Rapport annuel 2017

Népal

République démocratique fédérale du Népal
Chef de l’État : Bidhya Devi Bhandari
Chef du gouvernement : Pushpa Kamal Dahal (a remplacé Khadga Prasad Sharma Oli en août)

Des dizaines de milliers de personnes restaient privées de certains de leurs droits fondamentaux, en particulier du droit à un logement convenable, depuis le tremblement de terre de 2015. Des groupes marginalisés se sont plaints du fait que les modifications apportées à la Constitution ne mettaient pas fin à toutes ses dispositions discriminatoires. Aucune enquête efficace n’a été menée sur le recours à la torture et à une force excessive ou injustifiée contre des manifestants de la région du Teraï. Peu de progrès ont été réalisés pour permettre que justice soit rendue dans les cas de graves violations des droits humains commises pendant le conflit armé. Des travailleurs migrants ont été exploités par des entreprises de travail temporaire en dépit de nouvelles mesures mises en place par le gouvernement pour réglementer le secteur. Les discriminations fondées sur le genre, la caste, la classe sociale, l’origine ethnique, l’orientation sexuelle, l’identité de genre et la religion persistaient. Les femmes et les filles n’étaient pas suffisamment protégées contre les violences liées au genre.

Droit à un logement convenable

Des centaines de milliers de personnes frappées par le tremblement de terre d’avril 2015 vivaient toujours dans des abris temporaires. L’Autorité nationale de reconstruction a commencé son travail en janvier et la reconstruction a officiellement débuté en avril. En décembre, des évaluations détaillées des dégâts dans le secteur du logement avaient été menées à terme pour 11 des 14 districts les plus touchés. La distribution de subventions devant permettre aux victimes de reconstruire leur logement ayant été retardée, les personnes concernées se préparaient à passer un autre hiver sans un abri décent et avec un accès réduit ou inexistant aux services de base. Le Premier ministre, Pushpa Kamal Dahal, a annoncé en septembre une augmentation du montant des subventions, qui devait ainsi passer d’environ 1 850 à 2 800 dollars des États-Unis. Cette augmentation a été approuvée par le gouvernement fin décembre.

En juillet, le Comité des droits de l’enfant [ONU] a fait part de ses inquiétudes quant aux conséquences du tremblement de terre sur les droits des enfants. Il s’est également dit préoccupé par le nombre de mineurs vivant dans des camps pour personnes déplacées ou dans des camps de fortune, sans bénéficier d’une alimentation suffisante ni d’un accès satisfaisant à l’eau potable, à des installations sanitaires, aux soins ou à l’éducation.

Recours excessif à la force

Aucune enquête efficace n’a été menée sur le recours à la torture et à une force excessive et injustifiée contre des manifestants de la région du Teraï. Des Madheshis et d’autres groupes marginalisés de la région du Teraï ont continué de protester contre la Constitution de 2015 et les modifications qui y ont été apportées en janvier et qui étaient, d’après eux, discriminatoires à leur égard et les privaient d’une représentation politique équitable. Des manifestants ont bloqué des postes-frontières entre le Népal et l’Inde, ce qui a entraîné de graves pénuries de carburant, de nourriture, de médicaments et de matériaux de construction.

En août, une commission officielle a été mise en place pour enquêter sur des atteintes aux droits humains, notamment sur des cas de recours à une force excessive par les forces de sécurité, commises dans la région du Teraï pendant ces manifestations. Vingt-sept hommes, quatre femmes et six enfants avaient été tués. Les travaux de cette commission n’ont cependant que très peu avancé.

Droits des travailleurs migrants

Le secteur du travail temporaire était toujours mal réglementé, ce qui a donné lieu à des violations généralisées des droits des migrants. Soumis à des frais d’embauche exorbitants, les Népalais travaillant à l’étranger risquaient de se retrouver dans des situations de servitude pour dettes et étaient exposés au trafic de main-d’œuvre et au travail forcé. Les violences contre les migrants népalais dans les pays d’accueil étaient facilitées par les législations restrictives en matière de migration de la main-d’œuvre, d’une part, et par la mauvaise application des lois, d’autre part. Des agents locaux ou des agences privées n’ont que très rarement fait l’objet d’enquêtes ou de poursuites pour ces atteintes.

Les lois et politiques en matière de migration de la main-d’œuvre étaient inefficaces et peu d’améliorations des mécanismes de protection des travailleurs migrants ont été constatées. Le système gouvernemental visant à ce que les personnes n’aient pas à payer de frais pour être recrutées a été un échec en raison d’une mise en œuvre et d’un suivi insuffisants.

Du fait des limites d’âge imposées aux travailleuses migrantes, les femmes se tournaient souvent vers des réseaux informels pour trouver un emploi à l’étranger, ce qui leur faisait courir le risque d’être victimes de la traite des êtres humains.

Torture et autres mauvais traitements

Cette année encore, la police a eu recours à la torture, notamment pendant la détention provisoire à des fins d’intimidation et pour extorquer des « aveux ».

Le projet de loi intitulé Torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants (contrôle) a été mis à l’ordre du jour des débats du Parlement en septembre, mais il n’avait pas été adopté à la fin de l’année. Il contenait des dispositions qui n’étaient pas conformes aux normes internationales en matière de droits humains, notamment une définition excessivement limitée de la torture et un délai maximal de 90 jours pour déposer une plainte.

En vertu du principe de compétence universelle, Kumar Lama, colonel dans l’armée népalaise, a été jugé devant un tribunal britannique en février pour deux chefs d’accusation liés à des actes de torture commis au Népal. Il a été déclaré non coupable de l’une des charges en juillet avant d’être libéré en septembre, l’accusation ayant décidé de ne pas demander un nouveau procès pour le second chef car le jury n’avait pas été en mesure de parvenir à une décision.

Impunité

En mai, le Parti communiste népalais (Union marxiste-léniniste), au pouvoir, et le Parti communiste du Népal (centre maoïste) se sont entendus pour accorder une amnistie aux auteurs de violations des droits humains commises pendant le conflit. En juillet, le Parti communiste du Népal (centre maoïste) et le Parti du Congrès népalais sont parvenus à un accord pour former un gouvernement de coalition, à la condition que la Commission vérité et réconciliation et la Commission d’enquête sur les victimes de disparition forcée se concentrent sur la réconciliation et l’indemnisation et non sur les poursuites pénales pour des violations des droits humains passées.

La Loi de 2014 sur la Commission vérité et réconciliation était formulée de telle sorte qu’elle permettait de prononcer des amnisties pour des crimes graves relevant du droit international, et ce en dépit d’une décision de la Cour suprême de 2015 s’opposant à ces dispositions. Le gouvernement n’a pas modifié la loi. La Commission vérité et réconciliation et la Commission d’enquête sur les victimes de disparition forcée ont commencé à recueillir des plaintes mi-avril, soit 14 mois après leur mise en place. Des représentants des deux commissions ont fait part de leurs inquiétudes quant aux retards et au manque de coopération du gouvernement, à l’insuffisance des moyens et aux délais bien trop courts pour déposer une plainte.

Liberté d’expression

En avril, alors que Khadga Prasad Sharma Oli était encore en poste, le bureau du Premier ministre a convoqué des membres de la Commission nationale des droits humains pour les interroger à propos d’une déclaration de la Commission lors de l’Examen périodique universel du Népal devant les Nations unies.

En mai, la Commission d’enquête sur les abus d’autorité a arrêté Kanak Dixit, journaliste et militant, pour corruption. Dix jours plus tard, la Cour suprême a statué que le maintien de cet homme en détention était illégal et a ordonné qu’il soit libéré. Kanak Dixit a déclaré que son arrestation visait à l’empêcher d’exprimer ses opinions critiques. Le même mois, Robert Penner, un ressortissant canadien vivant au Népal, a été arrêté et expulsé pour incitation à la « discorde sociale » sur les réseaux sociaux. Plusieurs militants, dont le militant madheshi Chandra Kant Raut, ont été inculpés au cours de l’année de multiples charges de sédition pour avoir exprimé pacifiquement leurs opinions politiques.

Discrimination

Les discriminations fondées sur le genre, la caste, la classe sociale, l’origine ethnique, l’orientation sexuelle, l’identité de genre et la religion persistaient. Les modifications apportées à la Constitution n’ont pas permis aux femmes de bénéficier des mêmes droits que les hommes en matière de citoyenneté ; elles n’ont pas non plus apporté de protection contre la discrimination aux groupes marginalisés, notamment les dalits et les personnes LGBTI.

La loi érigeant le viol en infraction a été modifiée pour augmenter le délai de prescription de 35 jours à 180 jours, au lieu de le supprimer purement et simplement comme l’exigent les normes relatives aux droits humains. La discrimination fondée sur le genre entravait toujours la capacité des femmes et des jeunes filles à contrôler elles-mêmes leur sexualité et à faire des choix éclairés en matière de procréation, à refuser les mariages précoces et forcés, et à recevoir les soins prénatals et de santé maternelle appropriés. Elles restaient exposées aux violences familiales, comme le viol conjugal. Les femmes appartenant à des groupes marginalisés, notamment les dalits et les populations autochtones, étaient particulièrement vulnérables aux discriminations croisées.

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