Retour sur la rencontre avec Murhabazi Namegabe

Le jeudi 14 novembre 2023, nous avons eu le plaisir d’accueillir Murhabazi Namegabe dans les locaux d’Amnesty International Belgique. Fondateur et directeur du Bureau pour le Volontariat au Service de l’Enfance et de la Santé (BVES), il nous a fait part de son travail et celui de son équipe concernant son combat contre le recrutement d’enfants soldats en République démocratique du Congo (RDC) et pour leur réinsertion dans la société congolaise. Si tu veux en savoir plus, voici un récapitulatif de la rencontre !

Les débuts du BVES en République démocratique du Congo

Le BVES a vu le jour en 1992 grâce à l’initiative de 17 individus formant une équipe multidisciplinaire comprenant des médecins, des psychologues, des sociologues, des humanitaires, des avocats, etc. Son objectif était de trouver des solutions à la problématique des enfants en situation de difficulté en RDC.

En 1994, la situation des enfants en difficulté a pris une tournure encore plus grave avec le génocide au Rwanda, pays voisin de la RDC. Cet évènement a entraîné l’arrivée massive d’enfants non-accompagnés, séparés de leurs familles, sur le territoire congolais. Ainsi, une nouvelle catégorie d’enfants est née : les enfants soldats. À cette époque, on n’employait pas encore ces termes, mais seulement d’enfants Tutsis impliqués dans les atrocités commises contre la minorité ethnique Hutu.

Le BVES a assumé la mission de prendre en charge ces enfants, cherchant à empêcher qu’ils ne basculent dans la criminalité et ne poursuivent cette voie après avoir atteint l’âge adulte. L’approche consiste à leur offrir un accompagnement psychosocial visant à « réhumaniser » ces enfants, reprenant ainsi le concept introduit par Murhabazi Namegabe.

Le BVES intervient à travers quatre étapes clés :
1- Prévenir le recrutement des enfants, filles comme garçons
2- Obtenir la libération des enfants déjà enrôlés
3- Faciliter le retour de ces enfants dans leurs familles
4- Renforcer les communautés en offrant un soutien juridique et psychologique aux familles pour lutter contre le recrutement.

Succès partiel contre le recrutement d’enfants soldats par le gouvernement, défis persistants avec les groupes armés

Le BVES a réalisé d’importants progrès dans la résolution du recrutement d’enfants soldats en RDC. Grâce à des efforts soutenus et à une sensibilisation intensive, l’organisation a obtenu un appui de la communauté internationale et remporté une victoire en 2003, particulièrement au sein de l’armée officielle. Depuis cette date, aucune personne âgée de moins de 18 ans n’est recrutée par le gouvernement congolais.

Cependant, cette victoire n’est que partielle. Le problème persiste avec la multiplication des groupes armés en RDC, plusieurs d’entre eux bénéficiant d’ailleurs du soutien du président Tshisekedi. En effet, les Wazalendo (« patriotes résistants » en kiswahili), qui impliquent des enfants dans leurs activités, sont désormais associés aux soldats réguliers. Ils apportent leur soutien à la dictature contre les rebelles du M23 au Nord-Kivu.

Pour en savoir plus à ce sujet

Selon le BVES et d’autres organisations menant des enquêtes sur le terrain, plus de 260 groupes armés sont actifs et recrutent des enfants dans les cinq provinces de la RDC. Ces enfants sont soit recrutés de manière « volontaire » - le terme étant employé avec des guillemets étant donné que la survie, la réponse à des menaces envers leurs familles, ou le comblement du vide laissé par leurs familles perdues rendent la notion de volontariat assez douteuse - ou sont enlevés de force. De ce fait, près de 6 millions d’enfants sont déscolarisés en RDC en 2022 d’après l’UNESCO.

Que faire ? Ne perdons pas espoir !

Le BVES a développé des solutions dans les camps de réfugié·e·s rwandais·e·s en RDC, là où les groupes armés ont tendance à recruter des enfants. Cela inclut la prévention du recrutement volontaire soutenu par la communauté, la sensibilisation des officiers et le dialogue avec les chefs de groupes armés.

Effectivement, l’organisation s’efforce de surmonter les risques en engageant un dialogue direct avec les chefs de guerre. Elle identifie leurs proches, qui agissent en tant que médiateur·trice·s, et les forme sur les droits de l’enfant ainsi que sur les droits humains en général, en distribuant notamment des passeports des droits humains d’Amnesty International Belgique. Il est essentiel de leur faire prendre conscience que toute personne en dessous de 18 ans est considérée comme un enfant et bénéficie de droits spécifiques en raison de sa vulnérabilité. Avant tout, l’objectif est de les inciter à arrêter en évoquant les sanctions auxquelles ils seront confrontés en raison de leurs activités criminelles, et le fait qu’ils sont désormais répertoriés par l’Organisation des Nations Unies (ONU).

La protection des droits humains commence par les enfants, mais le contexte politique corrompu rend difficile l’application du droit international humanitaire. Néanmoins, face aux défis, les Centres de Transit et d’Orientation (CTO), sous la supervision du BVES, jouent un rôle crucial dans la réinsertion des enfants en leur enseignant la lecture et l’écriture. Elle travaille au cas par cas, cherchant à savoir d’où viennent les enfants, par quels moyens ils ont été recrutés, et à quel âge, dans le but de les réunir avec leur famille. Parmi les 17 948 enfants soldats démobilisés provenant de groupes armés et pris en charge par les CTO du BVES, 85% ont été réunifiés avec leur famille.

Les premiers enfants soldats que le BVES a assistés dans les années 90 sont devenus des « adultes adaptés et productifs » comme l’a souligné Murhabazi Namegabe, démontrant ainsi des résultats positifs qui encouragent et justifient la lutte menée par l’organisation. Actuellement, parmi les 387 membres du BVES, 7% sont d’anciens enfants soldats qui ont poursuivi des études, acquis de l’expérience et exercent désormais divers métiers. Dans l’ensemble, le BVES a apporté son assistance à un total de 53 964 enfants associés aux groupes armés, tandis que 325 928 enfants déscolarisés ou n’ayant jamais été scolarisés ont été réintégrés dans le système éducatif par le biais des Centres de Rattrapage Scolaire ou Centres de Jour (CRS) de l’organisation.

Murhabazi Namegabe a tenu à souligner l’importance du soutien crucial d’Amnesty International Belgique dans les progrès réalisés en matière de respect des droits humains en RDC. La campagne de sensibilisation, notamment à travers les cartes-actions pour soutenir la réinsertion des ex-enfants soldats en RDC, a joué un rôle significatif. Ces messages de solidarité sont une source précieuse de soutien pour les ex-enfants soldats pris en charge par le BVES et pour les familles impactées par ces recrutements.

Nous envoyons régulièrement ces messages au BVES, et cette fois-ci, nous avons eu le privilège d’en remettre à Murhabazi Namegabe en personne. Nous exprimons notre gratitude à toutes celles et tous ceux qui ont contribué à cette mobilisation !

D’ailleurs, cette mobilisation est toujours d’actualité. N’hésite pas à commander des cartes-actions sur ce sujet ! Chaque dessin compte !

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