Palestine : Les poursuites contre le défenseur Issa Amro doivent être abandonnées

Les poursuites engagées contre Issa Amro, défenseur des droits humains palestinien de premier plan, en raison d’un billet publié sur un réseau social critiquant les autorités palestiniennes représente un nouveau coup dévastateur pour la liberté d’expression en Palestine, a déclaré Amnesty International la veille de la première audience, fixée au 28 mars.

 Issa Amro, membre fondateur de l’organisation La Jeunesse contre les colonies, a été arrêté par les forces de sécurité palestiniennes le 4 septembre 2017 pour avoir critiqué les autorités palestiniennes sur Facebook au sujet de l’arrestation d’un journaliste à Hébron qui avait lui-même critiqué le président Mahmoud Abbas.

« Il est inadmissible qu’Issa Amro puisse être condamné à une peine d’emprisonnement uniquement pour avoir exprimé en ligne des opinions en faveur des droits humains. Les autorités palestiniennes doivent immédiatement abandonner les charges retenues contre lui. Le fait de critiquer un représentant de l’État ne devrait jamais être considéré comme un crime. S’il est emprisonné, Issa Amro deviendra alors un prisonnier d’opinion », a déclaré Saleh Higazi, directeur adjoint du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient à Amnesty International.

« Le fait de critiquer un représentant de l’État ne devrait jamais être considéré comme un crime. S’il est emprisonné, Issa Amro deviendra alors un prisonnier d’opinion »

Après son arrestation par la Force de sécurité préventive en 2017, Issa Amro a été maintenu en détention pendant sept jours, durant lesquels il aurait été torturé par les agents du Comité conjoint de sécurité (un organe appartenant à différentes forces de sécurité) qui l’ont interrogé. Il a dit à Amnesty International avoir été maintenu en détention à l’isolement pendant cinq jours et avoir été frappé et menacé de mort par ses interrogateurs. Il a ensuite été libéré en échange d’une caution d’un montant de 1 400 dollars.
 
Il a été accusé de « troubles à l’ordre public » au titre de la draconienne loi palestinienne relative aux infractions électroniques, et aussi d’« incitation à un conflit » et d’« insulte visant une haute autorité » au titre du Code pénal jordanien de 1960 qui est toujours en vigueur en Cisjordanie. S’il est déclaré coupable, il risque jusqu’à deux ans d’emprisonnement assortis d’une amende.
 
Lorsqu’il a été remis en liberté au bout de presque une semaine de détention, on lui a dit que l’affaire le concernant était suspendue car les accusations allaient être abandonnées et l’affaire close. Or, le mois dernier, un tribunal palestinien d’Hébron a rouvert ce dossier, manifestement dans le but de l’intimider et de l’amener à abandonner ses activités consistant à attirer l’attention sur les violations commises par les autorités israéliennes et palestiniennes.

« Les autorités palestiniennes présentent un triste passif de harcèlement et d’intimidation de détracteurs pacifiques et de militants des droits humains. Les manœuvres persistantes de persécution visant Issa Amro tendent à indiquer malheureusement que cette tendance reste vivace. »

 
« Les autorités palestiniennes présentent un triste passif de harcèlement et d’intimidation de détracteurs pacifiques et de militants des droits humains. Les manœuvres persistantes de persécution visant Issa Amro tendent à indiquer malheureusement que cette tendance reste vivace. Le nouveau gouvernement dirigé par le Premier ministre Mohammad Shtayyeh devra rapidement démontrer qu’il n’en est rien et afficher un engagement réel pour la protection des droits des défenseur·e·s des droits humains tels qu’Issa Amro », a déclaré Saleh Higazi.
 

Menaces de mort et intimidations 

Issa Amro a dit à Amnesty International avoir reçu des menaces de mort sur les réseaux sociaux et au téléphone de la part de sympathisants du Fatah, le parti politique palestinien au pouvoir en Cisjordanie. Il a dit craindre pour sa sécurité personnelle et ajouté que les autorités palestiniennes avaient également menacé des personnes de son proche entourage, les engageant à cesser de coopérer avec lui et avec l’organisation La Jeunesse contre les colonies, dont il est membre.
 
Le mois dernier, le Fatah a diffusé un communiqué de presse engageant les organisations de la société civile à Hébron à ne pas collaborer avec Issa Amro et avec La Jeunesse contre les colonies, et avertissant les contrevenants qu’ils seraient châtiés.
 
Issa Amro a dit que les colons israéliens à Hébron ont accentué leurs manœuvres d’intimidation et d’incitation visant sa personne ainsi que les membres de La Jeunesse contre les colonies, à la suite du communiqué de presse du Fatah.
 

« Les autorités palestiniennes en Cisjordanie sont tenues de veiller à ce que les défenseurs des droits humains tels qu’Issa Amro soient libres de faire leur travail sans subir de menaces, d’intimidation ou de mauvais traitements. Le fait de ne pas protéger ces activités et l’ingérence délibérée dans leur travail constituent une violation flagrante du droit international », a déclaré Saleh Higazi.

 
Les autorités palestiniennes en Cisjordanie doivent également cesser d’utiliser la Loi relative aux infractions électroniques, très répressive, pour persécuter ceux qui les critiquent et qui militent pacifiquement, et modifier cette loi afin de la mettre en conformité avec leurs obligations découlant du droit international relatif aux droits humains, ou l’abroger.
 
« Les Palestiniens qui vivent en Cisjordanie et dans la bande de Gaza sont victimes depuis plus de 50 ans de violations des droits humains systématiques sous l’occupation israélienne. Des militants qui, comme Issa Amro, dénoncent ce qui se passe réellement sur le terrain afin que les gens puissent obtenir justice et réparation, doivent pouvoir effectuer leur travail sans subir d’ingérence arbitraire », a déclaré Saleh Higazi.
 

Complément d’information

Issa Amro est également jugé par un tribunal militaire israélien pour 18 chefs d’accusation tous liés à ses activités militantes pacifiques à Hébron. La prochaine audience en ce qui concerne ce procès a été fixée au 1er avril.

 

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