Rapport annuel 2018

Arménie

République d’Arménie
Chef de l’État : Serge Sarkissian
Chef du gouvernement : Karen Karapetian

Les responsables des violences policières commises lors de manifestations organisées en 2016 à Erevan, la capitale, n’avaient toujours pas eu à rendre de comptes. Le droit à un procès équitable n’a pas été respecté dans le cadre des procédures engagées contre plusieurs membres de l’opposition accusés de prise d’otages et de divers autres crimes violents. Une défenseure des droits humains faisait l’objet de poursuites pénales. De violents incidents ont émaillé les élections législatives ainsi que les élections municipales d’Erevan.

Contexte

Le 2 avril, le Parti républicain, au pouvoir, a obtenu la majorité aux élections législatives. Il s’agissait de la première consultation depuis le référendum constitutionnel de 2015, lors duquel les électeurs s’étaient prononcés en faveur de la transition d’un régime présidentiel à un système de république parlementaire. Selon des observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), ce scrutin aurait été entaché par des soupçons crédibles d’achats de vote et de pressions exercées sur des fonctionnaires et des salariés d’entreprises privées afin qu’ils votent pour la formation au pouvoir.
L’Arménie et l’UE ont signé en novembre un accord de partenariat complet et renforcé, forme de coopération moins contraignante que l’accord d’association rejeté en 2013 par l’Arménie, qui avait préféré adhérer à l’union douanière dirigée par la Russie.

Impunité

La police a eu recours à la force de manière excessive et injustifiée, en juillet 2016, à Erevan, face à des personnes qui manifestaient contre le gouvernement, pour la plupart pacifiquement. Des centaines de personnes ont été blessées ou arrêtées arbitrairement. Les responsables de ces actes n’ont pas eu véritablement à rendre de comptes. Des dizaines de manifestants ont fait l’objet de poursuites pénales car ils auraient, entre autres, porté atteinte à l’ordre public. L’information judiciaire ouverte sur les allégations d’abus de pouvoir de la part de policiers n’a débouché sur aucune inculpation pénale.

Procès inéquitables

Plusieurs membres du groupe d’opposition qui avait occupé un poste de police peu avant les manifestations de 2016 ont été jugés pour une série de crimes avec violence, et notamment pour prise d’otages et homicide sur la personne de policiers.
Plusieurs accusés ont affirmé avoir été frappés pendant leur détention. Leurs avocats ont indiqué qu’ils avaient eux-mêmes fait l’objet de pressions et d’actes de harcèlement visant à les empêcher de faire leur travail.
Arayik Papikyan, Mushegh Shushanyan, Nina Karapetyants et plusieurs autres avocats de la défense se sont plaints de l’attitude de l’administration dont dépendait le centre où étaient détenus leurs clients. Celle-ci les aurait empêchés de rendre visite aux accusés et de s’entretenir en privé avec eux. Elle leur aurait par ailleurs illégalement confisqué des éléments concernant l’affaire, qui auraient ensuite été détruits. Plusieurs d’entre eux ont également déploré les fouilles prolongées et intrusives auxquelles ils auraient été soumis à leur arrivée au tribunal. Les avocats qui refusaient de se soumettre à la fouille se sont vu refuser l’accès aux salles d’audience et ont fait l’objet de mesures disciplinaires de la part du barreau.
Les avocats de la défense ont également indiqué que, le 28 juin, cinq accusés avaient été évacués de force de la salle d’audience, conduits au sous-sol et frappés par plusieurs policiers, alors même que les débats se poursuivaient devant le tribunal. Les accusés présentaient des signes de mauvais traitements, dont des ecchymoses et des égratignures au visage et sur les jambes, qui ont fait l’objet d’un constat de la part du personnel médical pénitentiaire. La police a affirmé que les détenus s’étaient eux-mêmes infligé ces blessures, en se cognant délibérément la tête et en donnant des coups de pied contre les murs et les clôtures pour protester. L’enquête sur les allégations de violences et de harcèlement à l’égard des avocats se poursuivait à la fin de l’année.

Défenseures et défenseurs des droits humains

Les audiences ont commencé en janvier dans le cadre du procès de Marina Poghosyan, défenseure des droits humains et directrice de l’ONG Veles, connue pour ses dénonciations de la corruption au sein de l’appareil d’État et pour l’aide juridique qu’elle apporte aux victimes de violations des droits humains. Marina Poghosyan avait été inculpée en 2015 d’extorsion de fonds, après
avoir accusé d’anciens représentants du gouvernement d’avoir mis en place un circuit de blanchiment d’argent. Plusieurs défenseurs arméniens des droits humains considéraient que cette inculpation était liée à son action visant à dénoncer la corruption.
Le 30 avril, Marina Poghosyan a indiqué qu’un faux profil Facebook avait été créé à son nom et avait été utilisé pour envoyer à ses contacts des photos et des vidéos à caractère sexuel, destinées à la discréditer.

Liberté d’expression

Les élections législatives et les élections municipales d’Erevan, qui ont eu lieu respectivement en avril et en mai, ainsi que les campagnes électorales qui les ont précédées, ont été marquées par des violences isolées contre des journalistes et contre des personnes qui tentaient de dénoncer les irrégularités commises dans l’organisation du scrutin.
Le 2 avril, deux journalistes ont été agressés à Kond, un quartier d’Erevan, alors qu’ils enquêtaient sur des allégations d’achat de votes au bureau local de campagne du Parti républicain. Des sympathisants de ce parti ont confisqué le matériel vidéo d’une journaliste qui filmait des personnes sortant du bureau de campagne. Une enquête sur cet incident était en cours à la fin de l’année.

Droits économiques, sociaux et culturels

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale [ONU] s’est déclaré préoccupé par l’absence de données concernant l’exercice par les minorités, les réfugiés et les demandeurs d’asile de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il s’est également inquiété du manque d’informations disponibles concernant certaines minorités peu nombreuses, comme les Loms (également connus sous le nom de Boshas) ou les Molokans, et a demandé aux autorités de collecter des données sur les indicateurs économiques et sociaux, ventilées en fonction de l’appartenance ethnique, de la nationalité et du pays d’origine.

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