Israël/TPO, multiplication des attaques contre les logements palestiniens

Israël/TPO, multiplication des attaques contre les logements palestiniens

Le rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à un logement convenable est le dernier expert des droits humains en date à reconnaître qu’Israël pratique l’apartheid envers la population palestinienne. Lors de l’Assemblée générale des Nations unies, ce vendredi 28 octobre, le rapporteur spécial Balakrishnan Rajagopal a présenté un rapport [2] sur les droits au logement dans le monde, dans lequel il est indiqué que le régime d’oppression raciale et de discrimination qui a conduit à la destruction de logements palestiniens « n’est rien d’autre que de l’apartheid. »

Amnesty International a accueilli avec satisfaction le rapport du rapporteur spécial, qui intervient dans un contexte de multiplication des attaques visant les Palestinien·ne·s et leurs biens dans toute la Cisjordanie occupée. Ces dernières semaines, des familles palestiniennes qui participaient à la récolte annuelle des olives ont été soumises à de violentes attaques par des colons israéliens, qui opèrent avec le soutien direct de l’armée israélienne. Parallèlement, à partir du 12 octobre, l’armée a procédé à un bouclage de la ville de Naplouse et des villages environnants, perturbant fortement la vie quotidienne de centaines de milliers de personnes. Ce bouclage - qui constitue apparemment une réponse à plusieurs fusillades visant des soldats israéliens - s’apparente à un châtiment collectif illégal.

« La domination et le contrôle que les autorités israéliennes imposent à la population palestinienne, notamment par le biais de politiques discriminatoires en matière de propriété foncière, d’aménagement et de logement, sont amplement attestés et s’étendent aux Palestiniens et Palestiniennes partout où Israël exerce un contrôle sur leurs droits », a déclaré Heba Morayef, directrice régionale pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnesty International.

« Les experts et expertes en matière de droits humains sont de plus en plus nombreux à reconnaître qu’Israël pratique l’apartheid, et la présentation de ce rapport aujourd’hui intervient à un moment particulièrement opportun. Une escalade alarmante des attaques menées contre les Palestiniens et Palestiniennes dans leurs logements et leurs villes un peu partout en Cisjordanie occupée, qui vient s’ajouter à la menace constante d’expulsion forcée, de démolition et de transfert forcé, a récemment été constatée. Les incursions militaires, les bouclages, les attaques de colons soutenues par l’État, les démolitions de logements et les destructions de biens sont autant de manifestations du régime israélien d’apartheid. »

Vivre constamment dans la peur

Dans son rapport, le rapporteur spécial donne des exemples de lois et de politiques du gouvernement israélien qui sont utilisées pour confisquer des terres et des biens palestiniens, comme la Loi sur la propriété des absents et les procédures d’enregistrement des titres fonciers.

Les autorités israéliennes se servent également du classement en « zone de tir » ou « zone militaire fermée » pour confisquer des terres palestiniennes. Environ 20 % des terres de la Cisjordanie occupée [3] ont été déclarées « zones de tir », et la présence palestinienne y est interdite sans autorisation de l’armée israélienne. Cela a des conséquences pour plus de 5 000 Palestinien·ne·s, répartis dans 38 localités, qui font l’objet d’ordres d’expulsion, sont menacés de déplacement ou se voient contraints de quitter leur logement pendant que l’armée effectue des exercices d’entraînement. À Masafer Yatta, en Cisjordanie occupée, plus de 1 000 personnes sont exposées à un risque d’expulsion forcée en raison de cette politique.

Le 13 octobre, une équipe de recherche d’Amnesty International a rendu visite à des communautés de bergers qui vivent dans le nord de la vallée du Jourdain, y compris dans le hameau de Humsa, qui se trouve dans une « zone de tir ». Nitham Abu Kbash, un berger de Humsa, a dit à Amnesty International que son habitation et les enclos pour ses bêtes avaient été détruits à plusieurs reprises par l’armée israélienne l’année dernière.

Trois familles se sont retrouvées sans abri et ont dû déménager dans un autre secteur, lui aussi officiellement interdit. Depuis lors, l’armée israélienne effectue régulièrement des patrouilles et a confisqué du matériel que du personnel humanitaire avait fourni pour apporter un peu de stabilité aux familles.

« J’observe les jeeps des forces armées qui passent deux fois par jour, et ma hantise est qu’elles viennent à nouveau pour démolir », a dit Nitham Abu Kbash. « Même les diplomates européens [4] n’ont pas pu nous protéger - l’armée a confisqué l’aide sous leur nez. »

À Makhul, une localité voisine, Amnesty International s’est entretenue avec deux frères. Ils ont évoqué la peur qui les étreint à chaque fois que des colons approchent en tracteur et en 4x4 :
« Les enfants sont terrorisés parce que ces hommes braquent des faisceaux de lumière puissants sur nos habitations la nuit, lancent leurs chiens sur nous et sur les moutons, et conduisent dans tous les sens dans la cour », a dit Yusef Bisharat. « Des brebis ont fait des fausses couches cette saison, à cause du stress. »

Le droit au logement est également attaqué à l’intérieur d’Israël. Le 24 octobre, les forces israéliennes ont démoli le village bédouin palestinien d’Al Araqeeb, dans le Néguev/Naqab, pour la 208e fois [5].

À Gaza, des milliers de logements détruits par des frappes aériennes israéliennes lors d’offensives précédentes n’ont pas été reconstruits, en raison du blocus israélien et des restrictions qui affectent l’entrée des matériaux de construction.

Des attaques de colons soutenues par l’État

Les agriculteurs et agricultrices palestiniens de Cisjordanie occupée ont récemment subi une série d’incursions militaires israéliennes, des restrictions d’accès à la terre et à l’eau, ainsi que la destruction de leurs récoltes par des colons israéliens, comme cela avait été constaté les années précédentes à la saison de la récolte des olives. Selon l’organisation israélienne de défense des droits humains Yesh Din [6], un groupe de colons a attaqué des oléiculteurs la semaine dernière dans des villages du nord de la Cisjordanie, dont Burin et Kisan.

Le 19 octobre, un groupe de colons a attaqué des militants et militantes venus d’Israël et d’autres pays pour soutenir les agriculteurs palestiniens. Selon l’ONU, 194 Palestinien·ne·s ont été blessés lors d’attaques de colons depuis le début de l’année, et trois personnes palestiniennes ont été tuées. Les autorités israéliennes n’ont pas traduit les responsables présumés en justice - ainsi, en août, la police israélienne a abandonné son enquête sur le meurtre d’Ali Hassan Harb [7], tué à l’arme blanche dans son oliveraie le 21 juin 2022.

De nombreuses communautés agricoles palestiniennes s’attendent désormais à subir de telles violences à la saison des récoltes. Les expulsions auxquelles procède l’armée et les violences que commettent les colons interviennent dans une culture d’impunité, et visent conjointement à déplacer les membres de la population palestinienne au bénéfice des colonies israéliennes illégales.

« Les autorités israéliennes violent le droit au logement des Palestiniens et Palestiniennes de toutes les manières possibles et imaginables : elles rasent les logements au bulldozer, empêchent les membres de la population palestinienne de construire sur leurs propres terres et protègent les colons qui incendient les oliveraies ancestrales des familles palestiniennes », a déclaré Heba Morayef.

« La cueillette des olives est une période où les familles palestiniennes devraient célébrer et récolter les fruits de leur travail, après avoir pris soin de leurs plantations pendant toute une année. Mais cette année, une fois de plus, la récolte a été fortement perturbée par les bouclages militaires israéliens et la violence des colons soutenue par l’État. »

Plus de 175 000 personnes dans le monde ont jusqu’ici signé la pétition C’est l’apartheid qu’il faut détruire, pas les maisons palestiniennes d’Amnesty International, qui appelle le gouvernement israélien à mettre immédiatement fin aux démolitions de logements et aux expulsions forcées.

Complément d’information

Dans un document faisant état de ses recherches, publié cette semaine, Amnesty International a souligné que 1 700 logements palestiniens avaient été détruits ou endommagés lors de l’offensive lancée par Israël en août 2022 contre la bande de Gaza, entraînant le déplacement interne de quelque 450 Palestinien·ne·s.

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