COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Iran : les vies de deux condamnés à mort sont menacées après une brusque augmentation des exécutions

Deux membres de la minorité kurde d’Iran condamnés à la peine capitale risquent à tout instant d’être mis à mort après que les autorités iraniennes ont procédé à l’exécution de 20 condamnés au cours du week-end, a déclaré Amnesty International lundi 28 octobre.

« Cette brusque augmentation du nombre d’exécutions montre que, derrière les mots et les promesses, les autorités iraniennes continuent de recourir aux homicides cautionnés par l’État et Zaniar et Loghman Moradi, deux membres de la minorité kurde condamnés à mort, pourraient être les prochains », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

« Il faut immédiatement empêcher toutes les exécutions d’avoir lieu, y compris celle-ci. Les autorités iraniennes ont, certes, pour responsabilité de traduire en justice les personnes soupçonnées d’avoir commis des infractions pénales, mais elles ne devraient jamais recourir à la peine capitale car c’est le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. »

En Iran, des personnes sont fréquemment condamnées à mort à l’issue de procès iniques et malgré des allégations selon lesquelles la torture aurait été utilisée pour leur extorquer des « aveux » pendant la période de détention précédant le procès.

Zaniar et Loghman Moradi, deux membres de la minorité kurde d’Iran condamnés à mort, affirment avoir été torturés jusqu’à ce qu’ils « avouent » le meurtre, en 2009, du fils d’un responsable religieux à Marivan, dans la province du Kurdistan. Ils ont été condamnés à la peine capitale en décembre 2010 après avoir été déclarés coupables d’« inimitié à l’égard de Dieu » (moharebeh) et de « corruption sur terre » pour ce meurtre. Ils avaient également été déclarés coupables d’avoir pris part aux activités armées de l’Organisation révolutionnaire des travailleurs du Kurdistan (Komala), un groupe d’opposition kurde qui a mené une lutte armée contre l’Iran.

« Même les exigences les plus basiques du droit iranien semblent avoir été bafouées. Selon toute apparence, les prisonniers et leurs familles n’ont pas été prévenus et les familles n’ont appris les exécutions que lorsqu’elles ont voulu rendre visite à leurs proches », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui.

Exécution d’Habibollah Golparipour

Parmi les détenus exécutés au cours du week-end se trouvait Habibollah Golparipour, un autre prisonnier politique appartenant à la minorité kurde, en faveur de qui Amnesty International militait.

Le 25 octobre au matin, il a été transféré de la cellule où il était détenu à l’isolement à la prison d’Orumiyeh, dans la province de l’Azerbaïdjan occidental (nord-ouest de l’Iran), vers un endroit qui n’a pas été révélé et il a été exécuté dans la soirée. Sa famille n’a pas été prévenue à l’avance. Après l’exécution, les autorités semblent avoir refusé de remettre son corps à ses proches, ajoutant à leur désarroi.

Habibollah Golparipour avait été condamné à mort à l’issue d’un procès qui a duré cinq minutes en mars 2010. Il avait été arrêté en septembre de l’année précédente dans le nord-ouest de l’Iran et déclaré coupable d’« inimitié à l’égard de Dieu » en raison de sa coopération supposée avec un groupe armé interdit, le Parti pour une vie libre au Kurdistan (PJAK). D’après les documents judiciaires, il avait nié avoir pris part à des activités armées. Il avait par la suite écrit une lettre au Guide suprême de l’Iran affirmant qu’il avait été torturé durant son interrogatoire mais ses allégations n’ont jamais fait l’objet d’une enquête.

Exécutions « en représailles » d’une attaque

Le 26 octobre, Ebrahim Hamidi, responsable du système judiciaire de la province de Sistan-e Baloutchistan, a annoncé que 16 personnes avaient été exécutées le matin même « en représailles » d’une attaque menée la veille près de la frontière. Un groupe armé sunnite, Jaish-ul-Adl (Armée de la justice), aurait tué 14 gardes-frontière à Saravan, une ville de la province située près de la frontière avec le Pakistan.

D’après le procureur général, Mohammad Marzieh, les hommes exécutés avaient été condamnés à mort plusieurs années auparavant. Ebrahim Hamidi a déclaré que huit d’entre eux avaient été déclarés coupables d’« inimitié à l’égard de Dieu » et de « corruption sur Terre » en raison de leur appartenance présumée à un groupe armé d’activistes dans la province de Sistan-e Baloutchistan. Les huit autres avaient été condamnés pour des infractions liées à la législation sur les stupéfiants.

« Exécuter des prisonniers pour une attaque à laquelle ils n’avaient de toute évidence pas participé et se vanter d’avoir agi “en représailles” de cette attaque remet en question les principes mêmes du droit pénal, et en premier lieu l’idée selon laquelle personne ne devrait être puni pour un crime qu’il n’a pas commis », a souligné Hassiba Hadj Sahraoui.

Brusque augmentation des exécutions

En 2012, le nombre d’exécutions en Iran avait chuté par rapport à l’année précédente, laissant espérer que les autorités iraniennes essayaient de ne plus recourir autant à la peine capitale. En 2013, ce nombre a cependant de nouveau augmenté brutalement.

Les autorités ont officiellement reconnu avoir procédé à 304 exécutions jusqu’ici en 2013, mais des sources fiables indiquent qu’au moins 234 exécutions supplémentaires ont eu lieu et n’ont pas été reconnues.

« Le nouveau gouvernement iranien a été salué avec précautions sur la scène internationale pour quelques signes de progrès, notamment la libération de certains prisonniers d’opinion. Mais cette dépendance renouvelée envers la peine de mort donne un exemple saisissant de domaine dans lequel les autorités font preuve d’une obstination flagrante », a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui.

Dans son rapport du 4 octobre 2013, Ahmed Shaheed, le rapporteur spécial sur l’Iran, appelait les autorités du pays à mettre en place un moratoire sur les exécutions, à interdire les exécutions publiques (y compris les lapidations) et à limiter le cadre d’application de la peine capitale aux infractions considérées comme des crimes graves par le droit international. Dans leur réponse au rapport préliminaire du rapporteur spécial, les autorités iraniennes ont défendu les exécutions recensées en affirmant que la peine capitale est un châtiment reconnu par les instruments internationaux pour les crimes les plus graves.

Amnesty International est opposée à la peine de mort en toutes circonstances.

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