Communiqué de presse

La réforme de la police, sous la responsabilité à la fois des forces de l’ordre et du peuple dominicain tout entier

Chiara Liguori, chercheuse sur la République dominicaine

Aujourd’hui, samedi 2 mars, la Journée nationale de la police nous donne l’occasion d’exprimer notre gratitude, mais aussi de réfléchir. Nous devons reconnaître le dévouement de la police et sa contribution à la sécurité publique. Nous devons également réfléchir au rôle de cette institution dans un État de droit.

En République dominicaine, les policiers doivent faire face à une criminalité qui semble toujours plus agressive. Dans le même temps, leur légitimité est faible et la population ne leur accorde qu’une confiance limitée. La Journée de la police est donc l’occasion de se poser plusieurs questions : quelles sont les difficultés que rencontre la police en République Dominicaine ? Pourquoi, à ce jour, la police dominicaine n’a-t-elle pas pu gagner la confiance de la population ? Quelles sont les mesures à prendre pour améliorer à la fois l’efficacité de la police et sa capacité à respecter les droits humains ?

Cette dernière année, la réflexion sur ces questions semble avoir progressé. La Journée de la police survient à un moment où le pays attend que les autorités publient une proposition de réforme de cette institution. Cela a été annoncé dans les médias. Le président Danilo Medina l’a confirmé aux délégués d’Amnesty International qui l’ont rencontré fin novembre.

La Commission de réforme de la police élabore actuellement un projet de loi portant sur cette institution, ainsi qu’un plan de réforme exhaustif de la police qui s’inscrit dans le contexte d’un plan national relatif à la sécurité publique.

La publication de ces propositions, imminente selon les dires du président dominicain lors de la Fête nationale de l’indépendance du pays, ne sera que le point de départ du chemin menant à une réforme. Il s’ensuivra un processus participatif qui permettra d’adopter un plan de réforme bénéficiant de l’appui des partis politiques, des organisations de la société civile, des forces de l’ordre et, surtout, du peuple dominicain.

Le Parlement jouera un rôle déterminant dans ce processus de réforme. Il faut s’assurer que le texte de loi adopté soit exemplaire et réponde aux besoins du pays. Les législateurs se devront d’ignorer les pressions politiques et les intérêts particuliers. Ce processus devra également exclure les politiques partisanes ou dépourvues de vision globale. La seule chose dont il faudra tenir compte, c’est le droit de toute personne à être protégée par la police en République dominicaine.

De même, pour que ce processus de réforme soit un succès, il est nécessaire que les autorités accordent à la société civile un espace de discussion suffisant, et que cette dernière sache le revendiquer. Les organisations de défense des droits humains connaissent très bien les difficultés rencontrées par la police, ainsi que ses pratiques abusives. Les spécialistes et les organisations de la société civile travaillant dans le domaine de la sécurité publique peuvent offrir des solutions concrètes afin que la police devienne réellement une institution au service des citoyens. Toutes ces voix doivent être entendues. Pour ce faire, il faut établir des mécanismes efficaces de consultation avec toutes les parties concernées.

Cependant, il est évident qu’une réforme véritablement complète de la police nationale ne peut aboutir sans le soutien de cette dernière. Les précédentes tentatives de réforme ont échoué du fait des résistances émanant de la police nationale et des pressions que ses plus hauts représentants ont exercées sur le Parlement. Cette fois, les choses doivent se dérouler autrement. Le processus de réforme doit être soutenu par la police, qui doit également y contribuer.

Les policiers de tous grades doivent comprendre qu’ils en seront les principaux bénéficiaires. Avec une réforme bien pensée et bien mise en œuvre, les policiers obtiendront de meilleures conditions de travail, leurs droits seront mieux protégés et ils se sentiront eux-mêmes plus en sécurité. Si la police est plus efficace et plus respectueuse des droits humains, la légitimité de cette institution s’en trouvera améliorée et tous ses membres y gagneront. Il est en effet injuste que des policiers, en tant que personne, pâtissent des dysfonctionnements d’une institution et de l’inertie des autorités.

Cette année, à l’occasion de la Journée de la police, il faut avant tout réfléchir à la responsabilité de tous les acteurs sociaux et institutionnels dans le processus de réforme de la police. Transformer la police nationale en une institution efficace et respectueuse des droits est l’affaire de tous les citoyens dominicains.

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