EUROPE ET ASIE CENTRALE - Des militants des droits humains harcelés, torturés et persécutés

Index AI : EUR 01/006/2005

Chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international.

Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme.

Menaces, harcèlement et actes d’intimidation contre ceux qui défendent et protègent les droits humains sont inacceptables. Les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion sont des droits fondamentaux, a déclaré Amnesty International à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse.

La Fédération de Russie, la Biélorussie, le Turkménistan et la Turquie sont parmi les pays d’Europe et d’Asie centrale ayant le plus mauvais bilan en matière de harcèlement et de persécution par l’État de personnes ayant exercé ces droits de façon pacifique. Amnesty International craint que dans ces pays l’État ne soit en train de criminaliser les actions des défenseurs des droits humains et que ceux-ci ne soient harcelés, persécutés et torturés par des agents de l’État ne craignant aucune répercussion.

« Les fonctionnaires à tous les niveaux de l’appareil d’État, y compris les responsables chargés de l’application des lois, doivent respecter la légitimité de l’action des personnes qui défendent et protègent les droits humains et leur permettre d’agir sans rencontrer d’obstacle et sans avoir à craindre de harcèlement. Ils doivent promouvoir publiquement le respect et la protection des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion », a déclaré Nicola Duckworth, directeur d’Amnesty International pour le programme Europe et Asie centrale.

En Biélorussie, les autorités ne tolèrent aucune voix discordante ou critique publique et ont virtuellement monopolisé les médias - ceux qui critiquent le régime risquent l’emprisonnement, le ministère public et la magistrature étant sous le contrôle du gouvernement. Le dernier rapport d’Amnesty International sur la Biélorussie, intitulé Suppressing the last voices of public dissent (disponible en anglais uniquement) explique comment les autorités se servent d’une législation controversée pour restreindre les possibilités offertes aux organisations non-gouvernementales, aux partis politiques, aux syndicats, aux journalistes et aux individus d’exprimer leur opinion personnelle. Actes de harcèlement et d’intimidation, recours à la force excessive, détentions en masse et emprisonnements pour de longues périodes font partie des méthodes de plus en plus employées pour écraser toute velléité d’opposition civile ou politique.

Au Turkménistan - comme on peut le lire dans le dernier rapport d’Amnesty International sur ce pays (disponible en anglais uniquement et intitulé Turkmenistan : The clampdown on dissent and religious freedom continues) publié ce mardi 3 mai - toute personne soupçonnée par les autorités d’une forme quelconque d’opposition risque un procès inéquitable, la torture et les mauvais traitements. Ses proches sont fréquemment expulsés de chez eux, leurs biens confisqués et ils perdent leur emploi. Les groupes indépendants de la société civile sont dans l’impossibilité d’agir et plusieurs militants ont été forcés à l’exil. Les autorités contrôlent tous les médias. Elles ont pris une série de mesures visant à restreindre l’accès aux sources indépendantes d’information à l’intérieur du pays et empêcher toute information critique de parvenir à la communauté internationale, notamment en s’en prenant aux journalistes qui coopèrent avec des médias étrangers connus pour se montrer critiques vis-à-vis des autorités. Le président à vie Saparmourad Niazov , auto-proclamé Turkmenbashi (père de tous les Turkmènes), domine tous les aspects de la vie dans le pays.

Dans la Fédération de Russie, les militants qui essaient de propager des informations relatives à la situation des droits humains dans le Caucase du nord, ainsi que les victimes ayant déposé un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme, sont de plus en plus souvent la cible d’actes de harcèlement et d’atteintes aux droits humains - plusieurs d’entre eux ont même été tués. Les autorités russes semblent resserrer leur contrôle sur les médias à un point tel que toute information concernant la situation des droits humains en Tchétchénie et dans les républiques voisines du Caucase du nord est étouffée par la censure voire par l’autocensure.

En Turquie, en dépit de réformes juridiques et constitutionnelles récentes, les défenseurs des droits humains sont toujours la cible d’actes de harcèlement et d’intimidation de la part des agents de l’État. Leur action, leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion sont toujours limitées par de nombreuses lois et de nombreux règlements. De nombreux fonctionnaires locaux - chefs de la police, gouverneurs, procureurs - continuent de considérer les défenseurs des droits humains comme des « ennemis de l’État ». Les militants d’organisations de défense des droits humains, comme l’Association turque pour la défense des droits humains (IHD), ont été menacés, arrêtés, persécutés, torturés, enlevés et tués. Au moins douze représentants de l’IHD ont été tués depuis 1991. Dans la plupart des cas, les assassins n’ont jamais été identifiés et des membres des forces de sécurité turques ont été fortement impliqués dans certains de ces homicides.

« L’action d’un mouvement indépendant de défense des droits humains est cruciale pour toute société, afin de préserver les droits fondamentaux de tous et pour la construction d’une société juste, a déclaré Nicola Duckworth.

« Les gouvernements doivent veiller à ce que les homicides, « disparitions », actes de torture et mauvais traitements ainsi que les menaces à l’encontre de militants des droits humains fassent l’objet d’enquêtes impartiales et approfondies et que les auteurs présumés de tels actes soient traduits en justice. »

Amnesty International appelle la communauté internationale à exercer des pressions sur les gouvernements de la Fédération de Russie, de la Biélorussie, du Turkménistan et de la Turquie pour les convaincre de faire cesser les actes d’intimidation vis-à-vis des militants des droits humains et veiller à ce que toute personne bénéficie du droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion.

Complément d’information

Le 16 janvier 2004, le corps mutilé d’Aslan Davletoukaev, vingt-neuf ans, était retrouvé à proximité de la ville de Goudermes en Tchétchénie. Il collaborait à la Société pour l’amitié russo-tchétchène, organisation de défense des droits humains qui répertorie les violations des droits humains dans le Caucase du nord, notamment les « disparitions », cas de torture et homicides illégaux. Aslan Davletoukaev aurait été interpellé par les forces fédérales russes le 9 janvier 2004. L’enquête sur les circonstances de sa mort a été ouverte et close à maintes reprises mais personne n’a encore été reconnu responsable de sa mort.

Le 30 septembre 2004, la rédactrice de Birzha Informatsii, hebdomadaire indépendant de Biélorussie, a été condamnée à payer une amende équivalant à 600 euros pour avoir critiqué le référendum autorisant le président Loukachenko à continuer à exercer le pouvoir au-delà de la limite habituelle de deux mandats. En novembre de la même année, l’hebdomadaire a été suspendu de parution pendant trois mois pour le même motif. En raison du manque d’imprimeurs indépendants, le magazine n’est toujours pas disponible sur papier.

En juillet 2004, le correspondant de Radio Liberty, Saparmourat Ovezberdiev a dû quitter le Turkménistan et s’exiler du fait de son travail à la section turkmène de cette station de radio. Il faisait l’objet d’une surveillance rapprochée depuis de nombreuses années et des pressions pour qu’il arrête son travail s’exerçaient contre lui. Des membres de sa famille ont également été pris pour cible pour essayer de le réduire au silence, même après son départ.

Le 19 avril 2005, trois membres de l’Association turque pour la défense des droits humains (IHD), Eren Keskin, Saban Dayanan et Dogan Genc ont reçu des menaces de mort de la part d’un groupe ultra-nationaliste se faisant appeler la Brigade de revanche turque (Turk Intikam Tugayi). Ce groupe a revendiqué la responsabilité d’une attaque armée en 1998 au cours de laquelle le président de l’IHD, Akin Birdal, avait été très gravement blessé.

Pour plus d’informations, merci de vous reporter aux documents suivants :

Russian Federation : Concerns over reports of « disappearances » of relatives of Aslan Maskhadov (en anglais seulement)
http://web.amnesty.org/library/index/engeur460042005

Fédération de Russie : Une organisation de défense des droits humains menacée par les forces de sécurité
http://web.amnesty.org/library/index/fraeur460012005

Fédération de Russie : Il est dangereux de parler : attaques visant les défenseurs des droits humains dans le contexte du conflit armé en Tchétchénie
http://web.amnesty.org/library/index/fraeur460592004

Belarus : Suppressing the last voices of peaceful dissent (en anglais seulement)
http://web.amnesty.org/library/index/engeur490042005

Turkmenistan : The clampdown on dissent and religious freedom continues (en anglais seulement)
http://web.amnesty.org/library/index/engeur610032005

Turquie : Menaces de mort - Craintes pour la sécurité
http://web.amnesty.org/library/index/fraeur440142005

Les défenseurs des droits humains pris pour cibles
http://web.amnesty.org/library/index/fraact300202004

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