BULGARIE : Les personnes souffrant d’un handicap mental soustraites aux regards de la société

Index AI : EUR 15/017/02

Sofia — Malgré les améliorations constatées dans certains établissements en Bulgarie, les personnes souffrant d’un handicap mental sont réduites dans ce pays à un sort misérable, indigne d’êtres humains, a déclaré Irene Khan, secrétaire générale d’Amnesty International.

La secrétaire générale rendait public le nouveau rapport de l’organisation sur le système de prise en charge des personnes souffrant d’un handicap mental en Bulgarie, à l’occasion de la Journée mondiale de la santé mentale. Elle a poursuivi en ces termes : " Le traitement réservé en Bulgarie aux personnes souffrant d’un handicap mental présente des caractéristiques frappantes ; on constate en particulier que ces personnes, en règle générale, ne bénéficient pas d’évaluations, de thérapeutiques et de mesures de réadaptation dont seraient chargés des thérapeutes, des psychologues et des médecins. Il faut améliorer la situation révoltante des pensionnaires des foyers, car la vie même de certains de ces enfants, de ces femmes et de ces hommes en dépend peut-être ".

Quant à Krassimir Kanev, directeur du Comité Helsinki de Bulgarie, il s’est exprimé en ces termes : " Si l’on examine les conditions matérielles et morales de détention dans les établissements psychiatriques en Bulgarie, ce sont là les pires lieux d’internement forcé que nous ayons vus dans ce pays. Il n’existe en Bulgarie aucune prison où la situation soit aussi mauvaise que dans le meilleur des foyers sociaux pour adultes ".

Des enfants continuent d’être placés dans des foyers sur la base de diagnostics peu rigoureux et sans perspective de suivi ou de réévaluation. Bien que, dans certaines institutions, les conditions matérielles se soient améliorées de façon significative, les enfants de ces foyers ne bénéficient toujours ni de soins médicaux appropriés ni de mesures de réadaptation efficaces. Ceux qui sont atteints de handicaps lourds passent parfois la journée au lit, sans jouets, ni activités organisées, ni stimulation visuelle. Amnesty International a constaté que lorsque ces enfants atteignaient l’âge adulte ils étaient absolument incapables de communiquer avec autrui ou d’effectuer la moindre activité de manière indépendante. Ils se retrouvent internés à vie.

" Si un traitement actif et approprié ne leur est pas appliqué rapidement, ces enfants risquent d’être lésés de façon grave et définitive, et condamnés à passer le reste de leur vie dans des foyers sociaux ", a souligné Irene Khan.

Les conditions matérielles dans les foyers pour adultes sont souvent cruelles, inhumaines et dégradantes. Les personnes souffrant d’un handicap mental sont souvent hébergées dans des bâtiments délabrés, où les murs, la literie et le sol sont parfois souillés d’excréments.

Selon le rapport, la mortalité élevée – due notamment à la pneumonie, à l’hypothermie et à la malnutrition – témoigne de l’insuffisance des soins médicaux, du chauffage et de l’alimentation dans de nombreux établissements bulgares.

" Certes, le gouvernement bulgare a essayé d’apporter des améliorations dans certains foyers sociaux, mais il doit absolument entreprendre une réforme globale de ses services de soins psychiatriques et d’assistance sociale, a affirmé Irene Khan. La communauté internationale doit fournir le soutien nécessaire à une mise en œuvre effective du programme. "

À l’approche de l’hiver, la secrétaire générale d’Amnesty International a exhorté le gouvernement bulgare à prendre des mesures urgentes et a demandé à tous ceux qui sont sensibilisés à cette question de s’associer à l’effort de l’organisation de défense des droits humains au moment où commence la campagne pour protéger les droits des personnes souffrant d’un handicap mental.

" Notre campagne a pour but de protéger les droits des personnes internées dans des établissements d’État, qu’il s’agisse d’hôpitaux psychiatriques ou de foyers sociaux ; nous entendons faire en sorte que leurs droits humains fondamentaux soient respectés sans discrimination, qu’ils puissent vivre dans la dignité, développer pleinement leurs potentialités et s’intégrer sans restriction dans la collectivité ", a déclaré Irene Khan.

Complément d’information
Le rapport d’Amnesty International intitulé Bulgaria : Far from the eyes of society. Systematic discrimination against people with mental disabilities [Bulgarie. Loin du regard de la société. Discrimination systématique envers les personnes souffrant d’un handicap mental] insiste sur les violations des droits fondamentaux des personnes soignées contre leur gré dans des hôpitaux psychiatriques, ou placées dans des foyers sociaux pour enfants ou pour adultes souffrant d’un handicap mental.
Présenté lors du forum international sur la discrimination envers les personnes souffrant d’un handicap mental organisé conjointement par Amnesty International et le Comité Helsinki de Bulgarie, le rapport conclut que les personnes souffrant d’un handicap mental sont victimes d’une discrimination systématique. Cette discrimination résulte de réglementations et de procédures qui ne sont pas conformes aux normes internationales, de pratiques telles que l’isolement ou de l’absence d’efforts de réadaptation.

Depuis de nombreuses années, Amnesty International fait campagne contre les conditions d’incarcération des prisonniers, qu’ils soient politiques ou de droit commun, lorsqu’elles sont assimilables à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ce rapport dénonce les violations des droits civils et politiques des personnes souffrant d’un handicap mental, qui sont la conséquence de lois inadaptées, de conditions de vie révoltantes, de l’absence de traitement médical et de thérapeutiques de réadaptation, de l’utilisation inconsidérée de la contention et de l’isolement, et de l’absence de réponse aux allégations de mauvais traitements.

Seule la version abrégée (n° d’index : EUR 15/008/02) du rapport intitulé Bulgaria : Far from the eyes of society. Systematic discrimination against people with mental disabilities (EUR 15/005/2002) a été traduite en français.

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