Réintégration d’un général impliqué dans un massacre

La réintégration dans l’armée nigériane d’un général impliqué dans le massacre de centaines de détenus souligne l’échec monumental de la lutte gouvernementale contre l’impunité au plus haut niveau pour les crimes de guerre, a déclaré Amnesty International.

En juin dernier, Amnesty International a mentionné le général de division Ahmadu Mohammed, ainsi que huit autres hauts responsables de l’armée, demandant l’ouverture d’une enquête sur leur possible responsabilité pénale dans des crimes de guerre ayant notamment coûté la vie à plus de 8 000 détenus.

Le général de division Ahmadu Mohammed était commandant de la 7e division et à la tête des opérations lorsque l’armée a exécuté plus de 640 détenus qui s’étaient échappés de la caserne de Giwa, à la faveur d’une attaque de Boko Haram, le 14 mars 2014. Il a été écarté en 2014 pour d’autres motifs, mais a été réintégré ce mois-ci.

Un rapport approfondi a révélé toute une série de crimes de guerre et de possibles crimes contre l’humanité attribués à l’armée dans le cadre d’opérations visant Boko Haram. Il a indiqué que depuis mars 2011, plus de 7 000 personnes sont mortes de faim, d’asphyxie ou sous la torture dans des camps militaires de détention. Quelque 1 200 autres ont été appréhendées et été victimes d’exécutions extrajudiciaires.

« Le général de division Mohammed doit faire l’objet d’une enquête pour avoir contribué à la mort de centaines de personnes, soit en l’ordonnant soit en s’abstenant de la prévenir », a déclaré Salil Shetty, secrétaire général d’Amnesty International.

« Des jeunes hommes et des adolescents, emmenés par l’armée, ont été abattus ou sont morts de faim, d’asphyxie ou sous la torture, et personne n’a encore été amené à rendre des comptes. Il est inconcevable que le général de division Mohammed puisse reprendre le commandement de troupes avant même l’ouverture d’une enquête. »

Le rapport d’Amnesty International, intitulé Des galons aux épaules, du sang sur les mains. Les crimes de guerre commis par l’armée nigériane, s’est appuyé sur des années de recherche et d’analyse de divers éléments de preuve - notamment des rapports et courriers militaires ayant été divulgués, ainsi que des entretiens avec plus de 400 victimes, témoins et hauts responsables des forces nigérianes de sécurité.

Il a révélé plusieurs crimes de guerre et possibles crimes contre l’humanité, commis par l’armée dans le cadre d’opérations contre Boko Haram. Il a conclu que depuis mars 2011, plus de 7 000 personnes sont mortes de faim, d’asphyxie ou sous la torture dans des camps militaires de détention. Quelque 1 200 autres ont été appréhendées et été victimes d’exécutions extrajudiciaires.

Le rapport a pointé du doigt neuf responsables de la chaîne de commandement militaire qui devraient faire l’objet d’une enquête en raison de leur responsabilité individuelle et hiérarchique présumée dans ces actes.

Quelques heures après la publication du rapport, le 3 juin, le président Buhari a réagi personnellement sur Twitter pour dire : « Je vous assure que votre rapport sera examiné […] Ce gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour protéger l’état de droit et traiter toutes les affaires de violations des droits humains. »

De même, le président a annoncé le 12 juin 2015 qu’établir les responsabilités des uns et des autres dans le cadre des violations recensées dans le rapport d’Amnesty International serait une priorité pour le parquet. Aucune enquête n’a encore été ouverte.

Depuis la publication, quatre des responsables militaires nommés dans le rapport sont partis à la retraite. Deux autres l’avaient fait avant sa diffusion. Le statut actuel de deux généraux de brigade est inconnu. Le général de division Mohammed a été démis de ses fonctions le 16 mai 2014, deux jours après que ses hommes se furent semble-t-il mutinés. La nouvelle de sa réintégration est parvenue à Amnesty International le 17 janvier.

« Sept mois après que ces terribles découvertes ont été rendues publiques et que le président s’est engagé à ce qu’elles soient examinées, nous continuons à demander l’ouverture d’enquêtes indépendantes de toute urgence », a déclaré Salil Shetty.

« Les auteurs présumés des crimes décrits dans le rapport d’Amnesty International doivent répondre de leurs actes, quels que soient leur rang ou leurs fonctions. Ce n’est qu’à ce moment-là que justice pourra être rendue aux victimes et à leurs proches. »

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