Rapport annuel 2017

Croatie

République de Croatie
Chef de l’État : Kolinda Grabar-Kitarović
Chef du gouvernement : Andrej Plenković (a remplacé Tihomir Orešković en octobre, lequel avait remplacé Zoran Milanović en janvier)

La Croatie a connu une période d’instabilité politique à la suite du vote d’une motion de censure contre le nouveau gouvernement. Les conditions d’accueil des demandeurs d’asile ont généralement été satisfaisantes, sans qu’il existe toutefois de politique cohérente d’intégration sociale à long terme. Des membres de minorités ethniques ont continué d’être victimes de discrimination. Des atteintes à la liberté des médias ont été constatées. Le recours accru à une rhétorique nationaliste et à des discours de haine a contribué à l’augmentation de l’intolérance et de l’insécurité ethniques.

Contexte

Un nouveau gouvernement a été formé en janvier, deux mois après des élections législatives au terme desquelles aucun vainqueur ne s’était vraiment dégagé. Cette fragile coalition a volé en éclats en juin, entraînant le vote d’une motion de censure contre le gouvernement dirigé par Tihomir Orešković, ainsi que la dissolution du Parlement en juillet. À la suite de nouvelles élections organisées en septembre, le parti de centre droit HDZ, qui a obtenu 61 sièges sur 151, a mis en place une coalition avec de petits partis de centre droit et a formé un nouveau gouvernement dirigé par Andrej Plenković.

Réfugiés et demandeurs d’asile

La Croatie est demeurée un pays de transit pour les migrants et les réfugiés se dirigeant vers l’Europe occidentale. Tout en étant conscients qu’un nombre limité de personnes ont demandé l’asile en Croatie et y sont restées durant une longue période, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe ont déclaré que les conditions de vie dans les centres d’accueil étaient satisfaisantes. Ils ont également souligné que, si les réfugiés et les migrants avaient accès à des services tels qu’un soutien psychologique ou des cours de langues, ceux-ci étaient généralement proposés par des ONG. Des organisations de défense des droits humains ont mis en évidence des lacunes dans la législation en matière d’asile et d’immigration et dénoncé un projet de loi relative aux étrangers présenté par le gouvernement en mai, et qui était encore examiné par le Parlement en décembre. Ce texte comportait des dispositions érigeant en infraction l’aide sociale et humanitaire apportée aux migrants en situation irrégulière et prévoyait des mesures obligeant les migrants devant être expulsés à payer leur hébergement ainsi que le coût de leur expulsion.

En décembre, la Croatie avait accueilli 50 réfugiés, dont 30 Syriens venant de Turquie dans le cadre du programme de réinstallation de l’UE, ainsi que 10 demandeurs d’asile venant de Grèce et 10 autres d’Italie dans le cadre du programme de relocalisation de l’UE. La Croatie s’est engagée à accueillir un total de 1 600 réfugiés et demandeurs d’asile avant la fin 2017, au titre des programmes de réinstallation et de relocalisation de l’UE. Si les conditions d’accueil à l’arrivée dans le pays sont restées satisfaisantes, les autorités devaient encore mettre en œuvre une politique globale visant à garantir aux réfugiés et aux migrants une intégration sociale à long terme qui soit efficace.

Crimes de droit international

Le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie a fait part de ses préoccupations quant à la vitesse et à l’efficacité des poursuites menées par les tribunaux nationaux concernant les crimes perpétrés durant la guerre de 1992-1995. La loi portant sur le statut des civils victimes de la guerre, adoptée en 2015, a facilité l’accès d’une partie des victimes à des réparations et à des services essentiels. Néanmoins, un certain nombre de problèmes subsistaient car toutes les victimes, en particulier les membres de minorités ethniques, ne bénéficiaient pas d’un accès égal et effectif à la justice.

Pour la deuxième année consécutive, aucun progrès n’a été accompli concernant la recherche de la vérité sur le sort de 1 600 personnes disparues au cours de la guerre.

Discrimination

Les discriminations contre les membres de minorités ethniques et les Roms sont restées monnaie courante. Si le cadre législatif relatif à la prévention de la discrimination prévoyait une protection satisfaisante, il restait néanmoins très peu utilisé.

Discours de haine

La période d’instabilité politique du début de l’année a été accompagnée d’une montée de la rhétorique nationaliste et des propos haineux ciblant des groupes spécifiques, notamment les personnes d’origine serbe, les réfugiés et les migrants. Des organisations de la société civile ont constaté de plus en plus de cas dans lesquels les médias et certains représentants de l’État faisaient resurgir l’idéologie fasciste du passé en encourageant le recours à une iconographie provocante et en nourrissant plus généralement un sentiment anti-minorités.

Les incitations à la discrimination, voire à la violence, envers des minorités ont rarement fait l’objet d’enquêtes. En revanche, les tribunaux ont régulièrement engagé des poursuites pour diffamation et insulte à l’honneur et à la réputation. Ces infractions étaient considérées comme des infractions graves relevant du Code pénal. Dans ces circonstances, les journalistes demeuraient exposés à des poursuites.

Droits des minorités ethniques

Selon le HCR, environ 133 000 personnes d’origine serbe qui avaient fui la Croatie durant la guerre (soit plus de la moitié d’entre elles) avaient regagné le pays fin 2016. Le HCR a néanmoins exprimé des préoccupations quant aux obstacles auxquels se heurtent les Serbes qui tentent de récupérer leurs biens.

Le nombre de personnes issues de groupes ethniques minoritaires employées dans les services publics est resté en deçà des objectifs du pays. Les personnes d’origine serbe ont rencontré des obstacles majeurs à l’emploi, tant dans le secteur public que privé. Le droit de recourir à des langues et des écritures minoritaires n’était toujours pas respecté dans certaines villes et continuait d’être politisé.

Roms

Malgré les efforts des autorités pour améliorer l’intégration des Roms, ceux-ci ont continué de se heurter à des obstacles considérables qui les empêchaient d’avoir véritablement accès à l’éducation, à la santé, au logement et à l’emploi.

Le HCR a dénombré 2 800 Roms qui ne disposaient pas d’un permis de séjour permanent ou temporaire et risquaient donc de devenir apatrides. Les Roms ont par ailleurs rencontré des difficultés dans l’obtention de documents d’identité, ce qui limitait leur accès aux services publics.

Liberté d’expression – médias et journalistes

La liberté des médias a cette année encore été menacée de manière récurrente et des journalistes ont de nouveau fait l’objet d’attaques. En mars, le gouvernement a brutalement mis fin aux contrats de près de 70 rédacteurs en chef et journalistes travaillant pour la radiotélévision publique HRT. Ces licenciements ont été considérés comme une tentative d’influencer la ligne éditoriale du groupe. Dans le même temps, les autorités ont décidé de mettre fin aux subventions allouées aux petits médias sans but lucratif et aux initiatives culturelles indépendantes, mettant ainsi davantage en péril le pluralisme médiatique.

Dans le classement mondial de la liberté de la presse, la Croatie est passée de la 54e à la 63e place.

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