Rapport annuel 2018

Malaisie

Malaisie
Chef de l’État : Muhammad V
Chef du gouvernement : Najib Tun Razak

L’espace civique s’est encore réduit en raison de la répression persistante des droits civils et politiques. Le recours à des interdictions de sortie du territoire arbitraires et sans limitation de durée, dans le but de restreindre et de menacer le droit de circuler librement des défenseurs des droits humains, a augmenté. Des journalistes et des défenseurs des droits des populations autochtones ont été arrêtés et visés par des enquêtes pour avoir dénoncé des atteintes aux droits humains et fait campagne contre celles-ci.

LIBERTÉ D’EXPRESSION

Le gouvernement a continué de harceler, de placer en détention et de poursuivre en justice ses détracteurs en recourant à des lois restrictives, comme la Loi relative à la sédition et la Loi sur les communications et le multimédia. Plus de 60 personnes ont été arrêtées, inculpées ou emprisonnées au titre de divers textes de loi. Quatre personnes ont été inculpées et un homme a été déclaré coupable en vertu de l’article 233 de la Loi sur les communications et le multimédia, qui érige notamment en infraction l’« utilisation abusive des installations en réseau », pour avoir critiqué le gouvernement ou pour s’être exprimés de manière satirique à son égard.

DROIT DE CIRCULER LIBREMENT

En juillet, la Cour d’appel a jugé que le gouvernement avait toute latitude pour interdire à n’importe quel citoyen de se rendre à l’étranger sans avoir à se justifier [1]. Cette décision a favorisé les violations persistantes du droit de circuler librement et les atteintes au travail de défenseurs des droits humains, tels que le dessinateur de presse Zunar et le militant Hishamuddin Rais. Les autorités ont aussi interdit à plusieurs défenseurs des droits humains de venir en Malaisie. Le militant bangladais Adilur Rahman Khan [2] et le militant singapourien Han Hui Hui ont ainsi été expulsés après avoir tenté d’assister à des conférences sur les droits humains. Ces interdictions étaient arbitraires, entourées de secret et non susceptibles d’appel. Elles ont été prononcées sans préavis.

LIBERTÉ D’ASSOCIATION ET DE RÉUNION

Cette année encore, des défenseurs des droits humains et des parlementaires de l’opposition ont été jugés pour avoir participé à des manifestations pacifiques. En juillet, la haute cour de Kota Kinabalu a annulé la décision du tribunal de première instance d’acquitter la militante Jannie Lasimbang, poursuivie au titre de l’article 9 de la Loi de 2012 relative aux rassemblements pacifiques. Son procès était en cours à la fin de l’année. Des parlementaires et des militants ont été inculpés après avoir participé au rassemblement pacifique #KitaLawan (« Nous luttons ») ; il s’agissait notamment du député Sim Tze Tzin, de Maria Chin Abdullah, de Mandeep Singh et d’Adam Adli. Maria Chin Abdullah, Mandeep Singh et Sim Tze Tzin ont d’abord bénéficié d’un non-lieu, avant d’être de nouveau inculpés en octobre. En novembre, un tribunal de première instance a acquitté Adam Adli des charges retenues contre lui.

DROITS DES PEUPLES AUTOCHTONES

En janvier, à la suite de manifestations pacifiques contre des permis d’exploitation forestière délivrés par les autorités locales, 21 défenseurs indigènes des droits humains, appartenant au peuple temiar, dans l’État du Kelantan (nord du pays), ont été placés en détention. Deux journalistes ont aussi été arrêtés [3]. Tous ont été libérés dans les 48 heures, mais les droits des Temiars à disposer de leurs terres coutumières restaient menacés, car des activités d’exploitation forestière continuaient d’être menées sans le consentement préalable, libre et éclairé des populations. En août, 11 défenseurs autochtones des droits humains ont été arrêtés par la police dans l’État du Perak alors qu’ils manifestaient contre une compagnie d’exploitation forestière.

ARRESTATIONS ET DÉTENTIONS ARBITRAIRES

Des lois permettant le placement en détention sans inculpation ni jugement, telles que la Loi sur la prévention du terrorisme et la Loi sur les atteintes à la sécurité (Mesures spéciales), ont cette année encore été utilisées pour placer en détention, poursuivre en justice et emprisonner des personnes soupçonnées d’infractions liées à la sécurité. À la suite d’un vote du Parlement, la période maximale de détention de 28 jours prévue par la Loi sur les atteintes à la sécurité devait rester en vigueur pendant encore cinq ans à compter du 31 juillet.
Le 26 avril, la haute cour de Kuala-Lumpur a condamné Siti Noor Aishah à cinq ans de prison pour la possession de 12 livres, en vertu d’une disposition draconienne de la Loi sur les atteintes à la sécurité qui interdit la possession, la détention ou le contrôle de tout objet associé à un groupe terroriste ou à la commission d’un acte terroriste [4]. Les livres appartenant à Siti Noor Aishah n’avaient pas été interdits, ce qui renforçait les préoccupations liées à la nature arbitraire de cette loi et à la façon dont elle était appliquée.

POLICE ET FORCES DE SÉCURITÉ

L’impunité était toujours la règle pour les décès en détention et les recours excessifs à la force et aux armes à feu. Au moins cinq personnes sont mortes en détention au cours de l’année. Parmi elles, S. Balamurugan a, selon ses codétenus, été frappé par des policiers pendant son interrogatoire. Une magistrate avait auparavant ordonné qu’il soit libéré et qu’il bénéficie de soins médicaux. Aucune enquête de police n’a semble-t-il été menée sur les circonstances de sa mort.

PEINE DE MORT

La condamnation automatique à la peine de mort continuait de s’appliquer en cas d’infractions telles que le trafic de stupéfiants, le meurtre et l’utilisation d’une arme à feu dans l’intention de tuer ou de blesser dans certaines circonstances. Des exécutions ont encore eu lieu cette année et il n’existait toujours pas de procédure dûment établie pour informer des exécutions prévues [5]. En novembre, le Parlement a adopté une modification de la Loi relative aux drogues dangereuses qui donnait aux juges le pouvoir discrétionnaire d’appliquer ou non la peine de mort obligatoire lorsque l’accusé n’avait fait que transporter des stupéfiants pour le compte d’autrui et avait coopéré avec les forces de l’ordre en vue de « perturber les activités liées au trafic de stupéfiants ». Cette disposition prévoyait une peine obligatoire de 15 coups de fouet en remplacement de la peine capitale.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXUÉES

Les personnes LGBTI subissaient toujours des discriminations, en droit et en pratique. L’article 377A du Code pénal érigeait en infraction les relations sexuelles entre hommes adultes consentants. En juin, le ministère de la Santé a été critiqué à l’échelle locale et internationale à la suite de sa décision de lancer un concours de vidéos pour adolescents visant à « prévenir la confusion entre les genres », notamment pour les personnes « gays, lesbiennes, transgenres, travesties ou les garçons manqués ». Ce passage a par la suite été supprimé.

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

En juillet, l’Assemblée de l’État du Kelantan a approuvé des modifications de la Loi d’adoption de la procédure pénale islamique (2002) visant à autoriser la fustigation des criminels en public. Le Code pénal islamique de cet État ainsi que le Code pénal malaisien ne proposaient aucune définition adéquate de la torture et ne l’interdisaient pas.

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