Maldives : Nouvelles exécutions

· Premières exécutions depuis plus de 60 ans

· Le gouvernement cherche à détourner l’attention de la crise politique

· Les exécutions bafoueraient les obligations qui incombent aux Maldives au titre du droit international

Les autorités des Maldives doivent renoncer à procéder à des exécutions, les premières depuis plus de 60 ans, alors que le gouvernement cherche à détourner l’attention d’une crise politique qui s’aggrave, a déclaré Amnesty International le 1er août 2017.

Le ministre des Affaires intérieures a annoncé la reprise des exécutions « dans les prochains jours ». Trois condamnés à mort ayant épuisé tous leurs recours risquent de ce fait d’être exécutés de manière imminente. Aucune date n’a été fixée pour ces exécutions.

« Depuis plus de 60 ans, les Maldives ont montré l’exemple dans la région en s’abstenant de mettre en œuvre ce châtiment cruel et irréversible. Aujourd’hui, alors que la plupart des pays du globe se sont détournés de la peine de mort, le pays risque de se ranger du mauvais côté de l’histoire et de s’attirer une triste notoriété en réactivant son application  », a déclaré Biraj Patnaik, directeur pour l’Asie du Sud à Amnesty International.

Si le ministre des Affaires intérieures assure que cette mesure est motivée par deux récents assassinats à l’arme blanche, l’annonce des exécutions intervient alors que le pays est ébranlé par des tensions politiques. La semaine dernière, l’armée a fait irruption au Parlement pour stopper une procédure, l’opposition s’apprêtant à déposer une motion de censure.

« Ces exécutions sont un stratagème grossier du gouvernement pour détourner l’attention de ses propres problèmes. Il est consternant de constater qu’ils envisagent de priver des gens du droit à la vie, uniquement pour assurer leur survie politique  », a déclaré Biraj Patnaik.

Amnesty International est vivement préoccupée par l’équité des procédures qui débouchent sur des condamnations à mort dans le pays, notamment l’utilisation d’« aveux » qui auraient été obtenus sous la torture et sur lesquels l’un des condamnés à mort, Hussain Humaam Ahmed, est revenu par la suite.

En 2016, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a demandé au gouvernement des Maldives de reporter l’exécution d’Humaam, dans l’attente de l’examen d’un recours déposé en faveur du prisonnier. L’organe de l’ONU a formulé la même requête au mois de juillet dans le cadre des affaires concernant les deux autres condamnés, Ahmed Murrath et Mohammed Nabeel.

Les Maldives se sont engagées de manière contraignante à coopérer avec le Comité des droits de l’homme. En procédant aux exécutions, le gouvernement bafouerait les obligations incombant aux Maldives au titre du droit international, notamment l’obligation de protéger le droit à la vie des trois hommes.

Ahmed Murrath et Hussain Humaam Ahmed ont été déclarés coupables de meurtre et condamnés à mort en 2012, tout comme Mohammed Nabeel en 2009. La Cour suprême a confirmé les condamnations à mort de ces hommes en juin et juillet 2016.

Amnesty International s’oppose catégoriquement à la peine capitale en toutes circonstances, quels que soient le crime commis et la méthode d’exécution.

Les trois hommes ont épuisé toutes leurs voies de recours au niveau national. À la suite de modifications législatives, ils n’ont pas été autorisés à demander la grâce ni la commutation de leurs peines de mort auprès de l’exécutif – un droit pourtant garanti par le droit international relatif aux droits humains.

« Lorsque des vies sont en jeu, il est d’autant plus crucial que les garanties d’une procédure régulière soient strictement respectées. La vie est trop précieuse pour être ôtée à l’issue d’une procédure hâtive. Les Maldives ont encore le temps de changer d’avis, de consolider leur bilan positif concernant la peine capitale et d’instaurer à titre de première mesure un moratoire sur l’application de ce châtiment », a déclaré Biraj Patnaik.

Complément d’information

En 2014, le gouvernement maldivien, sous la houlette du président Abdulla Yameen, a annoncé la reprise des exécutions, après une pause de plus de 60 ans sans aucune mise à mort.

Les autorités ont depuis modifié la législation, ouvrant la voie à la reprise des exécutions, notamment en supprimant le pouvoir de l’exécutif d’accorder des grâces ou des commutations dans les affaires d’homicides volontaires, en violation des droits garantis par le droit international relatif aux droits humains.

Actuellement, 20 prisonniers se trouvent dans le quartier des condamnés à mort, dont au moins cinq qui ont été déclarés coupables et condamnés à mort pour des actes commis alors qu’ils avaient moins de 18 ans. Au titre du droit international relatif aux droits humains, il est illégal d’exécuter des mineurs délinquants, quel que soit le crime commis.

À ce jour, 141 pays ont aboli la peine capitale en droit ou en pratique. Dans la région Asie-Pacifique, 20 États ont aboli la peine capitale pour tous les crimes et sept autres sont abolitionnistes dans la pratique.

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