Communiqué de presse

République dominicaine. Le gouvernement fait preuve de mépris pour le droit international

La réaction de la République dominicaine au jugement rendu par la Cour interaméricaine des droits de l’homme sur les atteintes aux droits humains infligées à des migrants haïtiens et à des Dominicains ayant des origines haïtiennes traduit un mépris consternant envers le droit international et les responsabilités du pays sur le plan juridique, a déclaré Amnesty International.

La Cour interaméricaine des droits de l’homme a récemment rendu un jugement engageant la République dominicaine à fournir réparation pour les atteintes aux droits humains infligées à des Dominicains ayant des origines haïtiennes et à des Haïtiens illégalement expulsés du territoire, privés de papiers d’identité et arbitrairement déchus de la nationalité dominicaine, entre autres. Jeudi 23 octobre, cependant, le gouvernement a officiellement rejeté le jugement prononcé par la juridiction régionale, le tenant pour « déplacé, partial et inopportun ».

«  En rejetant la décision de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, le gouvernement dominicain fait preuve de dédain envers le droit international. La Cour a estimé que de graves atteintes aux droits humains avaient été commises. La République dominicaine ne peut pas se contenter d’écarter ce jugement uniquement parce que le résultat ne lui plaît pas  », a déclaré Chiara Liguori, spécialiste des Caraïbes au sein d’Amnesty International.

« En janvier 2014, le président Danilo Medina a affirmé qu’il “n’accepterait pas que les droits de quiconque soient bafoués”. C’est le moment de mettre ces paroles en pratique.  »

La décision de la Cour intéraméricaine va dans le sens des recherches menées précédemment par Amnesty International. L’organisation a rassemblé des informations sur un ensemble de discriminations visant les Dominicains ayant des origines haïtiennes, notamment en matière d’accès aux documents d’identité. Cette discrimination déjà bien établie a été exacerbée en septembre 2013, à la suite d’une décision de la Cour constitutionnelle qui a rendu apatrides des milliers de personnes d’origine étrangère.

La Cour interaméricaine a estimé qu’avec la décision de septembre 2013 l’État dominicain avait négligé de prendre des mesures concrètes pour respecter les droits à la nationalité, à l’identité et à la protection judiciaire. La Cour interaméricaine a ordonné à l’État de revenir sur la décision de la Cour constitutionnelle et d’adopter toutes les mesures législatives, voire, si nécessaire, constitutionnelles, requises afin d’établir une procédure simple, accessible et conforme au droit international relatif aux droits humains pour l’enregistrement des naissances.

En mai 2014, le Congrès dominicain a approuvé à l’unanimité la loi 169/14. Cette loi créait deux catégories de personnes : celles qui, à un moment donné, avaient été inscrites à l’état civil en République dominicaine et celles dont la naissance n’avait jamais été déclarée.

Les personnes appartenant au premier groupe avaient la possibilité de récupérer la nationalité dominicaine grâce à une procédure rapide mais celles appartenant au second groupe ont été déclarées étrangères et ont dû suivre la procédure complète de demande de nationalité.

La Cour interaméricaine a considéré que les dispositions obligeant des Dominicains à se faire enregistrer en tant qu’étrangers étaient contraires au droit international relatif aux droits humains. La Cour a également signalé que le statut des parents migrants au regard de la loi sur l’immigration n’est pas transférable à l’enfant.

Amnesty International prie instamment la République dominicaine de se conformer dans les meilleurs délais et de manière efficace au jugement rendu par la Cour interaméricaine des droits de l’homme.

« Il est honteux que le gouvernement dominicain ait rejeté le jugement de la Cour avec tant de désinvolture. Si des mécanismes de protection des droits humains ont été instaurés aux niveaux régional et international, c’est justement pour garantir que les citoyens aient la possibilité de recourir à une instance supranationale lorsque, dans leur pays, ils ne parviennent pas à obtenir justice ou réparation pour les violations des droits humains qu’ils ont subies », a déclaré Chiara Liguori.

« La République dominicaine se trouve à la croisée des chemins. Va-t-elle continuer de faire subir des discriminations aux Haïtiens et aux Dominicains ayant des origines haïtiennes, ou va-t-elle prendre bonne note de ces remarques et adopter des mesures pour améliorer la vie de ces personnes vulnérables ? Ne pas respecter ce jugement menacerait les avancées réalisées ces dernières années dans certains domaines relatifs aux droits humains.  »

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