, sur une colline proche d’un site d’enfouissement des déchets et d’une décharge de produits chimiques en périphérie de la ville.

Lorsqu’il fait chaud, l’odeur des produits chimiques imprègne l’air. Les familles – dont la composition va de quatre à 11 membres – se sont vu attribuer une seule pièce dont la taille ne dépasse pas 18 m². Quatre d’entre elles doivent partager une salle de bains commune équipée seulement en eau froide.

Parmi les familles expulsées, une trentaine n’ont pas obtenu de solution de relogement. Certaines ont construit des habitations de fortune à côté des logements existants, sans accès à l’électricité, à l’eau et aux installations sanitaires, dont elles risquent d’être expulsées à nouveau.

Pata Rât est situé à 9 kilomètres du centre-ville, ce n’est pas une zone résidentielle et les transports y sont peu fréquents et chers. L’arrêt de bus le plus proche est à 2,5 kilomètres, l’école la plus proche à 9 kilomètres et le premier centre commercial à 10 kilomètres.

La rue Coastei n’est pas le seul cas d’expulsion forcée dans lequel les autorités ont manqué à leurs obligations découlant du droit international en raison des lacunes de la législation roumaine.

Peu importe que les gens soient locataires, propriétaires ou qu’ils occupent leur logement ou leur terrain sans posséder les documents requis, tout le monde a droit au même niveau de protection contre les expulsions forcées, le harcèlement et toute autre menace, a ajouté Jezerca Tigani.

« Le nouveau gouvernement roumain doit calquer sa législation relative au logement sur les normes internationales que la Roumanie a acceptées de son plein gré et veiller à ce que la loi garantisse le respect des critères de logement convenable et des droits qui y sont liés pour tous les habitants du pays. »

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