Equateur - Rapport annuel 2022

République de l’Équateur
Chef de l’État et du gouvernement : Guillermo Alberto Santiago Lasso Mendoza

Des organisations ont signalé des dizaines de violations des droits humains commises au cours des manifestations massives qui ont eu lieu en juin dans tout le pays. Les forces de sécurité ont tué un manifestant à Puyo. Au moins 146 hommes privés de liberté ont été tués dans un contexte de crise du système carcéral. Les autorités n’ont pas établi la vérité sur les déversements de pétrole ni rendu justice et accordé réparation aux communautés autochtones affectées. L’avortement en cas de viol a été dépénalisé.

Contexte

Le président Guillermo Lasso, qui a vu sa cote de popularité passer sous les 20 % au cours de l’année, a déclaré l’état d’urgence à sept reprises en 2022, invoquant diverses raisons pour justifier ces mesures, notamment les risques en matière de sécurité liés à des groupes criminels organisés et aussi des violences commises dans le cadre de grèves nationales. Cette année encore, des manifestations massives ont eu lieu dans tout le pays.

Liberté d’expression et de réunion

Des populations autochtones ont commencé à manifester en juin pour dénoncer des problèmes socioenvironnementaux. Selon des organisations équatoriennes, la réaction des autorités face à ces manifestations a donné lieu à de nombreuses violations des droits humains, notamment des détentions arbitraires, un recours excessif à la force ainsi que des poursuites et des attaques contre des journalistes et des défenseur·e·s des droits humains. Au moins six personnes ont trouvé la mort dans le contexte de ces manifestations.

Droits des peuples autochtones

En janvier, le Tribunal constitutionnel a statué en faveur de la communauté autochtone a’i cofán de Sinangoe. Il a confirmé que l’État avait violé les droits de cette communauté à une consultation préalable, à la nature, à l’eau, à un environnement sain, à la culture et au territoire en attribuant 20 concessions minières sans son consentement et en traitant 32 autres demandes de concession affectant son territoire. Le tribunal a également reconnu le droit des A’i Cofán d’organiser leur propre sécurité pour protéger leur territoire et ordonné des mesures de réparation complètes pour la communauté. À la fin de l’année, les autorités n’avaient toujours pas appliqué cette décision.

Le 28 janvier, la rupture d’un oléoduc de l’entreprise privée OCP Ecuador a causé le déversement de près d’un million de litres de pétrole dans le bassin de la rivière Coca, en Amazonie, ce qui a affecté les populations autochtones et leur environnement. À la fin de l’année, les populations autochtones touchées par cette catastrophe et par un autre déversement de pétrole dans l’Amazone en avril 2020 n’avaient toujours pas obtenu vérité, justice et réparation.

Le 14 juin, les forces de sécurité ont arrêté Leónidas Iza, président de la Confédération des nationalités indigènes de l’Équateur (CONAIE), dans la province de Cotopaxi. Il a été détenu au secret et inculpé de « blocage des services publics », puis relâché le soir même. Les organisations de défense des droits humains ont estimé que sa détention était arbitraire et que les poursuites pénales engagées contre lui revenaient à ériger en infraction le fait de manifester. De plus, le rapporteur spécial des Nations unies sur l’indépendance des juges et des avocats a déclaré que le droit la défense de Leónidas Iza pouvait avoir été entravé.

Recours excessif à la force

Le 21 juin, les forces de sécurité ont réprimé une manifestation à Puyo, la capitale de la province de Pastaza, et tiré une grenade de gaz lacrymogène à bout portant sur B. G., un homme kichwa, qui est mort des suites de ses blessures.

En juin, le Comité des droits de l’enfant [ONU] s’est inquiété de voir les forces de sécurité recourir à la violence contre des mineur·e·s lors des manifestations. Le Comité a critiqué l’autorisation d’utiliser des munitions potentiellement meurtrières, telles que des plombs, ainsi que l’usage disproportionné et sans discernement de gaz lacrymogènes.

À la fin de l’année, le ministère public n’avait inculpé ou traduit en justice aucun responsable de l’application des lois pour les violations des droits humains commises lors des manifestations d’octobre 2019 et de juin 2022.

En novembre, le Tribunal constitutionnel a jugé que la proposition de réforme de la Constitution du président Guillermo Lasso visant à permettre aux forces armées de mener avec la police nationale, de façon permanente et complémentaire, des opérations conjointes de lutte contre le crime organisé devait être soumise à l’approbation de l’Assemblée nationale.

Droits des personnes détenues

En février, Guillermo Lasso a promulgué le décret no 355 et gracié ainsi quelque 3 000 personnes incarcérées afin de désengorger les prisons. Il a promis par ailleurs le recrutement de 1 400 gardien·ne·s supplémentaires et l’investissement de 125 millions de dollars des États-Unis dans le système carcéral à l’horizon 2025.

Le 9 mai, 44 prisonniers ont été tués et 10 autres blessés dans la prison de Santo Domingo de los Tsáchilas, sur fond de crise prolongée. Au moins 146 personnes ont été tuées dans les prisons du pays en 2022, selon le Comité permanent pour la défense des droits humains.

Droits des femmes

En avril, le président a promulgué une loi dépénalisant l’avortement en cas de viol. Le texte comprenait des conditions restrictives, n’autorisant notamment l’avortement que jusqu’à la 12e semaine de grossesse. En juillet, le Tribunal constitutionnel a modifié cette loi de manière à ce que l’autorisation des tutrices et tuteurs légaux ou de tiers ne soit plus exigée quand une fille ou une adolescente victime de viol voulait avoir accès à l’avortement.

Les autorités n’ont pas garanti l’accès à la justice et à des services de protection pour les réfugiées, notamment vénézuéliennes, victimes de violences liées au genre.

En septembre, le corps de l’avocate María Belén Bernal a été retrouvé ; elle avait disparu une dizaine de jours plus tôt, après s’être rendue à l’école de police de Quito, la capitale. Elle a été victime de féminicide.

Défenseur·e·s des droits humains

À la fin de l’année, les autorités n’avaient toujours pas conçu ni mis en œuvre de politique nationale pour la protection des défenseur·e·s des droits humains en danger.

Lutte contre la crise climatique

Le gouvernement n’avait pas annoncé de nouvelle contribution déterminée au niveau national (CDN) depuis 2019.

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