Gaza : Une journaliste risque la prison pour avoir dénoncé la corruption

Une journaliste d’investigation qui a publié un reportage révélant la corruption au sein du ministère de la Santé à Gaza encourt six mois d’emprisonnement, a déclaré Amnesty International à l’approche de son audience d’appel, qui aura lieu mardi 26 février. 

Hajar Harb, journaliste palestinienne vivant à Gaza, a publié un reportage diffusé sur al Araby TV le 25 juin 2016 soulignant que ce ministère, contrôlé par le gouvernement de facto du Hamas, tirait profit de transferts médicaux illégaux organisés pour faire sortir de la bande de Gaza des personnes qui n’avaient pas besoin de soins. Elle a été inculpée d’une série d’infractions, notamment de diffamation et de publication de fausses informations.

 
« Les poursuites engagées contre Hajar Harb constituent une attaque scandaleuse contre la liberté de la presse. Les autorités de Gaza cherchent de toute évidence à la punir pour avoir dénoncé la corruption au sein de l’administration du Hamas. Elles doivent abandonner tous les chefs d’accusation retenus contre elle, a déclaré Saleh Higazi, directeur adjoint du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

« Il est profondément inquiétant que Hajar Harb risque six mois d’emprisonnement pour avoir simplement fait son travail. Une confirmation de sa condamnation sur la base d’accusations forgées de toutes pièce aurait un effet néfaste sur la liberté d’expression à Gaza. »

 
Après la diffusion du reportage, Hajar Harb a été convoquée par la police pour des interrogatoires au moins quatre fois entre juin et juillet 2016. Chaque interrogatoire a duré trois à quatre heures. Selon son récit à Amnesty International, au cours de ces séances, elle a été insultée et « traitée comme une criminelle et non comme une journaliste faisant un travail d’investigation très important pour le pays ».
 
Elle a également affirmé à Amnesty International qu’elle avait été harcelée verbalement et menacée par plusieurs médecins à Gaza, alors qu’aucun de leurs noms, visages ou intitulés de poste n’apparaissait dans son reportage.
 

« J’ai été traitée de tous les noms, menacée de représailles physiques et même accusée de collaborer avec Israël en répandant des rumeurs sur Facebook, par des médecins de Gaza », a-t-elle déclaré à Amnesty International.

 
Deux médecins ont porté plainte contre elle et, en octobre 2016, elle a été inculpée de publication de fausses informations, de diffamation, d’avoir provoqué des dissensions et d’imposture.

Hajar Harb a été jugée en son absence pendant qu’elle se trouvait en Jordanie, où elle était soignée pour un cancer du sein. Le 4 juin 2017, elle a été reconnue coupable et condamnée à six mois de prison et 1 000 shekels (276 dollars américains) d’amende. Elle a fait appel de la décision du tribunal.
 
« Parfois je m’interroge et je me dis : “Qu’est-ce que j’ai fait ?” Je paye pour avoir enquêté sur la corruption à Gaza. Est-ce que cela est juste ? », a déclaré Hajar Harb à Amnesty International, en expliquant qu’elle avait eu des problèmes avec d’autres employeurs depuis la publication du reportage.
 
Alors que les querelles politiques se poursuivent entre le Fatah et le Hamas, les autorités en Cisjordanie et à Gaza utilisent menaces et intimidation contre des militants et des journalistes pour réprimer l’expression pacifique, notamment la diffusion d’informations et les critiques. 

« Les journalistes palestiniens devraient pouvoir faire leur travail sans subir de menaces, de harcèlement ou de manœuvres d’intimidation, a déclaré Saleh Higazi.

 
« Au lieu d’essayer de réprimer le travail des médias, les autorités de Cisjordanie et de Gaza doivent s’efforcer de protéger le droit à la liberté d’expression et amener ceux qui menacent, intimident et harcèlent des journalistes à rendre des comptes. »
 

Complément d’information

Selon le Centre palestinien pour le développement et la liberté des médias (une ONG basée à Ramallah), les autorités palestiniennes en Cisjordanie ont été à l’origine de 77 attaques contre la liberté des médias durant l’année 2018. Il s’agissait notamment d’arrestations arbitraires, de mauvais traitements pendant des interrogatoires, de saisies de matériel, de brutalités physiques et d’interdictions de publier des informations. Les autorités du Hamas à Gaza, quant à elles, se sont rendues responsables de 37 attaques de ce type.
 

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