Agression d’un jeune Rom : les autorités doivent enquêter

L’agression a eu lieu après que Mitko a dit à son interlocuteur qu’ils étaient égaux malgré leurs origines ethniques différentes. La scène a été filmée par l’agresseur lui-même, et la vidéo, sur laquelle on entend en outre des propos racistes, a été largement diffusée sur les plateformes de médias sociaux.

Vendredi 22 avril, Amnesty International a appelé les autorités bulgares à respecter leur obligation de mener sans délai une enquête rigoureuse sur l’infraction à caractère raciste qui aurait été commise à l’encontre de l’adolescent rom. Les autorités doivent veiller en particulier à ce que les efforts nécessaires soient déployés pour mettre au jour tout mobile discriminatoire pouvant être associé à cette agression physique.

D’après les informations dont dispose Amnesty International, les autorités ont arrêté le 19 avril un homme soupçonné d’être à l’origine de cette agression. Amnesty International suivra l’évolution de l’enquête pour veiller à ce que le responsable de l’agression de Mitko soit déféré à la justice.

Il faut que les autorités examinent les motivations à l’origine des crimes haineux et qu’elles les condamnent publiquement. Cela contribuera non seulement à prévenir ce genre de crimes, mais aussi à lutter de manière plus générale contre la discrimination.

Complément d’information

La Cour européenne des droits de l’homme a souligné à plusieurs reprises que les autorités avaient l’obligation de mener une enquête rapide, efficace, adéquate et rigoureuse sur les infractions perpétrées par des particuliers qui violent le droit à la vie ou le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants (articles 2 et 3 de la Convention européenne des droits de l’homme). La Cour a observé des violations de la Convention européenne dans des affaires où les autorités n’avaient pas mis au jour les motivations racistes de meurtres ou d’agressions physiques ayant provoqué des blessures.

En février 2015, dans le rapport Missing the point : Lack of adequate investigation of hate crimes in Bulgaria, Amnesty International a exprimé des inquiétudes quant au fait que les enquêtes menées par les autorités bulgares sur les crimes haineux n’étaient pas satisfaisantes, à l’instar des poursuites engagées contre les auteurs de ces crimes, car les autorités ne tenaient pas compte des motifs discriminatoires sous-jacents à ces crimes comme elles sont supposées le faire.

La législation bulgare prévoit que les infractions à caractère raciste ou xénophobe doivent être considérées comme des crimes haineux et faire l’objet d’enquêtes et de poursuites judiciaires en tant que tels. Cependant, les autorités ne respectent pas cette pratique. Aux termes du droit pénal bulgare, les motifs discriminatoires sont un élément constitutif de certains crimes que le Code pénal nomme « crimes contre l’égalité nationale et raciale » et « crimes contre les convictions religieuses ». Ces catégories de crimes incluent l’incitation à la haine et à la discrimination ainsi que les violences (causant des blessures superficielles ou ne provoquant aucune blessure) contre des personnes ou des biens pour des motifs liés à la couleur de la peau, l’origine ethnique et la nationalité (article 162) ; la participation à un groupe dont le but est d’attaquer des personnes ou des biens pour des motifs liés à la couleur de la peau, l’origine ethnique et la nationalité (article 163) ; l’incitation à la haine religieuse et à la profanation ou la détérioration de lieux de culte (article 164) ; et l’utilisation de la force ou de menaces dans le but d’entraver le droit d’exprimer ses convictions religieuses (article 165). Dans le cas de certains crimes (à savoir le meurtre et le fait d’infliger des blessures corporelles), un mobile raciste ou xénophobe est considéré comme une circonstance aggravante et donne lieu à une sanction plus lourde (articles 116.1.11 et 131.1.12 du Code pénal).

Dans la pratique, les recherches d’Amnesty International laissent à penser que les autorités ont tendance à enquêter sur les crimes racistes commis contre des minorités et à engager des poursuites contre les auteurs de tels crimes comme s’il s’agissait d’infractions motivées par le houliganisme plutôt que par le racisme ou la xénophobie, y compris dans des cas où de solides éléments mettent en évidence des motifs discriminatoires.

La Bulgarie doit combler ces lacunes et mettre en place des mesures pour que toutes les personnes dans le pays puissent jouir de leurs droits sans subir aucune forme de discrimination. De telles mesures doivent inclure, entre autres, l’adoption de lignes directrices donnant aux policiers des instructions pour mener des enquêtes sur les crimes à motivation raciste ou xénophobe et une formation continue sur la nature des crimes haineux et le rôle de la police dans la lutte contre la discrimination ; la mise en application des lignes directrices destinées au ministère public concernant les enquêtes sur les crimes inspirés par la haine ; et la collecte de données ventilées sur les signalements de crimes haineux, ainsi que sur les enquêtes, les poursuites judiciaires et les condamnations liées à ce genre de crimes.

Les recommandations adressées au gouvernement bulgare, au ministère public et aux autorités policières sont énumérées dans le rapport de février 2015.

Pour en savoir plus :

La vidéo de l’agression est téléchargeable à l’adresse suivante : https://www.dropbox.com/s/1usdkdte1qmp8q3/Roma incident_Bulgaria 2016_ENG subs updated.mp4.

Missing the point : Lack of adequate investigation of hate crimes in Bulgaria, Index AI : EUR 15/0001/2015, 9 février 2015,http://www.amnesty.be/IMG/pdf/bulga... https://www.amnesty.org/fr/documents/eur15/0001/2015/en/

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