La justice doit rester une priorité

La justice et la lutte contre l’impunité des crimes de droit international doivent continuer d’être une priorité centrale pour le gouvernement du président Faustin-Archange Touadéra, ont déclaré Amnesty International et 30 organisations de défense des droits humains travaillant en République centrafricaine mercredi 12 avril 2017.

Un an après l’entrée en fonctions du président Touadéra, ces organisations rappellent les engagements qu’il a pris : voir la justice rendue pour les victimes et veiller à ce que les auteurs présumés des innombrables atteintes aux droits humains et crimes de droit international commis dans le pays ces dernières années soient amenés à rendre des comptes. Dans son discours d’investiture du 30 mars 2016, par exemple, il a déclaré qu’il ne pourrait pas y avoir de réconciliation sans justice et que la justice serait rendue.

Bien que la sécurité reste fragile, de nets progrès ont été observés au cours de la première année de son mandat. Les avancées dans la mise en place de la Cour pénale spéciale, notamment la nomination d’un procureur spécial en février 2017 et les audiences de procès pénal qui se sont tenues en juin 2015 et août-septembre 2016, témoignent de la volonté politique des autorités centrafricaines de rétablir la justice.

Le président Touadéra a en outre réaffirmé devant le Conseil de sécurité des Nations unies le 16 mars 2017 que toute initiative en faveur de la paix en République centrafricaine devrait tenir compte des impératifs de la justice définis par la population dans les conclusions et recommandations du Forum de réconciliation nationale, qui s’est déroulé en mai 2015 à Bangui. Entre autres choses, il a cité le principe de « zéro impunité », en particulier le refus d’accorder une immunité ou une amnistie aux responsables présumés de crimes de droit international.

Cependant, pour que justice soit rendue aux milliers de victimes, de nombreux défis persistent. Rétablir l’état de droit est une condition préalable. La protection des civils, la démobilisation, le désarmement des groupes armés, le renforcement du système judiciaire national et la promotion d’une reprise économique et sociale sont autant de domaines dans lesquels le président et son gouvernement doivent agir et intervenir.

Les organisations signataires insistent par ailleurs sur le besoin urgent de reconstruire le système judiciaire de la République centrafricaine et de remédier à ses nombreuses lacunes, notamment le manque d’institutions judiciaires efficaces dans le pays, la pénurie de personnel judiciaire qualifié, l’insuffisance de ressources financières et matérielles pour la justice, l’absence de mesures de protection des victimes et des témoins et la faiblesse du système carcéral.

Au vu des difficultés que doit surmonter le système national, il est indispensable, tout en le remettant d’aplomb, de renforcer la Cour pénale spéciale, outil stratégique essentiel pour s’assurer que les responsables présumés de crimes de droit international et d’autres graves atteintes aux droits humains soient traduits en justice.

Les organisations signataires soulignent l’importance d’honorer les promesses que les pays donateurs ont faites lors de la conférence internationale des donateurs en novembre 2016 à Bruxelles et, en particulier, de fournir l’intégralité du budget de 105 millions d’euros alloué au renforcement de l’appareil judiciaire du pays et à la mise en place de la Cour pénale spéciale aux termes du Plan de relèvement et de consolidation de la paix.

Mise en place de la Cour pénale spéciale

La nomination de Toussaint Muntazini Mukimapa, ressortissant de la République démocratique du Congo (RDC), au poste de procureur spécial de la Cour pénale spéciale le 15 février 2017 a marqué un tournant dans le processus de concrétisation de cette juridiction hybride. De plus, les avancées dans la procédure de recrutement du procureur spécial adjoint et des autres membres de la Cour pénale spéciale, le recrutement de juges centrafricains et internationaux, la création d’une commission de sélection des officiers de police judiciaire, l’organisation de séances de sensibilisation destinées à la société civile et l’élaboration prévue du règlement de procédure et de preuve constituent des étapes importantes pour la mise en place d’une juridiction fonctionnant correctement.

Les organisations signataires invitent le gouvernement centrafricain à poursuivre et accélérer les progrès réalisés dans le recrutement de juges nationaux et internationaux et d’autres membres du personnel de la Cour pénale spéciale, et à veiller à ce que ce processus soit indépendant, transparent et fondé sur le mérite.

Elles estiment aussi que les partenaires internationaux de la République centrafricaine doivent fournir des financements sur le long terme pour garantir le bon fonctionnement de la Cour pénale spéciale, désigner des juges et du personnel judiciaire qualifié pour les postes à pourvoir actuellement et ultérieurement, et proposer un appui politique pour cette institution.

Coopération avec la Cour pénale internationale

Les organisations signataires rappellent que, pour combattre efficacement l’impunité des graves crimes commis en République centrafricaine, les autorités nationales devront également coopérer pleinement et sans réserve avec la Cour pénale internationale (CPI), qui a un rôle complémentaire vis à vis de la Cour pénale spéciale dans le système judiciaire national. Le gouvernement centrafricain a saisi la CPI de la situation du pays en 2014.

Organisations signataires

 Action des chrétiens pour l’abolition de la torture et la peine de mort (ACAT-RCA)
 Amnesty International (AI)
 Association des femmes juristes de Centrafrique (AFJC)
 Association des femmes musulmanes activistes pour le développement (AFMAD)
 Association des victimes de la LRA en Centrafrique (AVLRAC)
 Association des victimes des événements du 29 octobre 2015 et suivant
 Association pour la défense, le rétablissement et le développement des droits humains (ADRDH)
 Avocats sans frontières RCA (ASF/RCA)
 Bureau d’information sur les droits de l’homme (BIDH)
 CAR National Coalition for the ICC (CICC-CAR)
 Centre pour l’information environnementale et le développement durable (CIEDD)
 Civisme et démocratie (CIDEM)
 Comité national pour la prévention du crime de génocide (CNPCG)
 Commission épiscopale Justice et Paix (CEJP)
 Coordination des organisations musulmanes de Centrafrique (COMUC)
 Enfants sans frontières (ESF)
 Femmes, action et développement en Centrafrique (FADEC)
 Femmes, hommes, action plus (FHAP)
 Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH)
 Leadership en Centrafrique (Lead Centrafrique)
 Ligue centrafricaine des droits de l’homme (LCDH)
 Mouvement pour la défense des droits de l’homme et de l’action humanitaire (MDDH)
 Observatoire centrafricain des droits de l’homme (OCDH)
 Observatoire pour les élections et l’État de droit (OPED)
 Organisation des femmes musulmanes de Centrafrique (OFMCA)
 Planète femmes Centrafrique (PFC)
 Plateforme de la société civile en République centrafricaine (SCRCA)
 Réseau centrafricain des organisations pour la promotion et la défense des droits de l’homme (RONGDH)
 Réseau national des organisations de jeunes pour les droits de l’homme (RNOJDH)
 VITALITE PLUS
 Women Act for Living Together (WALT)

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