Iran. Une exécution interrompue met en lumière la cruauté fondamentale de la peine de mort

DÉCLARATION PUBLIQUE

Index AI : MDE 13/174/2008

Les informations selon lesquelles un condamné a été détaché de la potence quelques minutes après le début de son exécution puis conduit à l’hôpital pour y être réanimé mettent en lumière la cruauté fondamentale et le caractère arbitraire de la peine de mort, a déclaré Amnesty International ce mardi 9 décembre.
Selon un article publié par l’agence officielle Islamic Republic News Agency (IRNA)

(http://www2.irna.ir/fa/news/view/line-9/8709173635162756.htm) le 2 décembre 2008, un homme dont le nom n’est pas communiqué, condamné pour meurtre, a été pardonné par la famille de la victime du meurtre quelques minutes après le début de son exécution dans une prison de Kazeroun, dans la province méridionale de Fars. Il a été conduit à l’hôpital, où il a été ramené à la vie.
Amnesty International se félicite de la décision de la famille, qui a empêché l’exécution de se dérouler jusqu’au bout, et des mesures rapides qui ont été prises pour sauver la vie de cet homme ; cependant, cette affaire illustre clairement la cruauté fondamentale de la peine de mort. Dans le cas d’une personne qui aurait subi un traitement comparable, par exemple au cours d’un simulacre d’exécution, il serait possible de parler de torture, laquelle est expressément et totalement interdite par le droit international relatif aux droits humains. Mais cet homme anonyme sur le point d’être exécuté ne bénéficiait pas de cette protection.
L’affaire souligne également le caractère arbitraire de l’application de la peine capitale en Iran, où deux personnes reconnues l’une et l’autre coupables d’homicide volontaire sont susceptibles de connaître un sort complètement différent (soit la vie, soit la mort) non pas à cause des circonstances propres à chaque cas, mais simplement en raison du souhait de la famille de la victime. Par exemple, Reza Alinejad, mineur délinquant, a été remis en liberté le 3 décembre 2008 après que sa famille est arrivée à rassembler la diya (indemnisation) exigée par la famille d’un jeune homme qu’il est accusé d’avoir tué lorsqu’il avait dix-sept ans. D’autres mineurs délinquants ont été envoyés à la potence, alors que leur exécution est expressément interdite aux termes du droit international. Au moins sept mineurs délinquants auraient été exécutés par les autorités iraniennes depuis le début de 2008. Cinq d’entre eux avaient été reconnus coupables de meurtre.
En vertu de la Constitution iranienne, tous les citoyens iraniens sont égaux devant la loi. Cependant, le système judiciaire actuel encourage un traitement arbitraire qui débouche littéralement sur une question de vie ou de mort. La réponse ne consiste pas seulement à réformer la nature arbitraire du système, même si cette réforme serait un progrès, mais à abolir totalement la peine de mort.
Amnesty International demande aux autorités iraniennes de décréter un moratoire immédiat sur toutes les exécutions, conformément à la résolution 62/149 adoptée en décembre 2007 par l’Assemblée générale des Nations unies et invitant tous les États qui appliquent encore la peine de mort à instituer un moratoire sur les exécutions en vue de l’abolition de la peine de mort . Les autorités doivent aussi prendre dans les plus brefs délais les mesures voulues pour respecter les obligations internationales qui leur imposent de ne pas exécuter les mineurs délinquants.

Complément d’information

Amnesty International a des informations sur d’autres exécutions annulées à la toute dernière minute, mais elle n’a pas connaissance d’un autre cas où une exécution ait été interrompue après avoir commencé. Par exemple, le mineur délinquant Mohammad Fedai, reconnu coupable en 2005 d’un meurtre commis en 2004, lorsqu’il n’avait que dix-sept ans, a décrit dans une lettre rédigée en prison, en juin 2008, la torture qui lui avait été infligée pour lui extorquer des aveux , faisant également le récit de sa quasi-exécution en avril 2008.
Ils m’ont demandé d’écrire mon testament le soir où on allait me pendre. Je ne savais pas ce que c’était qu’un testament. Quand ils m’ont passé le nœud coulant autour du cou, j’ai fermé les yeux et j’ai demandé à Dieu de m’aider. Quelques secondes avant la pendaison, ils ont tout arrêté, parce qu’ils ont découvert que mes avocats étaient des charlatans. En redescendant les marches, j’ai eu de nouveau de l’espoir et je me suis dit que j’allais retourner à l’école !
Mohammad Fedai est toujours incarcéré dans le quartier des condamnés à mort.
En Iran, une personne reconnue coupable de meurtre n’est pas autorisée à demander une grâce ou une commutation de peine à l’État, bien que ce droit soit proclamé par l’article 6-4 du PIDCP. Dans ce pays, la famille d’une victime d’homicide a le choix entre exiger l’exécution de l’accusé, lui pardonner, ou renoncer à son droit d’obtenir l’exécution en échange d’une compensation financière (diya). Les autorités iraniennes prétendent que le châtiment de qisas (peine infligée aux auteurs de meurtre) n’est pas une exécution, bien que ce soit l’État qui ôte la vie aux personnes condamnées à ce titre. Cette distinction n’est pas admise dans le droit international. La plupart des mineurs délinquants sous le coup d’une peine de mort en Iran ont été condamnés pour meurtre à titre de qisas.

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