Rapport annuel 2017

Congo

République du Congo
Chef de l’État et du gouvernement : Denis Sassou-Nguesso

L’élection présidentielle s’est déroulée dans un climat de violence et de polémique. Des opposants politiques ont été placés en détention pour avoir critiqué pacifiquement le déroulement du scrutin. Les forces de sécurité ont eu recours à une force excessive et parfois à la torture pour réfréner la dissidence. Une nouvelle loi restreignant encore davantage l’espace dont disposaient les organisations de la société civile a été adoptée.

Contexte

Au moment de l’élection présidentielle, le 20 mars, les moyens de communication (téléphone et Internet) ont été totalement coupés. Denis Sassou-Nguesso a été réélu président.

Aucun représentant d’Amnesty International n’a été autorisé à entrer sur le territoire afin de suivre la situation des droits humains avant le scrutin.

Liberté d’expression et de réunion

Après l’annonce des résultats de l’élection présidentielle, que l’opposition a contestés, les autorités ont arrêté plusieurs personnalités de premier plan de l’opposition, y compris les responsables de campagne des candidats Jean-Marie Michel Mokoko et André Okombi Salissa, les accusant de compromettre la sécurité nationale. Parmi les personnes arrêtées qui étaient toujours maintenues en détention à la fin de l’année se trouvaient Jean Ngouabi, Anatole Limbongo-Ngoka, Marcel Mpika, Jacques Banangazala et Roland Ngambou.

Entre le 4 avril et le 14 juin, Jean-Marie Michel Mokoko a été assigné à domicile de fait, les forces de sécurité étant postées autour de chez lui sans autorisation judiciaire. Il a été arrêté le 14 juin. Inculpé d’« atteinte à la sûreté intérieure de l’État » et de « détention illégale d’armes et munitions de guerre », il a été placé en détention à la maison d’arrêt de Brazzaville, principale prison de la capitale. Il a ensuite été inculpé d’« incitation aux troubles à l’ordre public ». André Okombi Salissa a, semble-t-il, fui le pays en juin, à la suite d’une descente effectuée par les forces de sécurité à son domicile.

Plusieurs personnalités politiques de premier plan, parmi lesquelles Paulin Makaya, dirigeant du parti d’opposition Unis pour le Congo, et Rigobert Okouya, du groupe politique Convention d’action pour la démocratie et le développement (CADD), étaient toujours détenues. Ces personnes avaient été arrêtées en novembre 2015 pour avoir protesté contre la modification de la Constitution. Le 25 juillet, Paulin Makaya a été condamné à deux ans d’emprisonnement et à une amende équivalente à 3 800 euros pour avoir participé à une manifestation non autorisée. Le recours qu’il a formé le jour même a été examiné le 6 décembre, soit plus de quatre mois plus tard, bien que le délai maximal prévu par la loi ait expiré et qu’un rappel ait été envoyé aux autorités compétentes. L’examen de son recours a été reporté deux fois et aucune décision n’avait encore été prise à la fin de l’année. Il demeurait un prisonnier d’opinion.

Selon la plateforme d’opposition composée de l’Initiative pour la démocratie au Congo et du Front républicain pour le respect de l’ordre constitutionnel et l’alternance démocratique (IDC-FROCAD), 121 prisonniers politiques étaient toujours détenus à la maison d’arrêt de Brazzaville.

Le 9 novembre, les autorités ont interdit un sit-in que le mouvement de jeunes Ras-le-bol souhaitait organiser à Brazzaville. L’IDC-FROCAD a signalé que plusieurs manifestations avaient été interdites, en général au motif qu’elles risquaient de troubler l’ordre public. La plateforme d’opposition a également indiqué que les documents interdisant ces manifestations faisaient référence aux violences qui avaient éclaté à Brazzaville à la suite de l’élection, en avril.

Recours excessif à la force

Le 5 avril, les forces de sécurité ont procédé à des frappes aériennes sur des zones résidentielles du département du Pool, dans le sud-est du pays. Des hélicoptères ont largué au moins 30 bombes sur des quartiers d’habitations. Une école a été touchée dans la localité de Vindza alors que la cible était l’ancien domicile du pasteur Frédéric Bitsangou (alias Ntoumi), chef du groupe armé des « Ninjas ». Selon des représentants du département du Pool, jusqu’à 5 000 personnes ont été déplacées. Ces frappes aériennes faisaient suite à une flambée de violence survenue à Brazzaville après que la Cour constitutionnelle a validé les résultats de l’élection présidentielle, le 4 avril. Des tirs ont été échangés dans les rues ; des jeunes gens ont dressé des barricades à Makélékélé, un quartier du sud de la ville ; le bureau d’un maire et deux postes de police ont été incendiés et des hommes armés ont attaqué une caserne militaire. Les pouvoirs publics ont imputé ces violences aux « Ninjas ».

Le 29 avril, une mission composée de policiers, de journalistes et de représentants d’organisations de la société civile et chargée d’évaluer les conditions de sécurité dans le département du Pool et d’enquêter sur les bombardements a été mise en place. Elle n’avait pas encore publié de rapport officiel à la fin de l’année.

D’autres frappes aériennes ont été menées dans le Pool en septembre. Les informations à ce sujet étaient limitées compte tenu des difficultés extrêmes d’accès à la zone, notamment en raison de restrictions imposées par l’État.

Torture et autres mauvais traitements

Le 29 septembre, Augustin Kala Kala, coordinateur national adjoint de la CADD, a été enlevé par des membres des forces de sécurité chargées de la protection présidentielle dans le quartier Sadelmy, à Brazzaville. Il a indiqué qu’il avait été menotté aux poignets et aux chevilles et qu’on lui avait administré des décharges électriques et provoqué des brûlures à plusieurs reprises en lui plaçant des sacs en plastique sur le dos et les mains. Il a également dit avoir été frappé avec des bâtons et une ceinture, et avoir passé neuf jours dans un conteneur. Il a été libéré le 13 octobre et déposé près de la morgue d’un hôpital de Brazzaville. Ses allégations n’ont fait l’objet d’aucune enquête.

Évolutions législatives, constitutionnelles ou institutionnelles

Une proposition de loi déterminant le régime des associations a été adoptée par le Sénat en septembre et devait encore être promulguée par le président de la République. Des organisations de la société civile ont dénoncé le fait que ce texte avait été élaboré sans véritable concertation et qu’il limitait la liberté d’association de plusieurs manières, notamment en érigeant en infractions les activités considérées comme une menace pour la stabilité des institutions, en empêchant les organisations religieuses d’aborder des questions politiques et en obligeant les associations à obtenir l’approbation des autorités pour mener leurs activités.

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