Campagne de persécution visant à effacer toute trace de dissidence

La condamnation du militant des droits humains Issa al Hamid à neuf ans de prison et à une interdiction de voyager de même durée témoigne de la détermination des autorités saoudiennes à poursuivre leur répression contre la société civile dans le royaume, a déclaré Amnesty International.

Issa al Hamid est un membre fondateur de l’Association saoudienne des droits civils et politiques (ACPRA), organisation indépendante qui défend les droits humains. La plupart de ses membres fondateurs purgent actuellement de lourdes peines de prison parce qu’ils militent pacifiquement en faveur des droits fondamentaux et appellent à la réforme.

« La volonté des autorités saoudiennes d’éradiquer tout vestige de dissidence se poursuit sans relâche avec la condamnation d’Issa al Hamid. C’est un militant courageux dont le seul " crime " est de promouvoir les droits humains dans le royaume, a déclaré James Lynch, directeur adjoint du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.

« Cette sentence adresse un message inquiétant, à savoir que le gouvernement saoudien ne fléchira pas dans son assaut contre la liberté d’expression, jusqu’à ce que la société civile assiégée ne montre plus aucun sursaut de vie. La condamnation d’Issa al Hamid doit être annulée immédiatement et il doit être remis en liberté, sans condition.  »

Il a été inculpé devant le Tribunal pénal spécial (SCC), tribunal antiterroriste qui siège dans le secret et dont les autorités se servent pour condamner des défenseurs des droits humains et des dissidents pacifiques à de lourdes peines de prison, à l’issue de procès iniques, bien souvent sous couvert de lutte contre le « terrorisme ».

Le tribunal l’a déclaré coupable de nombreux chefs d’inculpation – « incitation à troubler l’ordre public », « diffamation envers le Conseil des grands oulémas (docteurs de la foi) », « outrage à l’appareil judiciaire », « création d’une organisation non autorisée », communication de fausses informations visant à saper l’« image de l’État » et « violation de la Loi relative à la lutte contre la cybercriminalité » notamment.

Ces accusations sont en lien avec une série de déclarations et d’articles publiés en ligne dans lesquels il abordait différents sujets, notamment le droit de manifester, de demander au roi d’ordonner une enquête sur les atteintes aux droits humains par le ministère saoudien de l’Intérieur et le harcèlement des familles de prisonniers politiques par le même ministère.
Les deux frères d’Issa al Hamid, Abdullah al Hamid et Abdulrahman al Hamid, tous deux membres fondateurs de l’ACPRA, ont été pris pour cibles en raison de leur militantisme pacifique en faveur des droits humains.

Ils purgent respectivement des peines de 11 et neuf ans de prison. Abdullah al Hamid a été incarcéré en mars 2013 en même temps que Mohammad al Qahtani, également membre fondateur de l’ACPRA, lorsque les autorités ont ordonné la fermeture de l’association.

Parmi les autres membres de l’ACPRA déjà incarcérés figure un ancien juge de 80 ans, Sulaiman al Rashudi, qui a été arrêté et a commencé à purger sa peine de 15 ans de prison en 2012, deux jours après sa conférence sur la légalité des manifestations pacifiques dans la charia. Autres membres fondateurs de l’ACPRA incarcérés, Abdulkareem al Khoder, Fowzan al Harbi et Mohammed al Bajadi, qui a été récemment transféré vers un « centre de réinsertion » conçu pour les « terroristes », après avoir fini de purger sa peine de quatre ans d’emprisonnement.

« Les autorités saoudiennes semblent déterminées à faire taire les membres de l’ACPRA et les défenseurs des droits humains les uns après les autres, dans le cadre d’une campagne de persécution visant à effacer toute trace de dissidence, a déclaré James Lynch.

«  Cette politique de répression des militants pacifiques au nom de la lutte contre le terrorisme a pour objectif de terroriser et de sanctionner quiconque dénonce les violations des droits humains que les autorités cherchent à dissimuler aux yeux du monde. »

Tout comme Issa al Hamid, de nombreux membres de l’ACPRA et défenseurs des droits humains sont condamnés entre autres pour création d’« organisations non autorisées ». Or, pendant sept années, les autorités n’ont pas promulgué de loi sur les associations, lors même que le Conseil consultatif avait validé un projet de loi en 2008.

En novembre 2015, les autorités saoudiennes ont fini par adopter une nouvelle loi sur les associations, largement inspirée du projet de loi de 2008. Cependant, le nouveau texte est encore plus restrictif, car il accorde au ministère des Affaires sociales de vastes pouvoirs discrétionnaires : il peut notamment refuser d’enregistrer de nouvelles organisations et dissoudre toute association considérée comme « portant atteinte à l’unité nationale ». Toutes les références aux « organisations de défense des droits humains » qui figuraient dans le projet de loi de 2008 ont été supprimées.

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