Argentine, Amnesty International exige la fin immédiate de la répression étatique dans la province de Jujuy

paysage de la province de jujuy

Le gouvernement de la province de Jujuy, en Argentine, doit mettre fin immédiatement au recours excessif à la force contre des personnes exerçant leur droit de manifester pacifiquement, des centaines de personnes ayant été blessées ces derniers jours, a déclaré Amnesty International le 21 juin 2023.

« Le gouvernement de la province de Jujuy tourne le dos aux personnes qui exercent leur droit de manifester pacifiquement contre la réforme constitutionnelle et envoie les forces de l’ordre pour résoudre par la répression un problème qui devrait être résolu par le dialogue. La sécurité de la population ne peut être garantie en bafouant les droits humains », a déclaré Erika Guevara-Rosas, directrice pour la région Amériques à Amnesty International.

Depuis le début des manifestations dans la province de Jujuy, dans le nord de l’Argentine, contre une réforme constitutionnelle et des revendications salariales des enseignant·e·s, la police de la province a répondu par un recours excessif à la force, utilisant de manière aveugle des balles en caoutchouc, du gaz lacrymogène et la violence physique contre la population, en visant particulièrement les membres de communautés autochtones et paysannes.

Le 15 juin, la convention constituante a approuvé une réforme constitutionnelle de manière accélérée, sans possibilité de participation publique et de consultation. Le processus qui devrait durer au moins 90 jours, afin que le texte puisse être débattu, a été conclu en trois semaines à peine, et le texte final n’a été rendu public que le jour de son adoption.

Après son adoption, des mobilisations contre la réforme ont eu lieu à différents endroits dans la province. La répression de ces mobilisations a déjà fait des centaines de blessé·e·s, dont un jeune de 17 ans qui a perdu un œil à cause des tirs de balles en caoutchouc des forces de police. Par ailleurs, d’après les informations officielles, plus de 60 personnes ont été arrêtées, dont plusieurs pour « résistance à l’autorité », une infraction pénale régulièrement employée pour restreindre les mobilisations sociales et le doit constitutionnel de formuler des revendications et de manifester contre les autorités.

Les autorités de la province de Jujuy doivent garantir le respect du droit de manifester pacifiquement et du droit à la liberté d’expression et s’abstenir de faire un usage excessif de la force face aux manifestations qui prennent de l’ampleur dans la province. Il est en outre indispensable d’enquêter sans délai et de façon exhaustive, indépendante et impartiale sur les signalements de violations des droits humains perpétrées par la police dans le cadre de toutes les manifestations qui ont eu lieu dans la province.

Par ailleurs, Amnesty International demande que des informations complètes et ventilées soient rendues publiques sur le nombre de personnes blessées et détenues, ainsi que les accusations dont elles font l’objet. L’organisation appelle également les autorités à s’attaquer aux causes structurelles qui ont poussé plusieurs secteurs de la population à manifester pour défendre leurs droits humains. Plus particulièrement, l’organisation demande au gouvernement de la province de mettre en place un espace de dialogue véritable et de participation efficace pour tous les acteurs impliqués, particulièrement les populations autochtones et les organisations professionnelles et enseignantes, afin d’aborder de manière aussi approfondie que nécessaire les questions essentielles pour la population de la province de Jujuy.

Parmi les sujets qui soulèvent des inquiétudes pour la population et les organisations de défense des droits humains figurent certaines des propositions de réforme liées aux éléments suivants :

  • la réglementation de la contestation sociale et l’interdiction de certaines formes de manifestation publique de la population, comme les « blocages de rues et de routes » et « toute autre perturbation du droit de circuler librement », au nom du « droit à la paix sociale » ;
  • les questions liées à l’environnement, notamment la gestion de l’eau, la propriété et les autorisations et licences d’exploration et d’exploitation environnementales ;
  • la consultation, la participation et la propriété territoriale des populations autochtones.

Bien que les articles liés à la participation directe des populations autochtones aient finalement été supprimés, le texte doit tout de même être soumis à la consultation des communautés et autres acteurs sociaux, conformément au droit international.

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