Ouganda, le président doit opposer son veto au projet de loi contre l’homosexualité

Ouganda, le président doit opposer son veto au projet de loi contre l'homosexualité

Le président ougandais Yoweri Museveni doit de toute urgence opposer son veto au projet de loi draconien et de très large portée visant à réprimer pénalement les relations homosexuelles consenties, presque 30 jours après que le Parlement ougandais a adopté le projet de loi de 2023 portant répression de l’homosexualité.

En effet, la Constitution ougandaise prévoit que le chef de l’État peut jusqu’au 21 avril 2023 soit approuver le projet de loi, soit le renvoyer devant le Parlement pour qu’il soit modifié, soit informer la présidence du Parlement qu’il apposera son veto à ce texte. Le projet de loi peut toutefois être définitivement adopté sans l’approbation du chef de l’État si ce dernier le renvoie à deux reprises devant le Parlement.

Ce texte incrimine le fait de « promouvoir » l’homosexualité ou de « tenter de commettre l’infraction d’homosexualité ». Il oblige également les personnes en Ouganda à signaler « les actes d’homosexualité », faute de quoi elles encourent éventuellement une peine allant jusqu’à six mois d’emprisonnement. De plus, il contient une disposition sur l’« homosexualité aggravée » qui concerne les cas où une personne contracte une maladie mortelle à cause de relations sexuelles, ce qui risque de dissuader les personnes de la communauté LGBTI vivant avec le VIH/sida d’accéder aux services et soins médicaux.

« L’adoption par le Parlement de ce projet de loi est extrêmement rude pour la communauté LGBTI en Ouganda et les proches de ces personnes. Le président Yoweri Museveni doit de toute urgence tenir compte de l’indignation de la communauté LGBTI face à ce projet de loi et opposer son veto à ce texte. Nul ne peut être incriminé en raison de son orientation sexuelle ou de son identité de genre, a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.

« Ce projet de loi va à l’encontre d’une résolution de la Commission africaine sur la protection des personnes LGBTI, et comme il recommande la peine de mort en cas d’"homosexualité aggravée", il s’agit de l’un des textes de loi anti-LGBTI les plus extrêmes au monde, qui viole en outre les normes internationales relatives à la peine capitale. »

Amnesty International demeure extrêmement préoccupée par les propos homophobes qu’ont eus le président Yoweri Museveni et d’autres hauts représentants des pouvoirs publics avant, pendant et après l’adoption du projet de loi par le Parlement, propos qui incitent déjà à la haine, à la discrimination et à la violence contre des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre.

Le 17 avril 2023, un tribunal à Jinja, dans l’est de l’Ouganda, a refusé d’accorder la libération sous caution à six jeunes animateurs travaillant pour des organismes de soins de santé qui avaient été arrêtés le 8 avril 2023 et inculpés d’« appartenance à un réseau sexuel criminel ». Les forces de police ougandaises ont confirmé avoir soumis ces cinq personnes à des examens anaux forcés et à un test de dépistage du VIH.

« Les dispositions rédigées en termes imprécis qui incriminent "la promotion de l’homosexualité" ou le fait de toucher une personne "dans l’intention de commettre un acte homosexuel" vont en fait institutionnaliser la discrimination, la haine et les préjugés à l’égard des personnes LGBTI et bloquer le travail légitime des organisations de la société civile. Ce texte extrêmement répressif ne doit en aucun cas être intégré dans la législation du pays, a déclaré Agnès Callamard.

« Au lieu de persécuter les personnes LGBTI, les autorités ougandaises devraient protéger leurs droits en alignant la législation du pays sur le droit et les normes internationaux relatifs aux droits humains. L’incrimination des relations homosexuelles consenties constitue une violation flagrante de nombreux droits humains, notamment des droits à la dignité, à l’égalité devant la loi, à une égale protection de la loi et à la non-discrimination. »

Amnesty International demande aux autorités ougandaises non seulement d’opposer leur veto à ce projet de loi draconien, mais aussi de réexaminer toutes les dispositions du Code pénal qui incriminent les relations homosexuelles. Le président Yoweri Museveni doit veiller à ce que les droits humains soient promus et protégés pour toutes les personnes en Ouganda, quelles que soient leur orientation sexuelle ou leur identité de genre.

Contexte

Plus de 30 pays en Afrique interdisent les relations homosexuelles consenties, mais le projet de loi adopté par le Parlement ougandais est le premier texte à incriminer toute personne qui n’aurait fait que « se présenter en tant que personne lesbienne, gay, transgenre, queer ou ayant toute autre identité sexuelle ou de genre contraire aux catégories binaires masculine et féminine » et à prévoir des peines allant jusqu’à 10 ans d’emprisonnement.

Le 21 mars 2023, le Parlement ougandais a adopté le projet de loi portant répression de l’homosexualité, avec une majorité de 387 voix sur 389 votants. Cependant, ce texte ne sera définitivement adopté que si le président Yoweri Museveni l’approuve.

En 2014, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a adopté la Résolution n° 275 qui condamne les attaques lancées par des acteurs étatiques ou non étatiques contre des personnes sur la base de leur orientation sexuelle ou identité de genre présumées ou réelles. La Commission africaine a également appelé les gouvernements à prévenir la violence et les autres formes de violations des droits humains visant des personnes en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre présumées ou réelles.

Le 20 avril, le Parlement européen a adopté une résolution sur la dépénalisation universelle de l’homosexualité tenant compte des récents événements survenus en Ouganda et appelant le président Yoweri Museveni à ne pas approuver le projet de loi ou tout autre texte du même type qui pourrait à l’avenir lui être soumis.

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