Espagne. Amnesty International déplore que l’Espagne ait rejeté les recommandations qui lui ont été faites d’enquêter sur les disparitions forcées et de revoir son régime de détention au secret Le Conseil des droits de l’homme adopte les conclusions de l’examen périodique universel sur l’Espagne


Déclaration publique

Index AI : EUR 41/002/2010 - ÉFAI

1er octobre 2010

Lorsque l’Espagne a réformé son Code pénal en juin 2010 [loi organique 5/2010 du 22 juin 2010], elle n’a pas mis la définition de la torture figurant à l’article 174 de ce texte en conformité avec l’article 1 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Au cours de l’examen périodique universel concernant ce pays, des recommandations ont été faites en vue de remédier à cette insuffisance [A/HRC/15/6, paragraphes 86.19 et 86.20 (Iran et République tchèque)]. Amnesty International est déçue que ces recommandations aient été rejetées par le gouvernement espagnol [A/HRC/15/6/Add.1, paragraphes 10 et 11]. En novembre 2009, dans ses observations finales sur l’Espagne, le Comité contre la torture avait demandé que deux éléments importants soient inclus dans la définition de la torture figurant à l’article 174 du Code pénal pour que celle-ci soit conforme à la Convention : « que l’acte de torture peut avoir été commis par “toute autre personne agissant à titre officiel” [outre « une autorité ou un fonctionnaire »] et que la finalité de la torture peut s’étendre aux fins “d’intimider ou de faire pression sur cette personne ou une tierce personne” » [observations finales du Comité contre la torture, Espagne (CAT/C/ESP/CO/5), 9 décembre 2009, paragraphe 7]. Amnesty International exhorte l’Espagne à donner suite sans délai aux conclusions du Comité.

Par ailleurs, l’organisation engage régulièrement l’Espagne à enquêter sur les crimes commis pendant la guerre civile (1936-1939) et la période franquiste (1939-1975) et à veiller à ce qu’aucune loi d’amnistie ne soit appliquée pour des crimes contre l’humanité. Elle condamne en outre les charges récemment retenues contre un juge d’instruction pour avoir enquêté sur la disparition forcée de plus de 114 000 personnes entre 1936 et 1951 [Amnesty International, Les charges retenues contre un juge d’instruction espagnol doivent être abandonnées, 22 avril 2010, http://www.amnesty.org/fr/news-and-updates/charges-against-spanish-investigative-judge-must-be-dropped-2010-04-22.]

Malgré la ratification en 2009 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la réforme du Code pénal espagnol en 2010, ce dernier ne comporte toujours pas de définition du crime de disparition forcée conforme au droit international. Les disparitions forcées demeurent sujettes à l’application d’amnisties et de périodes de prescription. Amnesty International note avec déception que l’Espagne a rejeté la recommandation qui lui a été faite au cours de l’examen périodique universel d’enquêter sur les disparitions forcées, de punir les responsables présumés et d’accorder des réparations aux victimes conformément au droit international [A/HRC/15/6, paragraphe 86.26 (Mexique)]. L’organisation exhorte le gouvernement espagnol à revoir sa position sur cette importante recommandation.

Amnesty International se félicite du soutien apporté par l’Espagne à trois recommandations : recueillir et publier des statistiques relatives aux infractions à caractère raciste, établir un plan national d’action contre le racisme et la xénophobie, et intensifier ses efforts pour enquêter de manière approfondie sur les actes de violence raciale et punir leurs auteurs présumés [ibidem, paragraphes 84.14 à 84.21]. L’organisation est également satisfaite de constater que l’Espagne a exprimé son soutien aux recommandations portant sur l’adoption d’un calendrier de mesures concrètes et d’autres mesures globales [ibidem, paragraphes 86.17 et 86.18 (Belgique et Iran)].

Elle est en revanche extrêmement déçue que l’Espagne ait refusé de revoir son régime de détention au secret [ibidem, paragraphe 87.5 (Costa Rica)]. Actuellement, les personnes soupçonnées d’infractions liées au terrorisme peuvent être détenues au secret jusqu’à 13 jours, et celles soupçonnées d’autres graves infractions jusqu’à cinq jours. Les détenus n’ont aucun droit de consulter l’avocat de leur choix ni de s’entretenir en privé avec leur avocat commis d’office, ils ne peuvent pas être examinés par un médecin choisi par eux-mêmes, leurs proches ne sont pas informés de leur détention ni du lieu de celle-ci, et les ressortissants étrangers ne peuvent pas prévenir leur ambassade ou leur consulat. Amnesty International reçoit régulièrement des informations faisant état d’actes de torture et d’autres mauvais traitements commis pendant la détention au secret, et les organes internationaux de défense des droits humains ont demandé à plusieurs reprises l’abolition de ce régime de détention [observations finales du Comité des droits de l’homme, Espagne (CCPR/C/ESP/CO/5), 27 octobre 2008, paragraphe 14, et rapport du rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste (A/HRC/10/3/Add.2), 16 décembre 2008, paragraphe 32]. L’organisation prie instamment l’Espagne de réexaminer sans délai cette recommandation en vue d’y apporter son soutien.

Complément d’information

Le 21 septembre 2010, le Conseil des droits de l’homme a adopté lors de sa 15e session les conclusions de l’examen périodique universel sur l’Espagne. Avant cette adoption, Amnesty International a fait la déclaration orale ci-dessus. L’organisation a également contribué aux informations sur lesquelles s’est appuyé l’examen périodique par le biais du rapport qu’elle a présenté à cet effet sur l’Espagne : http://www.amnesty.org/en/library/info/EUR41/013/2009/en.

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