Liban. Procès de Mahmoud Qassem Rafeh

Déclaration publique

ÉFAI-
18 août 2009

Amnesty International a appelé le ministre de la Défense nationale, Elias Murr, à renvoyer le procès de Mahmoud Qassem Rafeh devant une juridiction civile de droit commun, et demandé qu’une enquête indépendante et approfondie soit ouverte sans délai sur les allégations indiquant que cet homme a été torturé et soumis à d’autres mauvais traitements pendant sa détention provisoire.

Dans une lettre datée du 17 août 2009, Amnesty International a fait part de son inquiétude après avoir appris que Mahmoud Qassem Rafeh, ancien responsable des Forces de sécurité intérieure âgé de soixante-deux ans, devait être jugé par un tribunal militaire le 20 août à Beyrouth alors qu’il est désormais devenu un civil, et non un membre de l’armée en service actif. L’organisation considère que les civils ne doivent pas être jugés par des juridictions militaires, où les juges sont principalement des officiers de l’armée en fonction, car celles-ci ne sont pas suffisamment indépendantes pour garantir le respect du droit des prévenus à un procès équitable. Dans le cas présent, la décision de traduire Mahmoud Qassem Rafeh devant un tribunal militaire est d’autant plus inopportune que les autorités n’ont pas, jusqu’à présent, enquêté sur les graves allégations indiquant que cet homme a été enlevé puis torturé par des agents des services du renseignement de l’armée qui, comme les juridictions militaires, dépendent du ministre de la Défense nationale.

Dans sa lettre à ce dernier, Amnesty International a indiqué qu’elle reconnaissait entièrement la responsabilité qui incombe aux autorités libanaises de préserver la sécurité publique et de sanctionner la criminalité, en particulier les actes dont l’ampleur et la gravité sont telles que dans cette affaire. Cependant, les autorités libanaises doivent se conformer à leur obligation de respecter les droits humains et le droit international – surtout dans une affaire où les faits reprochés à l’accusé sont aussi graves et passibles de la peine capitale. Il est absolument indispensable, dans de telles circonstances, de veiller à ce que son procès soit pleinement conforme aux normes internationales d’équité, et notamment qu’aucun élément de preuve obtenu au moyen de la torture ne soit accepté par le tribunal.

Mahmoud Qassem Rafeh est détenu depuis juin 2006, date à laquelle il a été appréhendé par des agents en civil des forces de sécurité. Dans un premier temps, son arrestation avait été prise pour un enlèvement. Il a ensuite été incarcéré pendant deux ans et neuf mois au centre de détention du ministère de la Défense, à Beyrouth, par des agents des services du renseignement de l’armée qui, selon lui, l’ont torturé et forcé à signer des « aveux » qu’il a par la suite tenté à maintes reprises de rétracter. Il affirme avoir été suspendu au plafond par les poignets, menacé et humilié, puis puni en étant privé de sommeil lorsqu’il s’est plaint de son traitement auprès d’un juge d’instruction militaire.

Il a été transféré à la prison centrale de Roumié en mars 2009 et doit aujourd’hui être jugé pour avoir collaboré avec Israël pendant sept ans et participé au meurtre de membres de groupes palestiniens et de responsables du Hezbollah. Parmi ces personnes figuraient Mahmoud Majzoub, membre du Djihad islamique, et son frère Nidal, les responsables du Hezbollah Ali Hassan Dib et Ali Saleh, et Jihad Jibril, fils du chef du Front populaire de libération de la Palestine - Commandement général (FPLP-CG), Ahmad Jibril.

Mahmoud Qassem Rafeh a été détenu pendant environ deux ans avant de pouvoir consulter un avocat, puis il n’a été autorisé à s’entretenir avec son avocat qu’en présence d’agents des services du renseignement de l’armée. À la connaissance d’Amnesty International, aucune enquête n’a été ouverte par les autorités libanaises au sujet de ses allégations de torture et d’autres mauvais traitements, bien que le Liban soit partie à la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui exige que tous les actes de torture signalés fassent l’objet d’une enquête approfondie dans les meilleurs délais. En janvier 2008, le gouvernement a déclaré à un expert des Nations unies qu’il n’y avait pas eu d’enquête parce que Mahmoud Qassem Rafeh n’avait pas porté plainte, alors que celui-ci affirme qu’il a tenté de le faire et qu’il ne pouvait pas consulter un avocat à ce moment-là.

Amnesty International demande que Mahmoud Qassem Rafeh bénéficie d’un procès équitable devant une juridiction civile de droit commun, dans le respect des normes internationales et sans possibilité de condamnation à mort.

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