Rapport annuel 2017

Sierra Leone

République de Sierra Leone
Chef de l’État et du gouvernement : Ernest Bai Koroma

La Sierra Leone a accepté de devenir partie à plusieurs traités internationaux relatifs aux droits humains, mais a rejeté un certain nombre de recommandations formulées dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU) des Nations unies. Cette année encore, la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association a fait l’objet de restrictions injustifiées. Les violences contre les femmes et les filles étaient très répandues et des jeunes filles enceintes ont été exclues de leur école et n’ont pas pu passer leurs examens. Des conflits fonciers ont donné lieu à des tensions grandissantes.

Surveillance internationale

Après avoir été soumise à son deuxième EPU en avril, la Sierra Leone a accepté 177 des 208 recommandations qui lui ont été faites. Le pays a notamment accepté de ratifier des traités internationaux relatifs aux droits humains ou d’y adhérer, comme les Protocoles facultatifs au PIDCP, au PIDESC, à la Convention contre la torture et à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. La Sierra Leone a consenti à abroger ou modifier des lois utilisées pour restreindre la liberté d’expression et d’association, mais a refusé de légiférer pour interdire les mutilations génitales féminines, d’autoriser les jeunes filles enceintes à aller à l’école ou de garantir les droits fondamentaux des personnes LGBTI. En septembre, le pays a fait l’objet d’un examen par le Comité des droits de l’enfant de l’ONU, qui lui a adressé plusieurs recommandations portant sur la lutte contre l’exploitation sexuelle et les mutilations génitales féminines.

Liberté d’expression, de réunion et d’association

Cette année encore, la liberté d’expression, de réunion et d’association a fait l’objet de restrictions injustifiées.

Le 27 avril, jour de la fête de l’indépendance, 29 personnes ont été arrêtées et placées en détention pour plus d’une semaine après un défilé organisé par le Parti du peuple de Sierra Leone (SLPP), qui appartient à l’opposition. La police a affirmé que le défilé n’avait pas été autorisé et a fait usage de gaz lacrymogène pour mettre fin à la manifestation. Plusieurs personnes ont été blessées, notamment Lulu Sheriff, cheffe de file des femmes du parti. En août, six des 29 personnes arrêtées ont été condamnées à six mois de prison et une autre à neuf mois, notamment pour défilé illégal et comportement séditieux. Toutes ont fait appel de leur condamnation. Le procès des 22 personnes restantes était toujours en cours.

Le procès de 15 membres du SLPP et d’un haut responsable de la Commission des droits humains, qui avaient été arrêtés dans la ville de Kenema le jour de la fête de l’indépendance, en 2015, à l’issue d’une manifestation, n’était pas terminé à la fin de l’année 2016.

En juillet, la police a refusé d’autoriser des groupes de femmes à se rassembler devant un centre de conférences de la capitale, Freetown, pendant le processus de révision constitutionnelle. Elles réclamaient une meilleure protection des droits relatifs au genre dans le projet de constitution.

Le 24 juillet, le journaliste Sam Lahai a été placé en détention pour deux jours par la police après avoir utilisé les réseaux sociaux pour remettre en question le rôle du vice-ministre de l’Intérieur. Il a été libéré sous caution après l’intervention de l’Association des journalistes de Sierra Leone, qui demandait depuis de nombreuses années une réforme de la législation restrictive en matière de diffamation.

En août, deux hommes ont été abattus et plusieurs personnes ont été blessées par la police à Kabala lors d’une manifestation contre l’annulation de l’ouverture d’un centre de formation pour jeunes. Un couvre-feu a été imposé après l’incendie de plusieurs bâtiments. Dix-sept personnes ont comparu devant la justice, notamment pour des faits d’incendie volontaire et de comportement séditieux. Le Bureau indépendant des plaintes contre la police, récemment créé, a lancé une enquête sur des allégations selon lesquelles la police aurait fait usage d’une force excessive. Les recommandations qu’il a adressées au substitut du Procureur général et à l’Inspecteur général de la police n’ont pas été rendues publiques.

Une réglementation sur la politique liée aux ONG a été proposée, avec des dispositions qui, selon des défenseurs des droits humains, restreindraient les activités de ces organisations.

Droits des femmes

Les cas de violence envers les femmes et les jeunes filles sont restés fréquents. Des organisations spécialisées venant en aide aux femmes et aux jeunes filles risquaient de devoir fermer en raison de contraintes budgétaires.

En mars, le président Ernest Bai Koroma a refusé de promulguer un texte législatif visant à légaliser l’avortement dans certains cas, alors qu’il avait été adopté deux fois par le Parlement.

Le taux de mutilations génitales féminines (MGF) était élevé en Sierra Leone. Pendant l’épidémie d’Ebola, les MGF ont été interdites et cette mesure n’avait pas été officiellement levée à la fin de l’année. Pourtant, il restait courant que des filles et des femmes soient victimes de mutilations génitales.

En septembre, une jeune femme âgée d’un peu moins de 30 ans a été mutilée et enfermée dans une maison pendant quatre jours à Kenema. Elle a été secourue par la police et a décidé de vivre cachée. La femme accusée d’avoir procédé à la mutilation a été placée en détention par la police, avant d’être libérée à la suite d’une manifestation organisée devant le commissariat par plusieurs personnes pratiquant des MGF.

Droit à l’éducation

Les jeunes filles enceintes ont reçu l’interdiction de fréquenter les établissements scolaires classiques et de passer leurs examens, en violation de leurs droits à l’éducation et à la non-discrimination. La seule possibilité pour elles de poursuivre leurs études était de participer à un « programme alternatif d’éducation temporaire », proposant un enseignement restreint. Ce programme temporaire a pris fin en août, mais un nouveau programme devait lui succéder. Après la naissance de leur enfant, nombre de ces jeunes filles n’avaient pas les moyens de s’acquitter des frais de scolarité et ne pouvaient donc pas reprendre leurs études.

En septembre, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU a vivement engagé la Sierra Leone à lever immédiatement l’interdiction discriminatoire, pour les jeunes filles enceintes, d’être scolarisée dans des établissements scolaires classiques et de passer leurs examens, et à veiller à ce que les mères adolescentes bénéficient d’un soutien leur permettant de poursuivre une scolarité normale.

Conflits fonciers

Les problèmes fonciers ont donné lieu à des tensions croissantes. En février, six personnes ont été condamnées à six mois de prison ou à des amendes pour avoir détruit des palmiers à huile lors de manifestations qui avaient eu lieu en 2013 dans le district de Pujehun pour protester contre un projet de production d’huile de palme piloté par Socfin. Des propriétaires terriens affirmaient qu’ils n’avaient pas donné leur accord pour l’achat de leurs terres.

En février, la Haute Cour a ordonné à une entreprise chinoise, Orient Agriculture Limited, de rendre un peu plus de 600 hectares de terres à environ 70 familles de la chefferie de Nimiyama, dans le district de Kono. En 2013, la société avait signé, avec le chef traditionnel souverain et les dirigeants locaux, un accord qui l’autorisait à acheter des terres à bas prix sans que les propriétaires ne soient mis au courant.

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