Pays-Bas, La police bafoue les droits des manifestants pacifiques

La surveillance illégale des manifestants pacifiques aux Pays-Bas sape le droit à la vie privée et a un effet dissuasif sur le droit de manifester, écrit Amnesty International Pays-Bas dans un rapport publié le 1er juin 2023.

Intitulé Unchecked power : ID  checks  and  collection  of  data  from peaceful protesters  in  the  Netherlands, ce rapport dévoile que la supervision et le contrôle des méthodes de surveillance de la police ne sont pas conformes à la législation néerlandaise ni aux normes internationales relatives aux droits humains.

« En demandant régulièrement à des manifestant·e·s pacifiques de présenter leurs cartes d’identité, la police bafoue leur droit à la vie privée, tout en ayant un effet très dissuasif sur le droit à la liberté de se rassembler pacifiquement, a déclaré Dagmar Oudshoorn, directrice d’Amnesty International Pays-Bas.

« Les policiers disposent d’un large pouvoir discrétionnaire pour décider qui arrêter et contrôler lors des manifestations, ce qui favorise fortement le risque d’arbitraire et de discrimination dans l’usage de ce pouvoir, y compris de profilage ethnique, et décourage les gens de descendre dans la rue. »

Les recherches entreprises entre septembre 2020 et novembre 2022 englobaient des entretiens avec 50 manifestant·e·s et révélaient une pratique d’intimidation policière largement répandue.

Les policiers ont une grande marge de manœuvre s’agissant de décider qui arrêter et contrôler lors des manifestations, et les contrôles d’identité sont souvent utilisés pour recueillir des données sur des manifestant·e·s pacifiques.

Toute personne qui souhaite manifester aux Pays-Bas peut être surveillée par la police, qui dispose de pouvoirs discrétionnaires vastes et vagues. Les méthodes de surveillance policière ne font que rarement l’objet de supervision. Le rapport identifie plusieurs méthodes déployées par la police pour identifier et surveiller les manifestant·e·s, allant des contrôles d’identité illégaux à la surveillance des réseaux sociaux, en passant par l’utilisation de drones lors des manifestations, l’infiltration de groupes sur des applications et les visites inopinées aux domiciles. Une fois contrôlée, chaque pièce d’identité est enregistrée dans une base de données de la police pendant au moins cinq ans, en violation du droit à la vie privée.

« Les policiers disposent d’un large pouvoir discrétionnaire pour décider qui arrêter et contrôler lors des manifestations, ce qui favorise fortement le risque d’arbitraire et de discrimination dans l’usage de ce pouvoir, y compris de profilage ethnique, et décourage les gens de descendre dans la rue »

D’après le témoignage de Robert, un manifestant, lors d’une manifestation contre le racisme, jusqu’à neuf policiers l’ont encerclé, lui et trois autres manifestants. « On nous a dit qu’on faisait quelque chose d’interdit. Ils voulaient voir nos papiers d’identité. Ils ont fait valoir leur position de pouvoir. J’ai présenté ma carte très rapidement. C’est quelque chose que j’ai déjà vécu lors d’autres manifestations. D’après mon expérience, le contact avec la police et la municipalité est très intimidant et très frustrant. »

Conséquence des pratiques actuelles, certains groupes sont plus touchés que d’autres par les contrôles, à savoir les groupes fortement policiarisés qui ont des raisons de craindre des interventions policières discriminatoires ou illégales.

Le rapport conclut que la police ne respecte pas la loi de 2003 sur l’identification obligatoire, qui énonce clairement que les contrôles d’identité ne sont autorisés que s’ils sont raisonnablement nécessaires à l’accomplissement du travail du policier. Les pratiques policières actuelles iraient directement à l’encontre de ce qui est souhaitable ou autorisé en vertu de ce texte de loi.

« Manifester est un droit fondamental et non un privilège. Pourtant, aux Pays-Bas, ce droit est de plus en plus criminalisé, ce qui a pour effet de dissuader les citoyennes et citoyens, a déclaré Dagmar Oudshoorn.

« Au lieu de surveiller secrètement les manifestant·e·s pacifiques, la police doit s’attacher à faciliter les rassemblements et les autorités doivent prendre des mesures en vue de mettre fin à cette surveillance illégale. Les contrôles d’identité ne doivent être effectués qu’en cas de soupçon raisonnable d’infraction pénale grave. »

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